Thrudvangar - Zwischen Asgard Und Midgard
Chronique
Thrudvangar Zwischen Asgard Und Midgard
Alex **** sortit du bâtiment. La porte en vieux bois vermoulu se referma derrière lui sur un bruit menaçant. Il regarda à droite, à gauche, prit une grande inspiration et s'engagea dans la ruelle tout en serrant l'enveloppe sur sa poitrine. Il n'avait jamais aimé se rendre dans la vieille ville le soir... Et puis, ce crachin obstiné qui collait ses cheveux à son front, ces nuages menaçants qui se profilaient à l'horizon, ce silence obsédant qui régnait autour de lui. Tout faisait naitre en lui un vague malaise, ou plus exactement un mauvais pressentiment.. Plus que quelques pas, et il atteindrait la station de métro. Avant de dévaler l'escalier qui le mènerai vers plus de sécurité, il prit de nouveau ses précaution : un coup d'œil rapide à droite, puis à gauche. Il glissa le courrier sous son pardessus. C'était pas le moment de se faire prendre...
Arrivé chez lui, Alex souffla. Il se débarrassa de son pardessus alourdi par la pluie, jeta ses clefs sur la commode de l'entrée. Tout en enlevant ses chaussures, il se dirigea vers son bureau et se laissa tomber sur son fauteuil de cuir. Le jeune homme s'accorda un moment pour retrouver ses esprits. Il saisit son coupe papier et ouvrit soigneusement l'enveloppe. Le contenu glissa sur la surface d'acajou. Un cd et un livret dont le visuel évoquait la mythologie nordique et fleurait bon les clichés en tout genre pour un groupe qui défiait les lois de la prononciation. «Zwischen Asgard Und Midgard» de Thrudvangar : huit titres entièrement écrits dans la langue de Goethe. Alex avait étudié l'allemand dans son enfance, mais il n'en avait plus que de très vagues souvenirs. Tout à coup, il ne fut plus sûr d'avoir envie de faire ce travail. En y réfléchissant la demande de son client mystère lui paraissait de plus en plus incongrue. Certes, c'était bien payé. Mais franchement, se mettre en danger pour essayer de savoir pourquoi l'équipe de Thrashocore n'avait jamais chroniqué d'album de la formation germanique, c'était vraiment ridicule... L'employeur s'était bien renseigné et savait qu' Alex nourrissait une passion pour les courants les plus extrêmes du metal. Le détective parcourut le livret. D'après la publicité qui s'y trouvait et qui encourageait à l'achat des deux premiers albums du groupe « Ahnenthron » et « Walhall », Thrudvangar pratiquait un « Epic Viking Metal » composé par des « German Warriors ». ça promettait. D'une pression sur un bouton de la télécommande, il alluma sa chaine hifi, et glissa la galette dans la lecteur. Il régla soigneusement le son, afin de ne pas éveiller les soupçons des voisins. Puis il se ravisa, préférant l'écoute au casque. Un coup de tonnerre retentit, immédiatement secondé par des nappes de clavier Bontempi. Un cri de guerre un peu faiblard, posé sur des riffs de guitares bourdonnants lançait « Thor » le premier titre de l'album. Alex sourit. Voilà un genre d'intro que beaucoup de groupes de Viking metal affectionnaient. Mais cette fois ci, cela lui paraissait presque efficace. Il fallait bien admettre que le clavièriste disposait d'une mélodie entêtante et qu'il ne pénalisait pas le titre, malgré les sonorités très kitch de son instrument. La voix du chanteur manquait, il est vrai de rage, mais s'accommodait parfaitement avec le style des Allemand. Peut être avait il jugé les Teutons un peu trop vite... D'après ce premier titre, il semblait que Thrudvangar avait les moyens de se distinguer de la masse des formations qui surfait sur le style viking ou pagan black metal. Puis « Bärenpelz Und Wolfsmantel » débuta. Et là, ça se gâtait. Des riffs déjà entendu mille fois, des mélodies au synthé usées jusqu'à la corde et l'impression d'une chanson qui traînait en longueur. Dieu que c'est chiant, soupira Alex. Il ne put réprimer un bâillement. Sa journée avait vraiment été longue, et l'affaire « Thrudvangar », aussi étrange pouvait elle paraître était comme un répit parmi toutes les enquêtes sordides qu'il devait mener. Il allait espérait la conclure rapidement. Cependant, au milieu de « Heimwärts », le jeune homme plongea dans le sommeil.
Alex se réveilla, l'air hagard et les oreilles en feu. Il eut besoin de quelques secondes pour se remémorer ce qu'il faisait avant de s'assoupir. Il devait s'occuper de Thrudvangar. Il n'avait déjà plus aucun souvenir des quelques morceaux qu'il avait écoutés quelques instants auparavant. C'était un mauvais signe. Alex pris son courage à deux mains et pressa le bouton play de sa télécommande pour relancer la lecture de l'album. Le groupe avait pourtant mis les petits plats dans les grands. « Zwischen Asgard un Midgard », leur troisième opus, jouissait d'une production correcte, faisant la part belle aux guitares, dotées d'un son clair et puissant. Si bien que ces dernières noyaient parfois le chant, d'autant plus qu'il ne brillait pas par sa vigueur et donnait souvent des prestations trop solennelles et récitatives. Le principal problème venait du synthé qui sonnait trop cheap, offrant un décalage parfois saisissant avec les autres instruments. Le viking metal des six Allemands était particulier. Délaissant la brutalité, il se voulait plutôt évocateur et s'attachait à traiter de la mythologie scandinave plutôt que de sanglantes batailles. Cela se traduisait par la présence de nombreux passages en mid tempo et par des blast rares et timides. Pourtant, malgré ces qualités et un bon début, la magie ne prenait pas. Pour Alex, un album d'un groupe pratiquant un tel style devait le faire voyager. Il voulait, rien qu'en fermant les yeux et en se laissant porter par la musique, s'imaginer en pays scandinave, au milieu d' immenses Fjords aux eaux turquoises, ou de gigantesques forêts d'un vert profond, se sentir tout petit face à cette nature impérieuse. De la musique pour oublier son cadre de vie, un boulot stressant, son studio de 20m² dans la cette grande agglomération qui l'avait vu naître. Malheureusement dans Thrudvangar, il n'y avait rien de tout cela. En réalité, le groupe n'atteignait jamais son objectif et captait difficilement l'attention de l'auditeur, faisant même naître chez lui un sentiment d'ennui... Le morceau « Heimwärts » se voulait être un hymne avec un refrain fédérateur idéal pour inviter un éventuel public à participer, mais il s'essoufflait très vite et manquait singulièrement d'entrain selon le jeune homme. Dommage. Quant à « Zwei Raben » et son intro au clavier ridicule, il évoquait plus Candy et Laura Ingalls que Thor et Odin. Pire, au fil des écoutes, il ne ressortait rien de « Zwischen Agard Und Midgard ». Un de ces album Kleenex que l'on oublie aussitôt. Un de ces albums trop gentillet, trop policé et trop long pour éveiller un quelconque intérêt...
Alex s'étira, il enverrait son rapport à son client mystère demain. Pour l'instant, il avait besoin de metal vraiment épique, et pas de « viking warriors » d'opérette. Il parcourut sa discothèque des yeux et en extirpa un cd. Il débarrassa le lecteur de sa chaine Hi Fi de « Zwischen Asgard und Midgard » et y déposa délicatement son disque. Le jeune détective se laissa tomber à la renverse sur son fauteuil, saisit sa télécommande et pressa le bouton Play. Il ferma les yeux alors que les premières notes d'« Arntor » de Windir envahissaient la pièce.
| Alesya 5 Juin 2008 - 2037 lectures |
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