Gridlink - Longhena
Chronique
Gridlink Longhena
"Gridlink isn't your typical grindcore band."
Interrogez les amateurs, le Grindcore pourrait se résumer en quelques mots-clés : "violence", "politique", "stupidité", "rapidité", "sueur". Si la plupart des formations actuelles se font l'écho d'une certaine tradition, empruntée aux anciens (Agathocles, Napalm Death et j'en passe), d'autres oeuvrent en douce à renouveler le style en y incorporant des éléments nouveaux, davantage de technique ou des plans plus variés que le classique titre-bulldozer de vingt secondes. Gridlink fait partie de ceux-là, de ces groupes qui envoient paître les acharnés de l’étiquetage, en mélangeant des plans ambiants, des parties techniques qui mettent à l'amende une bonne partie des formations actuelles et des tonalités progressives qui font de leurs disques des petites pépites de créativité.
Je vous entends déjà gronder : "Oui, mais le Grindcore, c'est avant tout de l'efficacité, que diantre ! Laissons l'astiquage compulsif de manches de guitares et les solos à rallonges aux chevelus qui posent sur scène." Rassurez-vous, Gridlink n'en oublie pas les piliers du genre et ne se fait pas prier dès qu'il s'agit d'écraser l'auditeur sous ds rafales de blasts et de hurlements hystériques.
On compte déjà quelques années d'existence pour ce rejeton bâtard d'Atheist et d'Insect Warfare. Un temps qui aura permis au groupe de trouver sa direction musicale, son univers. D'ailleurs, Gridlink se compose de gaziers qui n'ont plus à faire leur preuve dans le milieu : le batteur de Kill the Client, Phobia et Noisear, le guitariste et le vocaliste de Discordance Axis, et les premières chatouilles dans le bas-ventre de l'amateur se font déjà ressentir. Deux albums au compteur, "Amber Gray" et "Orphan", chacun ayant été encensé par la critique malgré une promo quasi-inexistante et une sortie quasi-confidentielle - rien n'a changé pour ce "Longhena", découvert (tardivement) ce mois-ci mais disponible depuis le début de l'année. Un album-épitaphe puisque Gridlink a décidé de stopper toute activité après sa sortie, pour des raisons inconnues : distance géographique ? Lassitude des membres ? Quoiqu'en soient les causes, "Longhena" achève en beauté une carrière par un climax de technique et d'intensité.
Car "Longhena" ne souffre de la comparaison avec ses deux cadets que sur un seul point : la pochette. Comment peut-on passer des délices visuels japonisants à cet espèce d'ersatz cybernétique, digne des pires compilations de techno-tuning que l'on fait honteusement circuler sous le manteau ? Pour le reste, l'album, en quatorze titres et vingt minutes, plie proprement toute concurrence et repousse toutes les limites fixées par "Amber Gray" et "Orphan", deux albums déjà très costauds. En augmentant la vitesse, mais également l'épaisseur des compositions en y ajoutant des éléments nouveaux.
Enregistré sur cinq jours à Tokyo, "Longhena" bénéficie d'un son propre et extrêmement massif, indispensable pour bien décortiquer les compositions souvent tentaculaires du combo. La batterie possède enfin un son à la hauteur du jeu du batteur, là ou elle était noyée par les riffs sur "Amber Gray". On prétend qu'un disque de Grindcore ne doit comporter aucun temps mort ? Gridlink incorpore, dès le troisième titre, un interlude instrumental superbe à base guitare et de violon (!) qui vient apporter une touche de mélancolie à un album qui démarrait déjà très fort avec "Constant Autumn", dont les riffs avaient le mérite d'être bien plus "touchants" que le matraquage punk habituel. Gridlink ose, et ça fait un bien fou."Taibas" et ses riffs lumineux qu'on croirait empruntés à Liturgy, "Look to Windward" alternant entre breaks au groove irrésistible et séances de solis, "Ketsui" qui incarne la volonté de puissance en des crescendos de tremolo-picking ravageurs... Les quatorze titres qui composent "Longhena" restent résolument Grindcore, mais chacun possède un petit quelque chose, une plus-value qui vient les hisser au dessus du lot commun. On pensera immanquablement à Antigama, même si "Meteor", dernier opus des polonais, ne tient pas la comparaison face au fourmillement de bonnes idées et de complexité qu'est "Longhena".
Gridlink réussit à donner une richesse et une profondeur technique assez incroyables à un Grindcore absolument impitoyable, consolation d'un amateur qui n'a pas eu grand chose à se mettre sous la dent cette année. Beau, fouillé, recherché, technique sans n'être qu'une succession de masturbation de manche, le chant du cygne du groupe americano-japonais résistera sans peine aux écoutes successives - fait assez rarissime pour un disque de Grindcore. Et puis, un groupe qui propose ses titres en version "karaoké" pour que les auditeurs puissent reprendre les paroles ne peut pas être foncièrement mauvais.
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