Epoch - Sacrosanct
Chronique
Epoch Sacrosanct
Ah il est fort le Jan! Il nous avait déjà fait le coup avec Brutally Deceased, Ad Nauseam ou plus récemment Dominhate, le patron de Lavadome Productions a remis ça en début d'année avec Epoch. Dénicher de belles trouvailles au fin fond de l'underground va vraiment devenir une spécialité pour le label tchèque. D'autant qu'au-delà d'un talent certain, elles font souvent preuve d'originalité et de personnalité. Il s'agit cette fois d'un jeune groupe belge dont on ne sait quasiment rien si ce n'est que le chanteur a fait partie de Fractured Insanity, ses autres groupes et anciennes formations m'étant en revanche totalement inconnus. Epoch a sorti en 2015 sa seule et unique œuvre à ce jour, Sacrosanct, au format digital. Alors je ne sais pas comment Monsieur Lavadome a réussi à pêcher ça, toujours est-il que l'album se retrouve réédité deux ans après en CD. En voilà une bonne idée!
Car ce premier full-length se révèle foutrement bon. Du death metal de haute volée qui plus est assez original et intéressant. Sur une base death metal classique empruntant au groove dark d'un Morbid Angel ("To Datechon, Ho Katechon" à 0'21, le démarrage de "Vision Absolute"), à la maîtrise d'un Behemoth, à la haine implacable d'un Hate Eternal, à la brutalité sombre d'un Dead Congregation (les tremolos vers 2'29 sur "Nine" ne trompent pas) ou au bouillonnement vicieux d'un Immolation, les Belges vont notamment ajouter des incartades black metal dans leurs riffs ("Vision Absolute" à 0'47, "Altered States" à 1'40, intro de "Nine") afin de leur donner une froideur et une noirceur supplémentaire, ainsi qu'un côté dissonant "post" (débuts de "Altered States" et "Ichneumon", break de "Nine" et "Hangman Paradox", "Sacrosanct" à partir de 1'50) ou chaotique qui rappelle surtout Ulcerate ("Sacrosanct" à 0'30, "Altered States" à 2'13...). Artificial Brain voire Gorguts peuvent aussi venir en tête à l'écoute de ce Sacrosanct furieux et tordu. On croisera également quelques riffs épico-stellaires à la Bölzer ("Vision Absolute" à 2'16/3'07, "Fear Ritual" à 1'03, etc.). Et même quelques passages/rythmes "dansants" certes rares et donc négligeables mais assez surprenants et qui montrent bien le caractère curieux d'Epoch (intro de "Altered States", "Ichneumon" à 1'18, "Hangman Paradox" vers 1'25).
Décrit comme ça, ça a l'air d'être un sacré bordel. Pas vraiment. S'il y a bien parfois une touche abstraite, des riffs souvent tordus, des relents chaotiques parce que beaucoup de choses se passent dans les morceaux à une vitesse élevée, l'ensemble reste non seulement compréhensible et audible grâce à une production excellente ainsi qu'une maîtrise technique exemplaire, mais aussi et surtout foutrement efficace. Car même s'il vous faudra pas mal d'écoutes pour faire le tour de ce Sacrosanct touffu, il vous embarque tout de suite, notamment par sa brutalité. Vous pensez bien que pour que j'apprécie un truc original qui dissonne et expérimente, il faut que ça blaste un minimum! Pas de souci là-dessus avec Epoch qui n'a de leçon à recevoir de personne en matière de purée. La puissance et la vitesse de certains blasts vous colleront au mur. Une bonne chose que le combo ait le souci de garder de la clarté, de la cohérence dans son propos, si brutal et bouillonnant qu'il soit. Ce qui n'est pas le cas de certaines formations récentes aux discours sibyllins voire carrément amphigouriques. Là, le message est clair : en foutre plein les oreilles à l'auditeur qui prend plaisir à se prendre ce déluge de blasts, de riffs sombres, de dissonances et de groove (ouch la basse!), sans en faire trop. Il faut que ça reste de la musique après tout!
Et ça en est de la sacrément bonne ici! Je l'ai toujours dit, je ne recherche pas l'originalité quand j'écoute du death metal (et heureusement car je n'en écouterais pas souvent sinon!). Je n'y ai toutefois jamais été réfractaire tant que c'est bien foutu. Exactement ce qui arrive sur Sacrosanct qui garde en plus une base death metal classique avant de s'insinuer dans des coins plus alambiqués, tout en ne lésinant pas sur les blasts. Ça bourre, ça joue, ça groove, ça hypnotise, ça n'a pas peur de s'aventurer ailleurs et ça sait aussi instaurer une ambiance noire. Epoch a décidément frappé un grand coup sur ce premier full-length que Lavadome Productions a bien fait de rééditer au format physique. Sacrosanct ne subit ainsi que quelques écarts de qualité, d'abord niveau riffs avec certains plus génériques et oubliables (forcément quand on nous habitue à de l'original, les quelques-uns plus banals que l'on croise s'entendent davantage), et aussi concernant les samples sur la fin de l'album ("Fear Ritual" et ses battements irritants et celui inopportun de "Sacrosanct" sans doute tiré d'un film), plutôt dispensables tant la musique se suffit à elle-même. Deux-trois broutilles en somme auxquelles on ne prêtera pas attention tant l'ensemble se révèle convaincant. Voilà une excellente découverte que cette première sortie des Belges d'Epoch qu'il faudra suivre de très près vu le potentiel et la personnalité affichés, pour les fans de death et brutal death traditionnels comme pour les amateurs de sensations fortes plus tarabiscotées. Sacrosanct datant déjà de 2015, on pourrait avoir le droit à du neuf dans pas trop longtemps. Miam!
| Keyser 8 Avril 2017 - 1264 lectures |
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