2018 commence à peine que viennent plusieurs sorties régulières et surprenantes. Et si j’avais pu faire l’éloge d’un
album aussi subtil qu’étrangement dissonant qu’était « Archaic War », je reviens ici avec une production qui, tout comme celle des russes de SOLAR DEMISE, s’est mis en tête de faire du Death Metal qui s’inspire non pas d’une référence remise au goût du jour, mais de plusieurs genres à part entière du Metal extrême.
Et ici, on va parler d’une fusion entre Black et Death.
Vous ne le savez peut-être pas, mais je suis friand de bon Blackened Death. C'est un genre qui, pour moi, peut s'avérer délicieux lorsqu'il prend les capacités mélodiques du Black, avec ses guitares aux sonorités incisives, sur la structure à la fois massive et mouvante, parfois insidieuse et vicieuse, d'un Death redoutable. Mon favori étant
A HILL TO DIE UPON, mais un
GOD DETHRONED sur Bloody Blasphemy ne me fera pas également mentir sur combien les auteurs peuvent être créatifs en mêlant ces deux genres.
XENOBLIGHT est un quintet danois tout frais, puisqu’il a vu le jour en 2017. Le groupe est composé de 3 anciens membres de
VELOCITER, qui officiait dans le genre du Thrash / Heavy. Cette précédente expérience se ressent dans leur musique qui, globalement, fait montre d'une richesse intéressante. Riffs black abrasifs et mélodiques (leur titre éponyme le montre si bien), batterie d'une variété remarquable, basse ronde et vrombissante et un chant bien agressif : on se sent dès le départ accueilli de la meilleure des façons !
Le chant est d’ailleurs la première chose qui peut attirer la curiosité, car la chanteuse propose une voix à mi-chemin entre
NERVOSA et
THE AGONIST sur Prisoners (les clean vocals en moins). Elle sait se montrer rugueuse, pleine de rage totalement contrôlée. Sur l’ensemble, elle ne fera rien d’oufissime, mais son style s’adapte totalement à l’hybridité d’une musique qui ne fait que jouer sur des mix et des alternances.
Commençons par évoquer l’inspiration Heavy-Thrash, qui se fait à la fois sur le riffing général que sur certains passages précis. Si on prend « Shapeshifter », la mélodie de tête prouve bien leur quête du riff – et l’arrangement du son permet de bien mettre cet aspect en avant, sans porter préjudice à l’efficacité et à la violence des autres instruments. On notera également « Predominance » : outre cette basse qui pourlèche les guitares, la phase instrumentale à 1:25 fait des ravages pour aller vers une partie pour brûler le pit façon Thrash.
Un tel morceau est également l’excellente occasion de parler des fondations Black. C’est simple, elles sont partout : le riff black sur la rythmique façon
GORGOROTH (époque Incipit Satan) dans « Descension » - alors que la batterie ne cesse de changer de patterns et de surprendre, jusqu'à tomber sur le bon blast black qui fait plaisir à 2:57, discrètement d’abord, pour revenir une minute plus tard – « Predominance », encore, où ils rentrent dans du riffing Black, tu enfiles ton petit solo avant de poursuivre. On notera qu’ils aiment bien ça, ponctuer leurs phrases par des transitions instrumentales au sein d’un même morceau, puisqu’après de multiples phases, viens-là qu’à 4:12, tu paies ton Black à nouveau !
Et si on évoquera rapidement le morceau éponyme « Xenoblight », titre instrumental qui permet de bien se faire une idée de ce groupe qui mélange plusieurs types de musiques Metal, c’est pour mieux se concentrer sur « Nocturnal Manifestations », dont le début résolument Black dans les sonorités semble davantage lorgner dans le Death metal par son traitement : le blast et les tonalités sont Black, le riff qui vient après est plus dans une veine Death / MeloDeath. Je reste surpris par l’extrême facilité qu’ils ont eus à rendre cohérent des changements multiples ; je le sentiment d’écouter un blend de tout un tas d’influences, mais d’une solidité à toute épreuve. Si on aime les dites références (et leurs groupes qu’ils aiment vont de
DEATH à
OPETH, en passant par
DESTROYER 666,
NEVERMORE,
KREATOR,
BEHEMOTH ou
CATTLE DECAPITATION), on ne sera que conquis par cette écriture tout en mélanges qui ne tombe jamais dans des lieux communs ou des facilités qui ratissent large.
D’autant que l’ensemble est superbement articulé, jamais sans accroc ni moment incompréhensible. Même le titre grindcore de moins d’une minute passe crème ! De plus, on retiendra quelques titres à l’identité forte : « Obsidian Chromatism », qui présente les capacités quasi-prog du groupe, tant il parvient aisément à aligner des parties très différentes et à gérer les montées-descentes, « Shapeshifter » à nouveau, où le duo de guitares fait tellement bien le café. C’est simple, par moments, on a le sentiment d'être face à du
VEKTOR sur la façon dont ça hache menu. Puis ce solo sous du blast beat... Il est tellement furtif, ce filou, que quand on l'entend on se sent récompensé !
Parler d’une telle production peut s’apparenter à un cauchemar. On peut accumuler les éloges, montrer à quel point c’est bien fichu, bien pensé et en même temps tellement direct, on en aura encore à dire ! J’ai dû marquer une pause avec « Transcendance » et sa mélodie égyptienne. J’aime énormément les mix intelligents, je ne peux que vous le dire : écoutez, c’est encore l’action la plus simple et sensée pour se figurer tout ce qu’il y a dedans. Le traitement Black-Thrash d’une écriture Death prog sympho, les multiples phases riches et justes... Parfois, il faut juste se laisser porter ! Et c’est d’autant plus vrai avec l’ultime titre, « Virus », et son intro qui monte aux bons moments, pour un morceau qui alterne aux instants opportuns : j’aime la façon dont la chanteuse allonge les notes, elle apporte vraiment quelque chose de très fort ici.
Ce morceau conclut un disque qui fait preuve d’audace, de créativité et qui ne tombe pas dans des erreurs de goût. On appréciera ou non ce côté fourre-tout danois. Mais comme je pars du principe que, en musique, ce qui fait l’originalité actuellement n’est pas la créations d’un genre, mais la manière d’intégrer et de réinvestir l’énorme diversité des styles et des approches due à l’explosion Internet, forcément je suis ravi avec ce genre de production !
Rien n’est inventé, mais tout est utilisé à bon escient, pour une musique riche, prenante, galvanisante et généreuse. Et pour un premier essai, ça force le respect.
5 COMMENTAIRE(S)
09/03/2018 19:52
C'était à peu près sûr que ça allait me plaire: la combinaison entre du Black/Death, et une écriture - un peu - alambiquée.
Ecriture qui ne se regarde pas trop le nombril,d'ailleurs, c'est pas Beyond Creation non plus.
Et j'aime bien le chant aussi, assez modulé finalement.
L'écriture, c'est exactement ça, elle est riche, mais on n'est pas sur du prog, ça alterne les phases sans en faire des caisses.
La voix est à l'image du reste des instruments : solide, elle répond présent quand il faut, et c'est d'une efficacité qui fait plaisir
Ils ne cherchent pas à faire du chi chi pan pan, ils passent à l'action
09/03/2018 15:26
C'était à peu près sûr que ça allait me plaire: la combinaison entre du Black/Death, et une écriture - un peu - alambiquée.
Ecriture qui ne se regarde pas trop le nombril,d'ailleurs, c'est pas Beyond Creation non plus.
Et j'aime bien le chant aussi, assez modulé finalement.
07/03/2018 18:42
07/03/2018 16:25
Ah ah, ravi que tu trouves ton bonheur
Merci de ton retour
07/03/2018 12:34