Voïvod qui ne serait pas un groupe de thrash metal à thématique spatiale aimant le punk mais... un groupe de punk aimant le thrash metal à thématique spatiale ? On va encore me dire que mon goût pour la formule me fait faire des comparaisons tirées par les cheveux. Et pourtant...
Quoi voir d'autre dans cet album d'Oozing Wound, le seul à vraiment me parler après le premier qui, déjà, contenait son lot de clins d'œil indirects mais néanmoins discernables aux Québécois ? Welcome again to the spaceship, motherfucker ! Je retrouve enfin le charme que pouvaient avoir les Ricains à leurs débuts, un attrait qui s’était étiolé d’album en album lorgnant de moins en moins vers la raideur d’un metal ulcéré pour devenir un rock noise et ironique, jamais tout à fait là où on l’attend et jamais tout à fait sérieux. Une absence de prétention qui a laissé place à une musique de plus en plus prétentieuse en somme, et, surtout, délaissant la puissance corrosive de
Retrash.
Pour autant,
We Cater To Cowards n’est pas un retour d’un Oozing Wound conquérant. Ici, on n'est pas à suivre les histoires d’un descendant de Körgull l'exterminateur mais d'un RSAiste futuriste rongé de drogues et de frustrations quotidiennes, balançant sa grogne sociale depuis des bas-fonds aliens. Ces quarante-et-une minutes jouent davantage sur le lo-fi et la hargne que sur une peinture au pinceau d’un univers fantasmé. Dès « Bank Account Anxiety », on sent que la bande joue d’un certain vécu, le ras-le-bol comme point de départ (une thématique courante chez eux), à ceci près qu’il est cette fois appuyé, surligné, jusqu’à être porté en transe. Trois riffs par morceaux, triturés à l’envie, répétés jusqu’à transformer la cervelle en bouillie, martyrisés par une section rythmique leur faisant subir ses sautes d’humeur : voilà la recette magique, définitivement noise, avec laquelle le projet transmet sa colère acide, définitivement thrash.
Ceux ayant vu Oozing Wound en concert savent la radicalité que son noise rock fortement metal transpire : elle est pleinement présente sur
We Cater To Cowards, encore davantage que sur cet exercice de style réussi qu'est
Retrash. Caustique, toxique et grevée de tiques, la bande transmet une fièvre guerrière vécue le regard rouge de sang et de fumée radioactive donnant envie de la rapprocher d'un High on Fire plus métal hurlant que Conan. Bien sûr, on note une certaine variété dans la répétition, permettant d’éviter la redondance. On peut ainsi citer « Old Sludge » et « Chudly », proches du tube façon Oozing Wound, de même que les solis de « Between Cults ». La cohérence de l’ensemble possède donc quelques détours, allant jusqu’au très-haut (« Total Existence Failure » ; « The Good Times (I Don't Miss 'Em) » ; « Midlife Crisis Actor ») mais aussi des périodes d’essoufflement (on attend trop que les choses se passent sur « Crypto Fash », malgré la présence de Bruce Lamont – Yakuza ; Bloodiest – au saxophone). Heureusement, une production aussi brouillonne et bruyante qu’une perceuse sans fil attaquant les crânes à tout-va permet à l’album de conserver constamment son aura mauvaise. Le gris de la pochette va définitivement bien à ce thrash metal / noise rock mal embouché et amateur de pied-bouche.
...Mais oublions tout cela et resserrons au mot qui vient en tête tout le long de l'écoute : punk, punk, punk, ni à chien ni à chier, du punk si martelé qu'il en devient psychédélique, porteur d'un univers où la galaxie n'est pas la seule à brûler. Ce qui laisse penser que, si Oozing Wound peut paraître avoir délaissé le thrash pour embrasser plus fort la part noise de son style, il donne surtout l’impression de revenir aux racines écorchées et déclassées du genre, qu’il traite en accord avec les nombreux bruits grouillant dans sa tête. Accrochez-vous, le décollage n'est que la première vrille dans vos oreilles d'un voyage aussi éprouvant que jouissif.
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20/12/2024 21:09