Si
Depravity Ordained avait été chroniqué en ces pages avec presque trois ans de retard en grande partie à cause d’une illustration m’ayant tenu à distance un bon moment, je n’allais évidemment pas réitérer la même erreur pour ce retour aux affaires très attendu des Australiens de Vile Apparition. Certes, le groupe originaire de Melbourne n’avait pas manqué de nous faire un petit coucou le temps d’un split en compagnie des Italiens de Miscreance mais mine de rien cela faisait déjà presque quatre ans que nous n’avions plus vraiment de nouvelles. Il était donc temps pour nos chers Australiens d’effectuer leur retour dans l’espoir effectivement de se rappeler à nos bons souvenirs.
Intitulé
Malignity, ce deuxième album voit le groupe opérer quelques menus changements. Du côté des forces en présence, on constatera que Dan Harris (guitare) et Dave Kearns (basse) ont tous les deux plié bagages et laissé leurs positions à messieurs Noah Papworth de Contaminated et Jordan Fernand d’Idolatry. Comme un changement n’arrive jamais seul, le groupe a également souhaité bon vent à Blood Harvest Records et Memento Mori pour s’en aller rejoindre les rangs de Dark Descent Records et Me Saco Un Ojo Records. Une collaboration qui devrait en toute logique les aider à gagner en visibilité, notamment de l’autre côté de l’Atlantique.
Empruntant son illustration au film In The Mouth Of Madness de John Carpenter et à l'un des livres imaginaires de Sutter Cane intitulé "The Breathing Tunnel,
Malignity donne déjà bien plus envie que son prédécesseur de se plonger dans la musique de nos Australiens. Une composition certainement pas très originale mais suffisamment bien troussée pour attiser la curiosité de ceux qui jusqu’à présent n’auraient encore jamais croisé la route de Vile Apparition. D’ailleurs si vous ne savez pas encore à quoi vous attendre sachez que les onze titres de ce nouvel album sont ici torchés en un tout petit peu plus de trente-quatre minutes. Si nous sommes évidemment bien loin de l’urgence du Grindcore et de ses chiffres vertigineux (dans un sens comme dans l’autre), pas la peine d’être particulièrement doué en mathématiques pour comprendre que nos quatre Australiens ne sont pas là pour "prendre le temps".
Passé ainsi les vingt-et-une secondes de "Siphoning Life", courte introduction marquée par un sample tiré du film Henry: Portrait Of A Serial Killer (
"But if you strangle one, stab another, and one you cut up, and one you don't, then the police don't know what to do. They think you're four different people."), c’est effectivement à coups de blasts que l’auditeur est accueilli. Une entrée en matière virile qui a le mérite de donner le ton puisque le reste de l’album sera bien évidemment à l’avenant. Mais la première chose que l’on remarque surtout dès les premières secondes de "Bloodletting" c’est le gap effectué en matière de production. Là où celle de
Depravity Ordained faisait le choix d’une approche à l’ancienne rappelant les premiers albums de Suffocation avec notamment une batterie hyper naturelle et presque dépouillée,
Malignity s’oriente vers quelque chose de plus moderne et de plus dense (sans perdre en authenticité) pour un rendu à la fois plus immédiat et définitivement plus redoutable. Car même si les Australiens ne sont pas avares en ralentissements et autres changements de rythmes, l’impression de se faire violemment rouler dessus domine à l’écoute de cette petite demi-heure.
Il faut dire que ce changement opéré côté production s’accompagne également d’un véritable regain de brutalité. Si le groupe n’était déjà pas du genre à enfiler des perles, ce nouvel album donne effectivement très vite l’impression de vouloir encore un petit peu plus corser le ton. De ces généreuses séances de blasts à ces accélérations moins radicales mais tout aussi dynamiques en passant par ces riffs particulièrement nerveux et tricotés à toute berzingue, ces changements de séquences et de rythmes impromptus ou ce growl un tantinet plus profond, tous les curseurs ont effectivement été poussés plus en avant sur ce
Malignity qui définitivement impressionne par sa montée en gamme générale.
Mais si le propos des Australiens se fait en effet plus radical, le groupe n’en oublie pas de varier les plaisirs et d’entretenir ce groove qui faisait déjà son charme à l’époque de
Depravity Ordained. Comme évoqué un petit peu plus haut, les moments où Vile Apparition va choisir de calmer le jeu ne manquent pas. Si on va naturellement retrouver quelques passages bien lourdingues typiques d’un Death Metal new-yorkais école Suffocation ("Bloodletting" à 1:04, "Broken Minds" à 0:28 et surtout 2:05, "The Essence Of Malignity" à 1:23 et 2:45, "Emulsifying Fleshpress" aux alentours de 1:17, "Decapitation Rites" à 1:21...) ou tout en groove ("A Canvas Of Corpses" à 1:34, "The Essence Of Malignity" à 0:31, "Castrated Gods" à 1:23, "Thriving On Disease" à 1:52...), d’autres moments s’avèrent quant à eux un petit peu plus étonnants. Tout d’abord il y a ce "Pulverised Dreams" qui sert ici de chouette interlude acoustique positionné à mi-parcours. Un titre inattendu qui offre une petite bouffée d’air frais bien sentie avant de se faire une fois de plus agresser de tous les bords. Vient ensuite "Thriving On Disease" et sa première partie très inspirée par Death époque
Human qui lui non plus, dans un registre bien différent, n’est pas sans se faire remarquer également. Ajoutez-y tout un tas de solos mélodiques dispensés à bon escient et une basse (et quelle basse !) particulièrement expressive et tout en rondeurs et vous voilà avec un album à même de figurer dans les premières places des tops de fin d’année.
S’il a fallu tout de même près de six ans aux Australiens de Vile Apparitions pour accoucher de ce deuxième album, on peut dire que toutes ces années auront été clairement bénéfiques pour la formation originaire de Melbourne qui avec
Malignity nous offre effectivement une belle montée en gamme et cela à tous les niveaux (illustration, production, écriture, interprétation et intention). Et même si le propos n’a rien de très original, on appréciera de pouvoir se délecter de ce genre de Death Metal qui change des sempiternels clones d’Incantation, Entombed ou Morbid Angel, aussi efficaces et sympathiques soient-ils. Bref, les Australiens nous reviennent habités du feu sacré et je peux vous assurer que comme moi, vous risquez d’enchainer les écoutes et de bander dur un sacré moment à l’écoute de ces onze cartouches punitives.
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13/10/2025 13:19