Si faire défiler les « story » Instagram est une activité chronophage et bien souvent dénuée de sens, celle-ci m’a tout de même permis d’apprendre que les Américains de Lifeless Dark étaient de retour avec sous le coude un premier album intitulé
Forces Of Nature's Transformation. Une excellente nouvelle puisqu’à vrai dire j’avais complètement oublié l’existence de cette formation dont je vous avais pourtant vanter les mérites avec enthousiasme il y a de cela un petit peu plus de quatre ans maintenant (pour les plus curieux, je vous renvoie à ma chronique élogieuse de
Who Will Be The Victims?)...
Effectivement disparu des radars depuis 2018, le groupe dont l’effectif n’a pas bougé d’un pouce en l’espace de six ans revient donc nous balancer son Stenchcore ou pour parler plus simplement son mélange de Crust, de Thrash et de Death Metal. Ce retour aux affaires pour le moins inattendu prend donc la forme d’un album de quarante et une minutes sorti il y a quelques jours seulement sous les couleurs du label Side Two Records (Green Beret, Permaculture, Confines...). Un disque dont l’illustration en noir et blanc ne manque pas de charme (ces entrelacs d’inspiration celtique, cette faux menaçante, ces têtes de démons espiègles, cette écriture à main levée...) même si celle-ci n’est pas particulièrement révélatrice de ce qui vous attend à l’écoute de ces neuf nouveaux morceaux.
D’ailleurs en y regardant de plus près, on constate que
Forces Of Nature's Transformation reprend deux compositions issues de
Who Will Be The Victims? puisque l’on va en effet retrouver les titres "Radiation Sickness" et "Feeling The Light" dans des versions tout de même revues et corrigées pour l’occasion (notamment "Feeling The Light" qui gagne ici plus d’une minute). Alors effectivement, cela ne laisse donc que sept nouveaux morceaux à se caler sous la dent (ce qui peut sembler un peu maigre après six ans d’absence) mais n’ayant jamais pu mettre la main sur la première démo des Américains (et ce n’est pas demain la veille étant donné les prix exubérants pratiqués sur DIscogs pour une simple cassette) je suis bien content de retrouver ces deux titres ici.
Enregistré entre 2021 et 2024,
Forces Of Nature's Transformation séduit d’entrée de jeu par sa production volontairement datée. Un son qui pue à mort les années 80 (notamment cette caisse claire particulièrement typique de l’époque et cela quel que soit le genre) et qui fait écho de manière tout à fait consciente aux premiers albums de Sacrilege et Bolt Thrower pour lesquels Lifeless Dark n’a d’ailleurs jamais caché son amour.
Un parallèle effectivement toujours aussi probant que l’on doit évidemment à la présence d’Elaine derrière le microphone et à cette voix toujours aussi intense, rageuse et abrasive. Un chant revanchard qui tire à boulets rouges sur notre triste monde tragique et ses nombreux travers sociétaux, économiques et environnementaux. Cependant, cette comparaison avec les Anglais de Sacrilege et Bolt Thrower ne s’arrête pas là puisque musicalement Lifeless Dark emprunte également beaucoup à ces deux groupes. En effet, entre ces saillies Thrash particulièrement nerveuses évoquant l’excellent et incontournable
Behind The Realm Of Madness de 1985 ("Monsters Of Man’s Invention / The Forgotten" à 2:55, "Depth Of Cold" et « Radiation Sickness » et leur démarrage en fanfare, "Fear No Evil" à 0:11, "Broken Mirrors" à 0:37) et ces riffs belliqueux aux harmonies sifflées et au groove rappelant l’élégance et la subtilité d’un char d’assaut en pleine action ("Monsters Of Man’s Invention / The Forgotten" à 1:26, "Depth Of Cold" à 2:01, l’essentiel de "Cryptic Remains", "Feeling The Light" à 1:35), les parallèles entre Lifeless Dark et ces deux formations anglaises ne manquent pas. On pourrait également évoquer brièvement Slayer pour certain breaks, ralentissements et autres changements de rythmes particulièrement bien troussés sur lesquels on ne manquera pas de se rompre les cervicales ("Monsters Of Man’s Invention / The Forgotten" à 5:28, "Depth Of Cold" à 2:02, "Cryptic Remains" à 3:16 ou "Radiation Sickness" à 1:07, "Fear No Evil" à 1:10 et j’en passe...) mais vous l’aurez compris si vous suivez le groupe depuis la sortie de sa première démo, rien n’a vraiment changé du côté de Lifeless Dark. Enfin presque rien...
En effet, on va tout de même vite se rendre compte que le groupe originaire de Boston a eu la bonne idée d’amener un petit peu de fraîcheur à sa formule grâce à deux/trois titres toujours aussi sombres mais beaucoup plus lourds et lancinants. Il y a d’abord les trois premières minutes menaçantes de l’excellent "Monsters Of Man’s Invention / The Forgotten" avec en premier lieu ces larsens qui rodent au loin et ces voix de mauvais augure auxquelles vont succéder de gros riffs à la Bolt Thrower puis le morceau "Cryptic Remains" tout aussi sombre mais nettement plus chaloupé avec ses riffs et son rythme entêtants. Un tout petit peu plus loin (le temps d’un "Radiation Sickness" dispensé en guise de bourre-pif bien placé) on trouve "Medusa", un morceau de près de six minutes aux allures d’hymne Doom / Punk sinistre et désabusé (avec à la clef de chouettes solos et leads). Enfin on termine avec "Feeding The Light" en clôture de ce premier album qui à la différence de cette version originale que l’on peut trouver sur
Who Will Be The Victims? se voit ici greffer une introduction beaucoup plus longue notamment grâce à cette basse vibrante annonçant les déboires à venir puis à un lead toujours aussi noir mais néanmoins plus étoffé qu’à l’époque. Certes, ce n’est pas avec cela que Lifeless Dark va révolutionner la scène Stenchcore mais sur un album entier de près de quarante-deux minutes cette diversité ne fait clairement pas de mal, bien au contraire.
Par son caractère complètement inattendu
Forces Of Nature's Transformation s’inscrit comme l’une des dernières belles surprises de l’année 2024. Après six longues années d’absence durant lesquelles on pensait le groupe définitivement mort et enterré, ce retour aux affaires est effectivement une véritable bénédiction pour qui goûte à ce genre de Death / Crust / Thrash furibard aux sonorités 80’s évoquant ce que la scène anglaise a fait de mieux en la matière (à commencer par Sortilege et Bolt Thrower donc). Toujours animé par le même feu intérieur, Lifeless Dark vient confirmer avec panache tout le bien que l’on pensait de lui et cela même si le souvenir du groupe de Boston s’était quelque peu étiolé depuis la sortie de
Who Will Be The Victims? en 2018. Sans surprise malgré l’effet de surprise, ce premier album est à n’en point douter l’une des sorties de l’année pour mes Punks à chien sûrs et autres Metalheads crasseux et cloutés.
2 COMMENTAIRE(S)
16/12/2024 11:25
Évidemment
16/12/2024 11:16