Lifetaker - Night Intruder
Chronique
Lifetaker Night Intruder
Sortir un disque si énervé, si agité, le jour de la fête des amoureux… Attention, les gars, je crois qu’on a de sacrés petits taquins devant nous. Et ce n’est pas pour me déplaire, bien au contraire !
La pochette classieuse, qui réussit à être inquiétante sans pour autant être trop edgy, et la promesse d’un mélange de Grindcore, de Hardcore et de Sludge, m’avaient déjà vendu l'album avant même d'appuyer sur Play. Pourtant, jusqu’à présent, la formation était purement et simplement inconnue au bataillon. Lifetaker ? Désolé, votre nom n’est pas sur ma liste. Des outsiders, qui semblent se complaire dans ce rôle de vilains petits canetons. Après s’être échauffés sur un EP, « Thanatos », sorti l’année de leur formation (2018), le quintet propose son premier full-length, « Night Intruder », en autoproduction. Seul contre tous, besoin de personne pour prouver qu'on peut casser des bouches.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce premier jet est très réussi. La copie n’est pas parfaite, mais pour un candidat libre qui a bûché dans son coin, le résultat est plus qu’honorable. Prenez Young and in the Way (sans les histoires sordides), ajoutez une rasade de Nails (sans le côté simplet) et de Converge (sans les velléités mercantiles), et vous aurez une petite idée de ce qui vous attend sur « Night Intruder ». Le titre de l’album était déjà un bel indice : à l’image de ce gus cagoulé, probablement très peu porté sur la gentillesse, le disque ne s’encombre pas de consentement pour faire ses basses œuvres. Ne t’inquiète pas, ça va vite et bien se passer.
L’affaire est pliée en 28 minutes, le cambriolage est minuté. Dès les premières secondes, on sait qui a mis les pieds chez nous. Le son, que l’on doit au Tonmeisterei Oldenburg (Jungbluth, Alpinist, Jesus Cröst, Yacopsae, excusez du peu) a su atteindre le point d’équilibre parfait entre la saleté des rues les plus mal famées de Dortmund et la propreté étincelante des plus grandes écuries du genre : ce mélange bâtard de Hardcore chaotique et de Grindcore n’aurait d’ailleurs pas dépareillé dans le roster de Deathwish/Throatruiner… Lifetaker prend ses aises et violente, au travers de compositions variées, mais qui gardent toutes en fil conducteur l’urgence, et la soif de sang: « Loverope », et son ouverture résolument Black Metal ; « Liturgy » qui traîne son tempo lent, encombré de riffs Sludge de fin du monde, brisés par des accélérations bien senties en seconde moitié de titre ; Avec, systématiquement, cette alternance d’aboiements Hardcore et de hurlements stridents, passés du côté obscur de la force – Ce n’est pas un, mais plusieurs assaillants qui nous font face. Et leur ardeur à la tâche impressionne. Le tempo est globalement soutenu, et les ralentissements ne sont que des prétextes pour frapper au sol. Peu importe la discrétion quand on est en surnombre ! Tout un programme, hein ? Et être témoin sonore, et non simplement oculaire, de ce brûlot résolument Punk dans l’âme, fait toute la différence.
Forcément, les influences sont bien présentes, et « Night Intruder » manque peut-être un peu de personnalité pour être un album sur lequel on reviendra encore dans quelques années. Néanmoins, pour ses premiers pas dans la cour des grands, Lifetaker montre les crocs, et un sacré potentiel dans l’attentat sonore. Vicelard, nerveux, les muscles en tension permanente, il démarre avec un croc en jambe, et appelle ses potes pour finir le travail au sol. Lâche ? Non, stratège, Monsieur. « Night Intruder » ne s’encombre pas de chichis, et fonce droit au but avec ses riffs acérés et ses rythmes galopants. Un bien beau drive-by.
| Sagamore 26 Février 2020 - 1044 lectures |
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