En ce troisième et dernier jour, le soleil et les gros nuages de beau temps se disputent le ciel. Le camping se réveille doucement, le calme règne, les rares personnes que je croise doivent faire le même constat en me regardant : on commence à fatiguer.
Je me suis fait avoir encore et ce n'est pas la première fois. Ah, cette confusion des homonymes... Quelques semaines auparavant, j'avais été plutôt emballée en écoutant
VÖLVA, le groupe de Stoner/Doom islandais avant de m'apercevoir que le METAL MAGIC FESTIVAL avait booké un obscur et jeune trio féminin suédois proposant un Black/Punk d'une simplicité enfantine, dont il n'y a pas grand-chose à retenir : deux pauvres accords se battent en duel, la bassiste ne connaît que sa corde de mi et la batteuse devrait apprendre les rudiments de son instrument au lieu de se mettre minable (elle ne tenait plus debout quelques heures plus tard). Indiscutablement dispensable. Mais je m'en cogne, il y a VED BUENS ENDE ce soir.
Encore un groupe de Death Metal dont j'ignorais l'existence il y a encore peu de temps. Et pourtant,
DEADFLESH a un quart de siècle de carrière et une solide fan-base. Ils se disputent le podium avec KILLING et SLÆGT au comptage des t-shirts et patchs jusqu'à un petit bonhomme à peine en âge de marcher. Alors que je n'en attendais pas grand-chose, les Danois vont m'offrir une bonne surprise avec une prestation sincère et efficace, avec quelques titres (pas tous) très inspirés de BOLT THROWER. Le parallèle est d'autant plus troublant que la bassiste me rappelle un peu Jo Bench. Du gros riff, un bon growl et beaucoup d'envie, je me surprends moi-même à rester jusqu'à la dernière seconde sous la cagnard (si, si, le cagnard) devant DEADFLESH.
Setlist :
. Omega-Hammer
. Zyklone Nemesis
. Ghost of Napoleon
. Inzane
. Iron Mountain
. Trenches of Slaughter
. Vanguards
. Bury the Hatchets (in the Head)
. Stand your Ground
. Bulldozer of Gore
. Exo-Vermin
. Age of Treason
Remplaçant de dernière minute suite à l'annulation du groupe américain OUTLINE, la jeune formation danoise
SHAMASH (non, non, pas SCHAMMASCH) s'essaie au Black/Death, genre que j'apprécie tout particulièrement, mais aura toutes les peines du monde à me convaincre. Ce n'était pas nul, c'était juste super chiant. Je m'en tape, il y a VED BUENS ENDE ce soir.
Avec
TAINTED LADY, on quitte carrément l'univers Metal et on tombe dans le Rock US plein de bons sentiments, à la Bon Jovi, à base de "
hey ho, let's go to the river !" et autres refrains aussi faciles qu'entêtants. Je ne vais pas faire ma tête de pioche, ils avaient un bon son, une belle attitude et plein d'énergie, c'était croquignolesquement gentil.
Le Danemark est un si petit pays qu'il y a des rencontres artistiques inévitables, créatrices de side-projects particulièrement intéressants, à l'instar d'
ALUCARDA où l'on retrouve Hampus Wahlgren de TAPHOS à la basse et au chant, Simon Larsen de PHRENELITH à la guitare et Ferreira Larsen de DEMON HEAD à la batterie. S'adonnant à un irrésistible Punk/Doom crasseux, Hampus Wahlgren, voix complètement éraillée, a des airs de loubards des quartiers malfamés avec sa clope au bec, ses lunettes noires et ses cheveux filasses. Au bout d'une demie heure, je me faisais la réflexion qu'ils auraient dû mettre la barre encore plus haute en terme d'ambiance destroy - garage, jusqu'à ce que Wahlgren reste bloqué devant son ampli, se retourne enfin, fracasse sa basse au sol avant de l'envoyer violemment dans le public (on a frôlé la catastrophe) puis quitte la scène sans un mot ni un regard. Trente minutes montre en main, merci d'être venus. Ceci dit, j'ai beaucoup apprécié, mais le budget instruments de ce fest commence à peser lourd.
Je vous jure que j'étais pleine de bonne volonté et avais prévu de me réconcilier avec le Heavy suédois grâce à
SOURCE, jeune formation s'inspirant notamment du maître KING DIAMOND. Mais mon anglais rudimentaire n'a pas dissuadé Klaus, colosse roux et barbu, d'entamer avec moi une discussion à bâtons rompus fort intéressante sur les us et coutumes du metalleux danois ou encore le régime alimentaire des membres de GOJIRA. Les Français se comptent sur les doigts de la main, nous suscitons un brin leur curiosité, et les Danois ont le contact facile. D'ordinaire très timide, je me suis pliée de bonne grâce à cet exercice périlleux avec bien plus de monde au cours de ce week-end qu'en plusieurs années de fests (je comprends bien, mais j’ai du mal à aligner trois mots de suite sans réfléchir)… et je n’ai pas vu SOURCE. Oups !
Voilà le genre d'exemples qui me donnent raison d'avoir fait le déplacement :
TONGUES que j'ai découvert grâce au METAL MAGIC FESTIVAL. Même si la voix, notamment sur les parties claires, n'est pas tout à fait en place ni toujours très juste, même si pour une fois et malheureusement le son n'est pas au top sous la tente, et même si l'assurance leur fait un peu défaut, je mesure la chance de voir chez eux ces jeunes Danois dont l'univers m'avait déjà procuré de belles émotions sur piste. A la croisée des chemins du Black, du Death et du Doom, leur unique album sorti en 2017, intitulé
Hreilia, renferme quelques pépites (
...And The Ever Watchful Cloud et
Grove of Mithridate) et mérite une suite, si d'aventure le groupe gagnait en maturité tout en conservant cet esprit d'ouverture. Malgré les petits défauts, j'ai passé grâce à eux un excellent moment. Un groupe à suivre de très près en ce qui me concerne.
J'ai suivi d'un œil et d'une oreille très distraits la performance des Allemands de
VULTURE, venus présenter leur second album
Ghastly Waves & Battered Graves, peut-être futur monument du Speed/Thrash. Ça avait l'air plutôt tonique voire sévèrement burné (quoique... il monte haut dans les aigus quand même), mais une sympathique conversation avec une nana a eu vite fait de détourner mon attention (mon accent me trahissant, j'ai eu droit à la longue liste de récriminations qu'elle exprimait à l’égard du Hellfest). Après tout, ce n'est pas grave, car il y a VED BUENS ENDE bientôt.
J'ai déjà les lombaires en vrac,
HYPERDONTIA se chargera de me flinguer les cervicales ! Mes aïeux, cette fessée pour le public, cette leçon pour les groupes ! Après un set expédié en vingt minutes au KTDF 2018 que je n'avais fait qu'entendre (excellent souvenir malgré cela), j'ai enfin un contact visuel. David Torturdød, tête renversée, yeux révulsés, s'affale sur le pied de micro et vomit son growl des cavernes, les guitares dégoulinent de gras putride et de miasmes, le son est é-nor-me, on capte tout sans exception, et si on a un peu de compassion, on souffre avec Paweł Tunkiewicz, téméraire et incroyable batteur qui semble mettre toutes ses forces à chacune de ses frappes. Faut que je me réécoute d'urgence
Nexus of Teeth en rentrant à la maison. Putain, c'que c'était bon !
Après la claque infligée par HYPERDONTIA, il n'est pas facile de se remobiliser pour les vétérans américains de
MEDIEVAL STEEL. Vétérans, vétérans, il ne reste plus que deux membres d’âge respectable et un gratteux manque à l’appel. Ce n’est pas désagréable du tout, mais ça me paraît d'un mou, mais d'un mou ! Le côté épique a été laissé à la maison de retraite de Memphis, dont on a laissé sortir Bobby Franklin, qui a perdu en voix ce qu'il a gagné en bedaine. Il abandonne même son micro à son jeune bassiste dès qu'il en a l'occasion. Ils sont gentils comme tout, nous racontent leurs petites vies, font des blagounettes, se taquinent avec leur gouaille made in USA, mais ne semblent pas plus concernés que ça par l'événement. J'ai la désagréable impression, j'espère me tromper, qu'ils ont assuré le service minimum. Et puis je suis déçue : ils n'ont pas joué
Tears in the Rain, qui me fait bien kiffer dans le genre.
Ce devait être le dernier concert des Italiens de
BLACK OATH, en tout cas, c'est ce qui avait été annoncé il y a quelques mois. Ces derniers semblent avoir changé d’avis, mais sait-on jamais. Si l'opportunité ne se représente plus, je serais heureuse d'avoir au moins une fois assisté à cette solennelle, mélancolique et funeste cérémonie d'Occult Black/Doom. La plongée dans les ténèbres est délicieuse, la magnifique voix claire d’A.Th envoûtante. Je lui en veux presque d'avoir laissé le micro à son invité Ustusmallagam, chanteur de THE RITE et DENIAL OF GOD sur
Obsessed by Moonlight que j'adore, qui pour le coup, a perdu de sa saveur en même temps que sa douceur. Autre petit regret, la qualité du son, qui m'a parue un chouia en dessous de celle proposée habituellement sous la tente. Il n’empêche que la performance est plus que séduisante, à défaut d’être la tuerie que l’on m’avait prédit.
Ai-je besoin de vous le rappeler ?
VED BUENS ENDE est là, pour le troisième concert officiel de sa carrière, le premier depuis 1995. Ils arrivent enfin, j'ai réussi sans difficultés à me placer entre Carl-Michael Eide (AURA NOIR notamment) assis sur son tabouret et Skoll (ARCTURUS entre autres), basse en main. Dès les premières notes de
Coiled un Wings, je suis submergée par l'émotion, emportée par une vague de ce qui pourrait bien être du bonheur. Ces lignes sont Written in Waters de mes larmes qui n'ont cessé de couler jusqu'à la dernière seconde de ce moment de grâce musicale offerte par des fabuleux musiciens : Carl-Michael Eide est un merveilleux guitariste et son chant est d'une telle justesse, d'une telle beauté ! Quant à Vicotnik, le regard coquin, grimaçant de grands sourires diaboliques, tirant sans cesse la langue, au charme ravageur, se charge des voix harsch avec une telle maîtrise ! Skoll à la basse, Øyvind Myrvoll à la batterie, tout aussi impressionnants, complètent et subliment l'ensemble avec cette dimension avant-garde, prog, presque jazzy (ce son de basse, je m'en remets pas!). Tout, absolument tout, était parfait : le son était incroyable, la setlist généreuse avec la quasi-totalité de leur œuvre, l'attitude des musiciens, le visage rayonnant d'un bonheur non feint (ils ne cessent de sourire, de se chercher du regard, semblent prendre conscience de ce qui est en train de se produire), l'accueil du public, très ému d'assister à cet évènement inoubliable. Autour de moi, les gens aussi se regardent, se sourient, des étoiles ou des larmes plein les yeux (je ne suis pas la seule), communient presque dans l'intimité (sommes-nous 200-300 personnes en ce moment ?). Plus d'une heure de fureur et de poésie, mélange magique et surpuissant. Chers VED BUENS ENDE, qui pourra un jour rivaliser avec ce que vous venez de m'offrir ?
Setlist :
. Coiled un Wings
. I sang for the Swans
. A Mask in the Mirror
. Carrier of Wounds
. You, that may Wither
. It's Magic
. Remembrance of things Past
. Den Saakaldte
. The Plunderer
. Those who Caress the Pale
. Autumn Leaves
Ainsi s'achève pour moi la XIIème édition du METAL MAGIC FESTIVAL, de la plus belle des manières. Je n'ai pas l'esprit à aller m'encanailler avec
ARCHANGEL, tribute band danois des MISFITS et de SAMHAIN, je préfère prendre du temps pour redescendre sur terre, à mon rythme et dans mon coin. Ceci dit, de loin, ça avait l’air d’être vraiment cool, tant pis pour moi.
L'heure du bilan a sonné : le METAL MAGIC FESTIVAL est un festival modeste, en termes de moyens financiers et de fréquentation (peut-être 400 personnes au plus fort de l'affluence sur la dernière journée ?). Une écrasante majorité de danois s'y retrouve chaque année, en habitués, et une proportion non négligeable du public local offre ses services en tant que bénévole le temps d'une journée, mission qu'elle remplit avec application et beaucoup de gentillesse.
L'ambiance y est détendue, chaleureuse et bienveillante, en raison peut-être d'un public provincial, à la moyenne d'âge plutôt élevée, qui vient chaque été retrouver les copains (ici, on se salue d'une accolade ou d'un câlin), écouter de la musique, sans jugement d'aucune sorte pour ceux qui l'entourent et une grande ouverture d'esprit. Alors que les fans de Metal extrême sont clairement minoritaires, j'ai vu un papy hardos s'accrocher aux amplis pour suivre HYPERDONTIA, un fan de DORO kiffer IMPETUOUS RITUAL (je reste scotchée par l'accueil que ces derniers ont reçu) et d'autres choses tout aussi improbables : un gars qui m'offre galamment sa place aux barrières, des gens qui s'excusent après une légère bousculade, le backpatch DENIAL OF GOD en canevas ou d'autres en tricot, le combo sandales-chaussettes/short camouflage/veste de costume ou encore le poncho mexicain à patchs. En France, avec notre regard, on le qualifierait peut-être de festival de beaufs, ici, c'est un festival de passionnés qui se contrefichent du style et franchement, ça fait du bien.
L'affiche, résolument tournée vers le old-school quel que soit le style, aura de quoi satisfaire le fan de Metal aux goûts éclectiques, pour d'autres, le pire côtoiera le meilleur : pour ma part, je me situe un peu entre les deux et ça me convient parfaitement.
Soucieux du confort des festivaliers, de gros efforts sont faits au niveau des sanitaires et de la propreté, mais deux améliorations seraient les bienvenues : le nivellement du terrain de camping (vraiment casse gueule et une horreur pour le dos) et la ventilation de la tente abritant la scène secondaire. Les fumeurs sont très nombreux et les deux ouvertures trop étroites, on suffoque rapidement là-dessous.
Vous l'aurez compris, j’ai été conquise par le METAL MAGIC FESTIVAL, événement à taille humaine, fréquenté par de vrais êtres humains, avec de vraies valeurs. L'orga peut compter sur mon éternelle gratitude pour cet inoubliable retour de VED BUENS ENDE. Je reviendrai sans aucune hésitation à Fredericia si l'affiche me convient, même qu'à demi, car c'est un festival où il fait bon vivre sa passion.
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