Ceux qui prennent le melon après un disque phénoménal et nous sortent alors un disque-concept particulièrement fouillé mais où même l’archéologue se demande où se trouve le plaisir sous les couches… Il faudrait en faire une liste. Et elle serait encore plus longue que la première phrase de cette chronique.
On est tenté de mettre Iron Lung et son
White Glove Test dans cet inventaire de ceux ayant trop pris la confiance. Jugez plutôt : les auteurs de la brute et industrielle sauvagerie qu’était (et reste)
Sexless // No Sex décident de pousser à l’extrême leur schizophrénie en sortant un album double ne devant faire qu’un (mais qui est deux, vous suivez ?) avec un hémisphère droit dédié au powerviolence et un gauche à la noise / ambient. À la charge de l’auditeur de recomposer lui-même un cerveau avec tout cela, alors qu’il espérait se démonter le sien ! Voilà ce qu’on appelle dans le jargon « faire une Neurosis » – en souvenir du doublet
Times of Grace /
Grace avec l’excroissance Tribes of Neurot –, rarement une bonne idée quand vient l’heure de casser des dents.
Car c’est bien le duo Jon Kortland / Jensen Ward qui en ressort tête basse et avec un rendez-vous chez le dentiste.
White Glove Test souhaite proposer trois œuvres en une ; il ne convainc dans aucune des moitiés prises seules, son powerviolence semblant handicapé de silences et pauses rachitiques, sa noise peu variée et obsédante. Coté violence, la puissance reste présente, notamment dans ces accélérations typiques qui renouent avec la qualité de
Sexless // No Sex. Cependant, le flot particulier qui permettait à l’ensemble de devenir marquant au-delà d’un genre – tellement codifié qu’il dépasse ses interprètes, à la manière du grindcore qui n’en peut plus de répéter la table des lois écrites par
Scum de Napalm Death – est absent, engoncé dans une sensation de manque qui fait faire la moue lors de patterns de batterie évoluant dans un mutisme qu’on imagine celui de l’auditoire (« Hidden Task » ; « Plasma Separatist » ; « Reductive Living »). Mais c’est bien dans ses expérimentations bruitistes – pourtant point de départ de ce nouvel essai – que le projet déçoit le plus, ses collages sonores semblant aller nulle part, l’atmosphère industrielle et froide, les images d’usines nocturnes écrasant les êtres de leur rouille, n’ayant pas ce pouvoir de suggestion qui rend ce type d’exercice notable.
Un envoi à la benne à recyclage pourrait perpétuer ce discours sur l’humain comme étant le premier déchet rejeté par les fabriques ? Oui, pour qui aura pris la version double-CD sans l’installation sonore requise pour écouter les deux disques ensemble. Ceux ayant la version numérique – permettant un véritable comparatif – nous regarderont pantois, se demandant si l’on a bien écouté la même œuvre.
White Glove Test révèle toute sa radicalité dans sa version « merged », powerviolence et noise réunis. On prend alors en pleine face tout le potentiel gâché de ces deux fois vingt-et-une minutes, leur sadisme qui va encore plus loin que la dépression induite par l’écrasement constant – le changement de vitesse comme simple variante – de
Sexless // No Sex. Chacun s’alimente et s’accentue, formant un décor de ruines mécaniques, stérilité du paysage où tout semble mort, un sentiment claustrophobique signalant que nous sommes les prochains à finir broyés.
Disons-le :
White Glove Test serait sorti comme tel avec un mixage approprié – et non le soin de laisser faire l’auditeur (on n’aime pas les devoirs en musique ici) –, il aurait été un quasi-égal de son prédécesseur, la sensation de course folle en moins mais suffisamment différent pour ne pas donner une impression de redite, tout en conservant ce qui fait la particularité d’Iron Lung. Ce n’est malheureusement pas le chemin pris, les Ricains ayant usé leur cervelle partout sauf là où cela compte. Me concernant, je ne vais pas m’embêter outre mesure et mettre ici un guide clair pour qui voudrait tenter sa chance si jamais cela n’était pas déjà fait :
Disque Powerviolence : 7/10
Disque Noise : 4/10
Les deux ensembles : 8,5/10
Moyenne générale : 6,5/10
Parce que faire simple est souvent la meilleure des manières de se faire comprendre.
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par Lestat
Par Jean-Clint
Par xworthlessx
Par Ikea
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par Lestat
Par Krokodil
Par Niktareum
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène