L'Esprit du Clan - Chapitre 3 - Corpus Delicti
Chronique
L'Esprit du Clan Chapitre 3 - Corpus Delicti
Il est une question que se posent tous les groupes, notamment de métal, qui démarrent en France. Doit-on chanter en français, au risque d'être mal compris par les étrangers, et de limiter sa carrière aux seuls pays francophones (la Suisse, la Belgique et la France à l'exception de Marseille, où ça fait longtemps qu'on ne parle plus français mais "franesaieuh avé un assent à boucher le vieux port" et Paris, où on ne parle jamais parce que tout le monde se fait la gueule/envoie des textos sur son portable Samsoule/écoute son iDaube à fond) ? Ou doit-on chanter en anglais, au risque de servir aux oreilles des auditeurs qui ont eu la bonté d'acheter votre cd (ou la malhonnêteté de le télécharger pour voir avant si par hasard c'était pas de la merde) un yaourt que même Monsieur Danone n'oserait pas servir en tête de gondole ?
La réponse de L'esprit du clan est toujours aussi claire, et se tient en 3 points :
1. On est pas là pour divertir
2. On est là pour tout niquer
3. Ouais, ouais.
A la suite de cette démonstration qui me laisse pantois d'admiration, on admettra qu'il vaut mieux chanter en français si on est pas là pour divertir les gens. Ou si on est là pour les niquer. Et ça tombe bien, puisqu'EDC sort en ces jours chahutés d'élections son "Corpus Delicti", 3ème chapitre du nom. Je remarque par ailleurs que la parité politique n'a pas été respectée dans l'album, puisqu'il y a une dédicace à Nicolas Sarkozy (même si bon, certains m'argueront que, je cite : "Sarkozy on t'encule !" n'est pas vraiment une dédicace, je pense que le CSA aurait pu faire respecter la loi et imposer un "Ségolène, il faut que je la prenne", ou un "José Bové, petit pédé" qui aurait rétabli l'équilibre nécessaire au bon fonctionnement de notre chère démocratie, comme dirait Alain Duhamel – qui lui n'est pas en featuring sur l'album d'EDC et on se demande un peu pourquoi, est-ce que c'est cette sale histoire de vote pour Bayrou qui lui colle à la moumoute ?)
Pour me résumer : EDC sort un nouvel album. Ça rue dans les brancards et ça chie dans les bottes. L'Esprit du clan n'a rien perdu de sa hargne, bien au contraire. Les ex-lascars ont gagné en brutal ce qu'ils ont perdu en "ouais, ouais", confirmant le virage entamé lors du dernier album, "Révérence". Autant dire que ceux qui attendent une célébration de la vie merveilleuse de notre seigneur Jesus Christ en seront pour leur frais. Il est de bon ton de dire chez les journalistes en mal d'inspiration avec un papier à rendre à la rédaction des Inrocks en 10 minutes qu'un 3ème album est celui de la maturité. Eh bin, le 3ème album d'EDC est celui de la maturité. (la différence quand moi je le dis c'est que c'est vachement intelligent et super finement observé. Ça et le fait que je touche pas 3 patates par mois pour écrire des conneries. Enfin j'arrive bien à toucher 3 patates par moi, mais seulement toutes les 2 semaines quand je fais mon marché.)
Les titres "Ailleurs" (un touchant hommage à l'exode urbain), "1992", "Le temps assassine" évoquent plus ou moins subtilement (c'est quand même EDC, l'émotion est quand même brut de fonderie, comme chez Mittal Arcelor) les années qui passent, le corps qui flanche quand on fait un pit, toutes ces choses qui nous font prendre conscience qu'il ne nous reste plus beaucoup de temps avant qu'on se mette à regarder Derrick et qu'on trouve ça trop violent, ou porter une couche de façon permanente.
Pour parler son, la production est un cran en dessous de celle mamouthesque de "Révérence" mais est de très bonne facture, un poil cradingue, et colle extrêmement bien à l'univers du groupe, sale, gris, avec des tags partout et des gens en survêtement qui font jamais de jogging républicain. Les guitares rugissent tout autant que la voix. Plus ça va, plus EDC passe du hardcore au death mélodique (voir l'intro "mesdames et messieurs") avec des incursions rock n'roll ("Ailleurs"), du death qui tâche (l'excellent "Un message de paix" titre qui tient plus de l'oxymore que de la profession de foi pour le groupe – et que ceux qui ne comprennent cette phrase ne s'inquiètent pas, moi non plus je la comprends pas, mais ça faisait joli d'avoir des mots compliqués dans la phrase.) et même un slow "J'ai pas les mots". Moi non plus j'ai pas les mots pour décrire ça. Vous voyez les chansons calmes et grotesques de Rammstein où Till s'essaie à chanter tout doucement en Allemand, ce qui sonne aussi romantique qu'un dîner aux chandelles à Treblinka, eh bin là c'est la même, sauf que là c'est français, alors on comprend. Que c'est nul. Non les gars, je veux bien faire un effort pour être charitable : on murit, on a envie de parler d'autres choses que des voitures qui brûlent, tout ça, mais réservez nous ça pour une b-side parce que là, ça fait rappeur tough qui pissote du Rn'B, c'est pas sérieux tout ça. Vous avez déjà vu Joey Starr faire une reprise de Pascal Obispo ? Non, eh bin alors pourquoi vous prenez pas exemple sur lui ? Hein pourquoi ?
Bref pour résumer, à part "J'ai pas les mots" ce CD est une grosse baffe dans la gueule. Et comme dirait l'autre, j'ai encore les joues qui piquent. Les amateurs de Francis Cabrel n'y trouveront sans doute pas leur compte, moi mis à part, parce que j'arrive à concilier les deux (j'ai d'ailleurs fait une reprise black de "Je l'aime à mourir" qui s'appelle "Je l'aime à pourrir") mais ceux qui avaient trouvé leur came dans l'album précédent y trouveront certainement de quoi nourrir leurs petites oreilles en mal de double bleu blanc rouge et de cris francophones.
| $am 13 Juillet 2007 - 2381 lectures |
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