C-187 - Collision

Le retour au bloc opératoire de PESTILENCE étant officialisé, on peut désormais ausculter le patient C-187 sans craindre l'erreur de diagnostic. Car si l'on retrouve avec plaisir le jeu syncopé et les leads décalées de Patrick Mameli, le patient hollandais présente évidemment d'autres symptômes qu'une bégnine fièvre death metal, du sang ayant coulé sous les brancards depuis la sortie du singulier "Spheres" en 1993. Assisté dans sa tâche par deux des meilleurs chirurgiens du circuit (Tony "ATHEIST" Choy et Sean "CYNIC" Reinert), le grand Pat persiste dans la greffe contre nature : à la cohabitation death jazz d'hier succèdent aujourd'hui des éléments rapcore, noyés dans les sucs gastriques d'un metal qu'on qualifiera de moderne, à défaut de trouver un cas clinique apparenté dans les archives de la morgue.

Le visuel évoque les brutes épaisses de "The Shield", les paroles propulsent de plein fouet des corps criblés de balles sur la bande d'arrêt d'urgence. Squats, guettos, maisons de passes. Le décor est planté, Mameli a tiré son inspiration de "Cops", une émission de real TV américaine, à laquelle il emprunte son "urban discipline", sa bande son gangsta rap et son nom de scène : C-187 ou murder in the first degree, comme les 14 compos de ce "Collision" qui s'appliquent à calmer l'auditeur d'un coup de crosse bien senti derrière les oreilles. La production bulldozer de Jacob Hansen (DESTINITY, HATESPHERE) fait de C-187 un monstre d'impact physique, faisant des parties de baston de Sean Reinert (le rouleau compresseur sur "Human" de DEATH, c'est lui) un des gros points forts de l'album. On se remet difficilement de ces salves de double pédale assénées avec autant de régularité que les bavures de Vic Mackey dans les rues de Farmington. Pour compléter la section rythmique, Mameli a fait appel à une vieille connaissance, Tony Choy, jadis coéquipier le temps d'un album avec PESTILENCE ("Testimony of the Ancients"). De son ancien groupe, le guitariste n'a d'ailleurs guère retenu que l'approche avant gardiste de "Spheres" ; à ce titre, les riffs d'ouverture de "Multiple Beings" ou "Soul Search" auraient pu se fondre dans le paysage de "Collision", habile mélange de styles musicaux ne frayant pas dans le même neighbourhood. Qu'on se rassure, malgré des influences hip hop (certaines parties de chant, quelques samples) et jazz (Mameli est un grand fan d'Allan Holdsworth), le world metal de C-187 reste à 85% coulé dans la fonte. "Roadblock (D.O.A.)" et son refrain d'enragés complets, "Rip Deal" et son riff brise nuque ou encore "P.C.P. (Murda In My Head)" et son drug-addict secoué de spasmes sont autant de parpaings balancés du haut d'un pont par des gamins ayant trop campé devant G.T.A.

L'injection répétées de ces petites bombes métalliques ne suffit pas à altérer le jugement du Dr.Carter, grand amateur de seringues lorsque la pression devient trop forte. De la pure ? peut être pas mais en tout cas, c'est de la bonne. Les 40 minutes de "Collision", sans confiner à l'extase, prolongent facilement le plaisir au delà d'une dizaine d'écoutes. Au rayon effets secondaires déplaisants, on notera tout de même une absence de plan B un peu dommageable, tous les titres cartonnant d'une manière quasi systématique. Seule la troublante "Stalker" et les arabesques du chanteur Tony JJ (aka Jelencovich, B-THONG, MNEMIC) s'écarte un tant soit peu de la formule de base, originale et efficace, il faut le reconnaître.
Au micro, Tony JJ s'en sort franchement pas mal, même si son registre gueulard (quelque part entre Peter Dolving/THE HAUNTED et Christophe Lamouret/MEATHOOK SEED) se révèle fatiguant à la longue. Quelques balles perdues ("Life Is Dead", "Strapped With Heat") viennent affaiblir le bodycount in fine, sans toutefois infléchir la portée médiatique de cette nouvelle tuerie : pas de quoi déclencher une guerre des gangs, mais suffisament mortel pour faire la une des journaux !

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