Un truc de dingue … Ecoutez plutôt ça: l'autre soir, alors que les enfants étaient couchés, les poubelles sorties et le dîner fin prêt, je m'apprêtais enfin à profiter de la fin de journée avec ma petite femme. En quelques passes habiles le houblon se retrouvait au fond du verre, les quenelles dans un écrin de riz blanc et la serviette à portée d'éventuels projectiles alimentaires. Le premier échange d'infos sur les mésaventures de la journée à peine entamé, qu'est-ce que je vois du coin de l'œil? Ma fourchette – et la cuillère! Et le couteau! – se met doucement mais sûrement en branle et entreprend de son propre chef de se diriger vers le centre de mon assiette! Et voilà que le décapsuleur amorce le même mouvement! Eberlué, d'une voix quelque peu étranglée je lance à ma femme:
« Regarde Miss: tes quenelles aimantent! »
** « 1ere sommation: Cyril, nous savons que tu es lourdement armé des pires jeux de mot de destruction massive. Libère cette chronique immédiatement et rend toi calmement, il ne te sera fait aucun mal! » **
Hum … Malgré ces introductives apparences, c'est bien de « Mind Over Matter », 2e album des poitevins de Mistaken Element dont il est question ici. Après un « Engraved in Memory » qui aura tourné quelques têtes il y a 3 ans de cela, ce membre de la très active Klonosphère livre aujourd'hui sa nouvelle offrande aux lyriques hordes.
** « 2e sommation: Dernière chance de libérer cette chronique sans dégât, Cyril! Maintenant arrête les frais ou bien on lâche le G.I.G.N.! » **
J'avoue qu'à réception du promo CD, j'avais quelques a priori du genre: « Bon … Encore un de ces groupes de French Modern (death/thrash) metal propre sur lui. On va encore avoir droit à plein de syncopes, de polyrythmies, de groove froid, de technique mise au service de coups de boutoir déstructurés et d'élégantes prises de tête … mais pas un poil de rock'n'roll là dedans je te parie ». C'est vrai qu'un des défauts de cette scène, c'est de manquer un peu trop souvent de cette animalité qui sent la sueur et le cambouis, et de s'adresser un peu trop à notre côté cyborg et pas assez à l'homo metallus qui grogne en nous…
Mais heureusement, bien que se conformant à la plupart des standards du genre, il s'avère que Mistaken Element a pris bien garde à écrire des morceaux et des mélodies dignes de ce nom avant d'aller singer
Meshuggah à coups de casse-tête harmonico-rythmiques pour 1er de la classe au Conservatoire. Ainsi au sortir de « Mind Over Matter », on ne reste pas sur une sensation d'esbroufe musicale, mais bien avec des airs qui trottent dans la tête et l'impression d'avoir écouté un vrai album de rock. Comment Mistaken Element s'y prend-il pour humaniser et rendre organique un genre habituellement si chirurgical? Eh bien – on l'a dit un poil plus haut – il dote ses compos de mélodies qui font mouche (
« Save Me »), d'une basse bien ronde qui vient régulièrement aux alentours du premier plan nous passer le bonjour (
à 1:01 sur « Lost », vers 4:00 sur « Soul for Sale », à 2:08 sur « Mass Machine » …), d'une approche thrash parfois bien hargneuse (
cf. le démarrage de « Mind Over Matter », ou à 1:42 sur « The Chosen One ») et d'un chant qui, à des moments bien choisis, sait introduire dans son registre écorché thrash/hardcore ce je ne sais quoi qui le rend expressif et vecteur d'émotions. Le reste est question de talent de composition, justesse des enchaînements …
Alors certes, il reste toujours une bonne dose de ces passages un peu retors, de ces bûcheronnages syncopés hypnotiques, de ces pieds de nez rythmiques qui passionnent certains et agacent les autres selon les goûts et l'humeur du moment. Néanmoins rien qu'en jugeant le groupe sur ce terrain très balisé (
et à la mode), vu le travail de composition, la technique à l'œuvre ou encore la qualité de la prod, on reconnaîtra que le groupe évolue sur le haut du panier du genre. Mais au-delà de ce premier niveau de dissection critique, il y a ces morceaux prenants comme « Mass Machine » et le fabuleusement tubesque « Save Me ». Il y a aussi cette prise de risque réussie qu'est « No Sound Disturbs the Silence », morceau plein de délicatesse, d'émotion et en même temps de force, qui tranche avec le reste de l'album tout en s'intégrant parfaitement dans l'ensemble.
Si vous êtes plutôt réfractaire au style pratiqué, le talent déployé par le groupe réussira peut-être à arracher à votre jugement une note évoluant dans les 7-7,5. Si vous êtes fan du genre, il y a de forte chance que « Mind Over Matter » devienne votre album de chevet du moment et que vous accordiez pas moins d'un 9 à l'album. Je suis pour ma part un peu fatigué par le côté clinique et trop cérébral de cette scène – dans laquelle
Trepalium et
Gojira (
pour ce qui est des groupes que je connais bien), avec leurs pleines brouettes de groove, font figures d'exceptions. Néanmoins les qualités objectives de l'album et mon coup de cœur perso pour les morceaux « Save Me » et « No Sound Disturbs the Silence » m'empêchent de mettre une note inférieure à celle que votre sagacité et votre œil d'aigle vous ont fait entrapercevoir en haut à droite de cette chronique.
Ah, un point à ne pas oublier également: il n'aura pas fallu attendre plus loin que leur 2e album pour que le groupe entende au fond de ses tripes l'appel des racines, et pour qu'il envisage de quitter le Poitou-Charentes pour s'en retourner en Pays de Loire. Qu'il est déchirant ce retour sur la terre des origines, ce cri du cœur d'un groupe qui s'en revient en « Mayenne, ô vers ma Terre » …
** Ratatatatatatatata !!! Boum !! Ratatatata !! Bang bang ! (pas de troisième sommation) **
5 COMMENTAIRE(S)
29/06/2010 23:48
J'ai peur que cela ne soit pas tout à fait d'actualité ...
29/06/2010 23:26
22/03/2009 09:40
Last Chapter Ends est monumentale !
14/03/2009 13:18
L'album précédent m'avait bien plu, je vais donc rapidement me procurer le nouveau
13/03/2009 16:41