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Gris - À l'âme enflammée, l'âme constellée...

Chronique

Gris À l'âme enflammée, l'âme constellée...
Tout le monde le sait, dans le black et dans le rock français, « noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir ». Eh bien désormais vous pourrez ajouter à cette maxime « GRIS c’est GRIS, il n’y a plus l’esprit ». Et si moi je n’en manque pas pour le coup, c’est parce que j’ai invoqué les anciens (esprits, suivez un peu flûte !) lorsque je me suis rendu compte que le deuxième album du groupe n’avait plus la même saveur que sur Il était une forêt. Si, si c’est bien leur deuxième album puisque Neurasthénie date de l’époque où le duo se nommait NIFLHEIM et ce n’est que par la suite qu’il a été repressé sous le nom de GRIS, nouveau nom choisi à l’époque par les Québécois. GRIS... C’est un nom qui interpelle tout de même ! Pas assez black pour s’appeler NOIR vu les ajouts extérieurs apportés ? PESTE NOIRE, NUIT NOIRE ou SOLEIL NOIR n’ont pourtant pas hésité. Ou alors se considéraient-ils comme des animaux nocturnes. Là encore, il est bien connu que « la nuit, tous les chats sont GRIS ». Eh bien, ceux qui connaissent le premier album diront qu’il y a bien un peu des deux puisque nos Québecois préférés après FORTERESSE, FROZEN SHADOWS et MALVEILLANCE (non, je déconne pour le dernier !) y montraient le visage torturé d’un homme battu et dénudé tentant de se relever après avoir été jeté dans la crasse d’une ruelle sombre. Le désespoir était si tangible et la rage si réelle que les frissons étaient difficile à réprimer, surtout sur l’éprouvant « Cicatrices » et le maudit « Gala des Gens Heureux ». Les autres titres étaient un cran moins forts, mais toujours réussis, en grande partie parce qu’ils ne se contentaient pas de verser dans le dépressif pleurnichard mais conservaient une part de rebellion, mêlée à un sentiment désabusée des plus attirants. Tout cela permettait au groupe de se démarquer des BONJOUR TRISTESSE, HAPPY DAYS, I’M IN A COFFIN ou encore LOST INSIDE, corrects mais tellement prévisibles...

Mais tout cela c’était sur le premier album, sorti en 2007 et GRIS a bien pris son temps pour nous offrir cette suite, A l’Âme Enflammée, l’âme constellée. Six ans d’attente ! Presque le même nombre d’années que Brad Pitt a passé au Tibet ! Remarquez, ce ne serait pas étonnant qu’ils aient fait un périple similaire car leur musique a attrapé des accents zen que ne renierait pas le chauve à lunettes. Bon c’est vrai qu’il y a eu une petite parenthèse avec le projet MISERERE LUMINIS, mais tout de même, notre patience approchait de ses limites. Du coup le groupe a semble-t-il vouloir s’en excuser et nous offre deux CD d’un coup d’un seul. Mouais... si cet album se divise bien en deux parties, l’une de 40 minutes avec 5 titres et l’autre de 40 minutes avec... 5 titres, cela ne fait qu’un total de 80 minutes. C’est tout de même benêt car pour 3 ou 4 minutes on pouvait tout faire tenir sur une seule galette. Cela aurait même été préférable vu le nombre de passages inutiles.

Car ne le cachons pas plus longtemps, ce nouvel album est truffé de déceptions. GRIS a pourtant bien travaillé et rend une copie bien écrite, propre et maîtrisée mais également bien trop lisse. Souci principal, il tente de jouer la carte des passages instrumentaux qui installent des ambiances mélancoliques et planantes. On en trouve alors à tous les coins, en introduction, en break, en conclusion... C’est une overdose de bons sentiments qui en plus ne prennent pas ! Les guitares sèches, violons et violoncelles sont ajoutés avec un cruel manque d’originalité et surtout d’originalité (« Samsara »). Il y a trop de passages calmes et longuets influencés par les douceurs de DRUDKH (« Une Epiphanie de Pluie »), de CAÏNA ou de PETRYCHOR. Du coup nous sommes bercés avec trop d’attention et l’on attend un réveil, une révolte, un esprit tourmenté qui ne vient pas. Au contraire, il y a carrément des passages sur lesquels on se demande, en somnolant, si l’on n’a pas mis un album d’ENIGMA. Sur « L’Aube » et « Nadir » on s’attend presque à voir débouler un chant féminin murmurant « Sade, dis-moi, Sade, donne-moi… poupoupoupou… ». Ailleurs, GRIS prend des accents plus post-black et là encore manque cruellement d’originalité, s’enfonçant dans le poli ennuyeux (« Seizième Prière »). Dur, dur... La palme du bide revient à « Igneus » qui ne propose rien de neuf, rien de valable durant 11 minutes. J’aurais presque envie de remettre ANGRENOST après ce morceau-là !

Si les émotions ont du mal à prendre et que l’on s’ennuie même carrément sur les trois quarts de l’opus, c’est parce que le duo a gagné (je suis tenté de dire "perdu") en maturité. Il construit les morceaux intelligemment, mais en faisant trop parler sa tête. Il lui manque alors le cœur, les explosions incontrôlées et l’impudence qu’on lui reconnaissait. Les seules petites exceptions viennent de « Les Forges » et « Dil ». Sans que cela soit continu, ils ont des parties plus intéressantes. Des instruments qui s’affolent un peu ou des vocaux qui se font enfin plus présents, moins systématiques. Car malheureusement, ces derniers ont beaucoup perdu en expressions et l’on a l’impression que notre homme décrit plus haut a cessé de se battre pour sa survie et qu’il est au contraire résigné à son pauvre sort.

Pour résumer, GRIS est devenu professionnel et a ainsi perdu ses atouts. J’attendais plus plus de piques colériques ou rebelles comme sur le précédent album, et là je me retrouve avec un vieux sage qui ne va pas au vif du sujet mais met une éternité à me dévoiler son message... Je me sens un petit peu marron sur ce coup-là...

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Gris
Black metal spirituel
2013 - Sepulchral Productions
notes
Chroniqueur : 5/10
Lecteurs : (9)  7.06/10
Webzines : (1)  8/10

plus d'infos sur
Gris
Gris
Black metal spirituel - 2006 - Canada
  

tracklist
01.   L'aube
02.   Les forges
03.   Samsara
04.   Igneus
05.   Dil
06.   Moksha
07.   Seizième prière
08.   Sem
09.   Une épitaphe de suie
10.   Nadir

Durée : 80:34

line up
  • Neptune / Guitare, Basse, Violon
  • Icare / Chant, Batterie, Contrebasse

parution
9 Juillet 2013

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