Il y a quatre ans, notre estimé collègue FleshOvSatan avait permis à beaucoup (moi compris) de faire une découverte qui allait durablement marquer nos esprits. Un premier album d'une maîtrise incroyable, qui prenait le meilleur de la musique Ambient, du Black Metal spatial, mélangeant le tout pour tisser des paysages futuristes, à base de flottilles de vaisseaux spatiaux, d'astéroïdes et de planètes lointaines.
"U.M.A.", première manifestation des italiens de Progenie Terrestre Pura (aussi abrégé qTp), était une prouesse à elle toute seule : ambitieuse, car prenant le temps de distiller ses ambiances dans des compositions étirées, mais jamais dans la longueur pénible. Une perle de Black Metal
"narratif", comme j'aime à la qualifier - et qui permettait d'atténuer la frustration de n'avoir aucune nouvelle de Darkspace, soit-dit en passant.
L'année suivante, comme pour asseoir leur caractère unique, Progenie Terrestre Pura sortait un EP digital purement ambiant,
"Asteroidi", comprenant une pochette animée illustrant les deux compositions. La démarche, si belle soit-elle, n'avait pourtant pas calmé nos estomacs grondants, espérant plus à se mettre sous la dent que des superpositions de claviers et d'arrangements de
Space Opera. Et nous voilà, trois ans d'attente plus tard, avec cet
"oltreLuna", espérant avec émotion retrouver le qTp cuvée 2013, celui qui nous avait ému, fait rêver et voyager. Toujours sous la houle d'Avantgarde Music, compatriotes obligent. Cet alignement des astres ne pouvait que présager du meilleur, malgré une
tracklist en forme de pseudos MSN d'adolescents.
Je ne vais pas y aller par quatre chemins : les astrologues se sont plantés.
"oltreLuna" est mauvais. Croyez bien que ça me désole. Attaché au premier opus, les Italiens ont réussi à en prendre le contrepied en accouchant d'un opus incroyablement générique et mal composé. Ce que je refuse d'admettre venant des mains qui ont façonné le fantastique
"U.M.A.". D'ordinaire très conciliant (mes notes généreuses en témoignent), même en insistant, en me faisant sophiste forcené, je ne parviens pas à trouver
un seul rappel valable à la splendeur de
"U.M.A.". Cette dernière fournée tient plus d'un
reboot foireux motivé par l'argent et le
fan-service que du
Space Opera grandiose que pouvait laisser entrevoir l'artwork (la patte d'Alexander Preuss
* reste toujours aussi forte).
Les constructions mélodiques un tant soit peu ambitieuses sont bâties sur des fondations pourries. Elles s'effondrent en morceaux après quelques minutes, à cause de choix douteux, de plans malhabiles, et surtout, d'un changement radical d'atmosphère. Moins subtil,
"oltreLuna" est frontal, violent, quand j'espérais le retour de la vitesse de croisière entre les anneaux de Saturne, et leurs accélérations maîtrisées. Pourtant, on peut sentir l'atavisme derrière les parties électroniques qui parsèment l'opus, même si ces dernières sont pataudes, lourdingues - ou, lorsqu'elles tiennent à peu près la route, sont aussitôt désamorcées par des ponts ridicules (je ris encore de la laborieuse transition Dubstep discount à 7:20 de "[.Proxima-B.]"). Mieux, "[.Pianeta.Zero.]", premier titre de l'album, aurait presque pu faire illusion : malgré un manque cruel d'épaisseur, Progenie Terrestre Pura y alterne les ambiances à situer entre
trip-hop et musique
lounge (dès 2:34, boîte à rythmes jazzy, cordes frottées, appelant un darbouka qui, s'il n'a à priori pas grand chose à faire dans une fresque galactique, passe relativement bien), avec des repompes fatiguées, appauvries d'un Darkspace au plus bas de sa forme. Rien de transcendant, mais cette entrée en matière permet à qTp de garder la face, un semblant de dignité... Qui se fane assez rapidement.
"oltreLuna" manque cruellement de saveur, de matière. L'ouverture de "[.subLuce.]", par exemple, simple mais efficace, est synthétique au possible - très peu de basses, cette simple guitare bourdonnante, cette boîte à rythme en plastique chinois, ces claviers complètement écrasés dans le mix, peinent à donner de la consistance au paysage cosmique qui n'est plus finement dépeint, mais grossièrement barbouillé. Deuxième titre à peine, et l'ennui (remplaçant presque poliment la consternation) s'installe déjà : Dix minutes à peine et qTp, à court d'idées pour tenir les murs, commence le remplissage. Mid-tempo déshabillé dès 2:46, cassant malheureusement un crescendo qui faisait espérer un feu d'artifice, le second titre tente de redresser la barre en sortant l'atout maître de Progenie Terrestre Pura : l'atmosphère. Sauf qu'il est loin, le temps de "Sovrarobotizzazione". Si le chant féminin est bien amené, ces nappes de claviers faméliques, suivies par ce tom mal samplé, rament plus qu'elles ne naviguent. Et la suite n'est guère plus intéressante. Le morceau-titre est inutilement véloce et violent, malgré un pont atmosphérique (presque oriental, et, ma foi, pas désagréable) en milieu de morceau qui sauve les meubles. Jusqu'à ce que ces derniers soient définitivement détruits par cette Dubstep du pauvre qui, méthodiquement, piétine le semblant d'ambiance fragile installé. Même syndrome que l'on retrouve jusqu'au dernier titre, "[.Proxima-B.]", pénible quart d'heure oscillant entre des guitares qui ne veulent strictement rien dire (seconde moitié du titre) et des claviers toujours aussi décharnés. Progenie Terrestre Pura, taquins qu'ils sont, décident même de retarder la fin de ce laborieux voyage
low-cost, finissant de saccager leur héritage en tartinant trois minutes de musique d'ambiance, à situer entre l'ascenseur et le simulateur allemand de plongée.
Si
"U.M.A." était un croisement réussi entre
Interstella 5555 et
Star Wars,
"oltreLuna" est une chimère ratée à situer entre le pétard mouillé
No Man's Sky et le nanard
Battlefield Earth. qTp voulait probablement chercher à exploiter autre chose, devenir plus percutant... Mais ils en ont oublié leurs racines - et, par la même, comment composer un disque tenant la route.
"oltreLuna" est à la fois un mauvais qTp, mais également un mauvais disque de Black Metal. Lambda, générique, synthétique, sans réelle saveur... Les mêmes défauts qu'évitait soigneusement
"U.M.A.". A oublier (très) rapidement.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo