Tan Kozh pour la sortie de Lignages Oubliés
Interview
Tan Kozh pour la sortie de Lignages Oubliés Entretien avec Sven et Yamnah (2019)
Tan Kozh porte manifestement une grande attention à sa thématique, au niveau de l’esthétique, des textes ... Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
S : La thématique globale avait un côté implicite pour moi dès les prémisses du projet. Il s'agissait
d'exprimer une spiritualité intérieure qui renvoie au paganisme et, par la recherche d’un héritage perdu, plus spécifiquement aux croyances celtes. Pour l’esthétique je dirais que la cohésion des styles de Christophe Szpajdel, Vincent Fouquet, Charles Boisart et Sylvain Clapot s’est faite avec facilité. La première pierre était l’œuvre de Vincent puis le logo de Christophe, ce sont deux personnes avec une sensibilité particulière et qui ont su capter l’ambiance des morceaux et l’inspiration des textes de Yamnah. Les photos de Sylvain étaient presque une évidence pour moi car je les admire depuis longtemps ; je l’ai découvert avec son travail live et en particulier quand je jouais dans la région natale d'Himinbjorg. Son travail sur les paysages à été une telle découverte que j’avais prévu depuis le début de lui faire une place sur cet album. Le calligraphe Charles Boisart est un artiste de notre région découvert par hasard, qui s’est très bien greffé au projet alors que la production de l’artwork était déjà entamée, et qui mérite amplement toute l’attention qu’on pourra lui apporter.
Y : Pour les textes, ça n'a pas été aussi attentionné que ça ! Ça a répondu à une commande assez précise de Sven, tout en rencontrant mes aspirations du moment. On peut dire qu'il y avait là un alignement des astres. J'ai fourni de la matière première en quantité, et Sven a simplement pioché dedans « au feeling ». Il a sa façon à lui de « sentir » mes textes et de les poser en cohérence avec la musique. La cohérence du concept tient donc seulement aux influences qui restent prégnantes d'un bout à l'autre de ma production écrite, le reste est une reconstruction a posteriori que le hasard, ou l'harmonie spontanée de nos visions, a bien aidé.
Vous venez de Bretagne, et pas mal d’entre vous ont joué pour des groupes de la région (Belenos, Les Chants de Nihil) ... Votre formation s’est-elle construite au gré de vos rencontres au sein de ces différents groupes ?
S : Je ne peux pas te donner un « oui » franc car Yamnah, Barved et moi nous connaissons et jouons ensemble depuis très jeunes, pour ainsi dire depuis nos débuts avec le metal et les instruments, les
premières formations comme AntiCorpse se sont donc naturellement articulées dans ce sens et nous ont amené à vivre des moments forts qui ont soudé notre amitié depuis déjà deux décennies. Bien entendu, notre activité nous a aussi amené à faire des rencontres, des liens se sont donc tissés entre les différents groupes du secteur et personnellement c'est comme ça que j'ai été amené à rencontrer Introspect et Decay.
En écoutant votre album, j’ai vraiment ressenti l’influence de Belenos dans la composition. Avez-vous une affection ou une proximité particulière avec ce groupe, en plus d’avoir eu certains membres dans vos rangs qui ont joué avec Loïc ?
S : J'ai découvert Belenos avec Chants de Bataille et Chemins de Souffrance, j'ai dévoré la moindre miette de ces deux albums, donc c'est indéniablement une influence dans les compositions et je dirais même qu'il a contribué, tout comme Himinbjorg par la suite, à forger ma vision du black metal et du type d'émotions qu'il peut nous permettre de transmettre. Je ne peux qu'ajouter qu'en toute logique lorsque Loïc m'a proposé de rejoindre l'équipe j'étais comme un gosse de 10 ans le soir de noël !
Y : Belenos est un des premiers groupes de black metal que j'ai découvert, juste après les classiques Burzum, Emperor, Ulver etc. Ma rencontre avec Loïc est sans aucun doute l’événement qui m'a ouvert la voie vers le paganisme, même si je n'ai pas la prétention de me comparer à lui, sur le plan musical comme sur le plan spirituel.
Tan Kozh est formé depuis 2015 selon Metal Archives. Lignages oubliés sort presque cinq ans après le lancement du groupe. Est-ce le temps qu’il vous a fallu pour le composer ?
S : Pas vraiment, le gros de la composition s’est fait sur une période d’environ un an durant laquelle j’ai brossé l’ébauche des morceaux. Après quoi, le temps de trouver un label, j’ai laissé le temps à Introspect et Decay de réarranger leurs parties à leurs sauces, ce qui a pris du temps notamment pour la batterie, car Decay s'est imposé un niveau d'exigence élevé pour ses prises. Nous avons eu un premier contact fin 2018 avec Antiq suite à quoi nous avons, Yamnah et moi, réenregistré entièrement les parties guitares. Puis j’ai terminé par reposer entièrement les voix « proprement ». C'est donc surtout le temps qu'il nous a fallu pour réaliser un enregistrement 100% maison.
Comment s’est faite la rencontre avec Antiq ?
S : De façon assez classique en fait, j’ai envoyé quelques titres à une poignée de labels français dont Antiq, qui avaient déjà fort à faire avec Véhémence et Grylle... mais ont quand même décidé de sortir l’album. Après avoir eu l’occasion de croiser l’équipe sur leurs stand en concert, nous nous sommes rapprochés humainement et j’ai aujourd’hui, en plus de l’admiration que j’avais déjà pour le label, un
profond respect pour leur travail et pour ce qu’il apportent aujourd’hui à la scène black française.
Vous avez fait le courageux choix de chanter en français. Qu’est-ce que qui vous a motivé pour cette décision ?
S : La question s’est posée au moment des premiers textes de Yamnah, j’ai très vite fait le choix du chant en français pour garder l’authenticité de sa plume, tout simplement.
Pourriez-vous nous citer vos influences musicales majeures, tout courants confondus ?
S : Mes influences primaires vont de Emperor, Nehëmah, Drudkh pour le BM à des groupes comme Death, Arcturus ou Opeth pour ne citer qu’eux. Mais j’imagine qu’on peut trouver plusieurs influences hors du metal car mes goûts musicaux sont assez variés. Les différents avis qu’on a eu jusque là nous citent souvent Bathory alors que c’est un groupe que je n’ai pris le temps d’écouter que très tardivement, par contre je suis obligé de mentionner Himinbjorg et Belenos dans mes influences principales, qui eux ont été évidemment influencés plus ou moins directement par Bathory.
Avez-vous des influences extra-musicales, littéraires ou autre, qui vous ont accompagnées durant le processus de composition et d’écriture ?
S : Là, je dois citer mon père qui était artiste peintre. Il m'a influencé par ses peintures qui ont bercé mon enfance, mais aussi ses albums préférés qui ont fait mes premières découvertes musicales. Il m’a par la suite initié à sa vision du paganisme et m'a transmis son intérêt pour les peuples celtes et pré-celtes et leurs façon de vivre la spiritualité.
Y : Beaucoup de lecture, saupoudrée de méditation : La Mythologie Celtique de Sterckx, L Védisme de Gonda, Heur et Malheur du Guerrier et Loki de Dumézil, Le Veda et Sept Upanishads de Varenne. Et des réminiscences plus anciennes, aussi.
Vous êtes de Bretagne, vous jouez du black metal païen, mais vous ne parlez qu’assez peu, ou en tout cas pas de manière explicite, du folklore mythologique celtique. Il me semble que cette dernière est particulièrement influencée et comparée avec les corpus légendaires indiens. Avez-vous voulu aborder la question mythologique de manière plus large en vous attaquant à la “mythologie des mythologie” qu’est la culture indo-européenne ancienne ?
Y: Ton premier constat est assez vrai, sauf pour « Sacrifice ». Le fonds mythologique purement breton est malheureusement tellement corrompu par le Christianisme qu'il est en effet inexploitable à l'état brut, en tout cas dans le cadre de notre démarche. Il n'y a rien qu'on puisse désigner comme des « dieux bretons », et pour les divinités gauloises c'est à peine si l'on connaît leurs noms. Les apports écrits des moines chrétiens d'Irlande et du pays de Galles, ainsi que le vieux fonds mythologique transformé en légendes et autres histoires de saints, ont le mérite d'avoir sauvé des pans entiers de culture qu'on peut en effet comparer aujourd'hui aux autres mythologies indo-européennes : germanique, gréco-romaine et, bien sûr, védique. Plusieurs comparatistes s'accordent pour dire que c'est de l'Inde brahmanique que la civilisation celte antique se rapproche le plus (Christian Guyonvarc'h et Françoise Le Roux notamment). C'est en croisant les sources qu'on peut retrouver un peu du sens caché originel de ces vieilles légendes, quand nous avons par acculturation perdu tous les codes qui nous auraient permis de les déchiffrer par nous-même. Bref, on fait ce qu'on peut avec ce qu'on a, mais cette réappropriation ne peut que passer par l'étude de livres, un mode d'accès très éloigné de la culture orale des druides, comme des premiers indo-européens dont l'essentiel du savoir s'est irrémédiablement perdu. D'une certaine manière, on est dans une quête que tout indique être vaine et sans issue, mais c'est ce qui fait aussi son charme.
Quels sont vos projets pour la suite ?
S : Je voudrais forger la cohésion scénique du groupe et je pense que ce premier album mérite au moins que l'on monte sur scène pour le défendre, ce qu'on a déjà pu faire un peu hors de Bretagne grâce à Battle's Beer. Les prémisses de futures compositions sont déjà lancées.
Merci à vous !
Y & S: Merci à toi.
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