Origin + Psycroptic + Leng Tch'e + Ite Missa Est + Dictated
Live report
Origin + Psycroptic + Leng Tch'e + Ite Missa Est + Dictated Le 26 Février 2012 à Nantes, France (Ferrailleur)
Si l'on m'avait donné l'occasion de voir un plateau composé de Origin et Psycroptic il y a de ça six ans, j'aurais sans doute sauté au plafond en éructant une joie malsaine. Seulement voilà, nous sommes en 2012, et j'ai encore du mal à croire qu'une pareille affiche n'ait rien provoqué d'autre en moi qu'un enthousiasme modéré, à peine rehaussé par l'espoir de set-lists qui feraient la part belle à de vieux titres, sait-on jamais. Origin et Psycroptic ont en commun un parcours qui a vu le départ d'un vocaliste emblématique, un dernier album décevant (même si Entity n'est qu'une déception relative en comparaison du naufrage permanent que subit Psycroptic depuis Ob(servant)), et surtout une signature chez Nuclear Blast – accompagnée du désormais célèbre syndrome NB – qui aura au moins eu le mérite de permettre aux deux groupes de tourner plus souvent en Europe. N'ayant pas vu les Tasmaniens depuis 2006 et les Américains depuis 2008, je me rendais avec un enthousiasme mêlé d'appréhension au Ferrailleur, arrivant juste à temps pour ne rien manquer des groupes d'ouverture. Pauvre de moi.
Quelle agréable surprise que de constater que si j'aurais aimé me faire crever les tympans avant d'avoir à supporter Dictated, il y avait au moins quelque chose à regarder pendant cette pénible demie heure en la présence d'un duo de demoiselles guitaristes qui, selon les standards du metal extrême, étaient fort agréables à l'œil. Pour le reste, leur musique est à l'image de leur chanteur en marcel avec ses cheveux mi-longs et sa mèche impeccablement rabattue sur le côté gauche : passablement ridicule. Pratiquant un death metal oscillant entre l'ultra-banal et l'utra-merdique, breaks lourdingues et absence d'une quelconque touche de personnalité à l'appui, le groupe peine à me maintenir éveillé. Et le pire c'est que si l'ensemble est joué correctement, les musiciens montrent très vite leurs limites à des tempos pourtant loin d'être ébouriffants qui devaient peiner à atteindre les 220 bpm. Le public alors extrêmement clairsemé (tout au plus une trentaine de personnes) est d'ailleurs resté complètement insensible aux charmes du groupe, se contentant de timides et courts applaudissements. Et quand le vocaliste a harangué la foule en demandant « do you like fucking death metal ? », il n'y a eu que Jason Keyser (son homologue d'Origin), alors attablé au merch avec une bière, pour répondre. C'est ce qu'on appelle un bide.
Puis vinrent les malchanceux de Ite Missa Est, les Français ayant eu un accident de tourbus heureusement sans conséquence physique qui a largement écourté leur tournée, même s'ils ont pu revenir pour les dates à Paris et donc Nantes. Inutile de le cacher plus longtemps, ils pratiquent un style qui m'irrite au plus haut point, sorte de hardcore pseudo-mélodique qui alterne les mosh-parts, breaks et autres beatdown avec quelques passages plus musicaux où le guitariste soliste joue systématiquement une ligne de tapping ou un enchaînement sweep-legato-tapping tellement éculés qu'on croirait qu'il venait tout juste de les plagier sur un des groupes de Sumerian Records. Et le pire c'est qu'il est arrivé à ne pas être propre sur certains de ces plans, là où les autres membres du groupe se contentaient de jouer correctement le peu de choses dont ils avaient à se souvenir. Bide intégral encore une fois, le vocaliste au look de coreux clichesque allant jusqu'à quémander pathétiquement quelques applaudissements dans un français approximatif, en arguant du fait qu'ils ne sont « pas passés loin du pire ». On a rarement vu pire communication avec un public logiquement complètement indifférent. Mention spéciale néanmoins à leur ingénieur du son qui a fait un boulot formidable : contrairement au groupe précédent le son était d'une limpidité incroyable qui permettait de distinguer absolument tous les instruments. Chapeau bas.
Croyez-le ou non, les Belges de Leng Tch'e ont mis un temps fou à faire leurs balances. Oui, faire des balances pour du grind, c'est un peu comme mettre du glaçage sur une tarte à la crème à destination de BHL : on peut douter de l'intérêt de la chose. Et pourtant le groupe a bien fait de peaufiner ce son cradingue avant de délivrer un excellent set, débordant de l'énergie des prémices du death/grind dans la veine des premiers Carcass, Napalm Death ou Terrorizer, car il n'y a objectivement rien à reprocher à leur prestation. Certes ils ne pratiquent pas un style que j'apprécie mais leur show valait indubitablement le coup, leur vocaliste Serge Kasongo, éminemment sympathique et qui communiquait facilement avec le public faisant le spectacle à lui tout seul. Sortant quelques phrases décalées qui raviront la foule (« Pas mal pour un nègre, hein ? ») et ne perdant même pas sa jovialité lors d'une panne de micro, il a conquis l'assistance qui lui a réservé un chaleureux accueil. En passant le micro à quelques malchanceux, il a également démontré que hurler dans un micro, malgré ce que l'on peut croire, demeure un métier difficile. Même moi, qui suis pourtant hermétique au style du groupe ai passé un très bon moment ; j'imagine donc que les fans du groupe devaient être aux anges.
Il semblerait que Psycroptic ait été programmé à l'affiche. Mince, je n'ai pourtant entendu que « Lacertine Forest », et trois quarts d'heure d'un hardcore légèrement blasté, avec peut être un ou deux plans inventifs qui se battaient en duel dans un océan de platitude et de vacuité tout juste bon à plaire aux fans de The Faceless. Qu'il me fût difficile d'endurer le set de cet ex-grand espoir du death metal qui, en l'espace d'un Ob(servant) ultra décevant et d'un The Inherited Repression tellement navrant que le chroniquer en ces lieux serait lui faire trop d'honneur, trône désormais sur le piédestal des plus grands gâchis du genre aux côtés de Decapitated. Le spectacle est d'autant plus pénible que les trois musiciens sont techniquement toujours aussi irréprochables, Dave Haley demeurant le même monstre de précision qu'au milieu des années 2000, quand le seul nom de Psycrotpic suffisait à provoquer un orgasme à tout bon amateur de death tech. Alors oui, durant les quelques minutes du sublime « Lacertine Forest », j'ai pu retrouver la jouissance de leur concert à La Locomotive en 2006, même si Zdeněk "GTboy" Šimeček, hurleur d'intérim pour la tournée, ne vaut pas Jason Peppiatt, qui lui même n'arrive pas à la cheville de Chalky. Au moins sa dégaine de coreux ne fait pas tache auprès du nouveau public du groupe, si jamais il existe. Bref, malgré un son impeccable, une prestation irréprochable et un vocaliste correct, rien n'a pu me sauver de l'ennui, ni n'a particulièrement charmé un public majoritairement venu pour voir la tête d'affiche de la soirée.
Je garderai toujours un excellent souvenir de la date de Origin en 2008 au Nouveau Casino, où malgré un James Lee rond comme une barrique le groupe avait retourné la salle en délivrant une prestation parfaite illuminée par une set-list sans défaut. Évidemment, après un Entity qui m'a un peu laissé froid et l'arrivée d'un Jason Keyser à la réputation bien moins flatteuse que celle de son illustre prédécesseur, je ne m'attendais pas à revivre le même moment de grâce qu'il y a bientôt quatre ans. Origin allait néanmoins délivrer la prestation la plus « what the fuck ? » (je ne vois pas de terme plus approprié) qu'il m'ait été donnée de voir en concert – et pourtant j'ai vu des black metalleux danser sur « Papayou Lélé » quelques jours après la mort de Carlos. Soit, la set-list était forcément moins bonne qu'à la sortie du génial Antithesis, et des titres comme « Reciprocal » ou « The Burner » manquaient cruellement au programme, alors que « Swarm » ou « Evolution Of Extinction » n'ont pas l'impact des vieux brûlots du groupe. Soit, Jason Keyser déçoit, comme tous ses homonymes, car il n'a ni le talent ni la présence de James « get the fuck out of my stage » Lee, et entre deux lignes de chant pas forcément tout à fait en place (surtout sur « Staring From The Abyss »), il invite les gens à monter sur scène, ce qui a le don d'irriter ceux qui comme moi regardent autant un concert qu'ils l'écoutent. Mais dès la fin de « Staring From The Abyss », peu après minuit, ce fût un grand moment de n'importe quoi pour célébrer l'anniversaire de John Longstreth, avec un monsieur en string sur scène, les membres des autres groupes qui lui ont offert un gâteau, et le public qui s'est mis à lui chanter happy birthday, le tout avec les tubes de Ricky James et Berlin en fond sonore. À partir de cet instant le concert ne fût plus jamais le même, et si Jason Keyser communiquait déjà trop avec le public auparavant il s'est mis à bavarder gaiment avec tout le monde, parfois en se lamentant du niveau d'anglais déplorable de l'audience : en offrant une bouteille d'eau dans la fosse il a lance un « Tenez les gars, c'est pour moi, ça me fait plaisir », puis a renchéri, devant l'absence de réaction de la foule d'un « J'adore le fait que vous ne compreniez pas un traitre mot de ce que je dis ! ». Après avoir comparé l'assistance à une bande de nonnes le dimanche à l'église, il s'est mis à demander au public de faire un « mad chicken circle pit », soit des binômes d'une personne hissée sur les épaules de l'autre qui s'affrontent à deux à l'heure dans la fosse ; puis il a dû s'y reprendre à deux fois avant que ces écervelés absolument pas bilingues ne comprennent le principe du zombie wall of death : le wall of death le plus lent du monde – son dépit quand il a vu que les deux bords se fonçaient dessus sans avoir rien compris à ses directives était palpable. Bref, le spectacle était franchement cocasse, mais il n'a pas réussi à faire passer au second plan la prestation une nouvelle fois dantesque de ces musiciens d'exception, bien servis encore une fois par un son plutôt clair et précis, hormis la basse de Mike Flores qui comme d'habitude était trop en retrait. En fait le seul couac notable a été la ligne de sweep ratée de Paul Ryan sur « The Aftermath » quand il a vu celle qui semblait être sa petite amie se mettre au crowdsurfing. Bref un excellent concert, mais avec un petit coup de gueule pour Jason Keyser qui, parlant beaucoup trop, a écourté le set de quelques précieuses minutes de musique. Il n'y a qu'à comparer les 10 titres de la soirée aux 14 de la tournée 2008 (même si l'excellent « Saligia » en vaut bien deux) pour se rendre compte qu'on aurait pu en avoir un peu plus. Tant pis, c'est tout de même rare de voir un show aussi rocambolesque, et le final avec « Gonna Fly Now » (le thème de Rocky) ne faisait vraiment pas injure à la performance mémorable des prodiges du Kansas !
1 – Explosion Of Fury
2 – Wrath Of Vishnu
3 – Staring From The Abyss
Entracte anniversaire de John Longstreth : Ricky James « Super Freak » / Berlin « Take My Breath Away »
4 – The Aftermath
5 – Implosion Of Eternity
6 – Swarm
7 – Saligia
8 – Finite
9 – Evolution of Extinction
10 – Portal
Final : Gonna Fly Now
Au final une excellente soirée au Ferrailleur avec encore une fois un son globalement très bon, et un grand merci à l'organisation réactive et compétente, qui n'aura pas été récompensée par une affluence plutôt faible, avec à tout casser 100 personnes au plus fort de la soirée. À croire que le Nantais préfère effectivement la douceur de l'église à la fournaise de la salle de concert. Ou alors c'est le tampon encreur Hello Kitty qui effraie le death metalleux...
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