Mono + Sólstafir + The Ocean
Live report
Mono + Sólstafir + The Ocean Le 05 Novembre 2015 à Paris, France (Trabendo)
Bien étrange plateau que voilà. Les Islandais de Sólstafir, dont la réputation ne cesse de s'accroître dans l'univers du metal, embarquent dans une tournée en tant que co-tête d'affiche aux côtés des Japonais de Mono. Pour ouvrir le bal, la tâche est confiée au collectif allemand The Ocean, un choix surprenant. Un line-up à la fois éclectique et cohérent.
Je dois vous l'avouer, je ne suis pas le plus grand amateur de The Ocean qu'il soit. J'avais donc un peu peur de m'ennuyer durant les quarante minutes de jeu accordées aux Allemands. Et pourtant, mes craintes se dissiperont au fur et à mesure de la prestation du groupe, qui arrivera à me convaincre là où je n'attendais rien. Le chanteur Loïc Rossetti est parfaitement en voix et se montre impliqué dans le set, déployant une belle énergie et allant chercher le public à plus d'une reprise. Au-delà de ce chant convaincant, les titres interprétés ne laissent entrevoir aucune réelle faiblesse sur scène. Si je suis moins satisfait par les passages tirant vers le prog moderne, assez éloignés de mes goûts personnels, les moments où la formation délivre un propos plus sombre me comblent davantage. Le groupe parvient à instaurer une réelle ambiance dans son concert et l'ajout d'une violoncelliste, intégrée à merveille aux compositions, ne fait que renforcer ces atmosphères prenantes. Les Allemands, ayant récemment sorti un split avec Mono, offriront à la foule le titre « The Quiet Observer » en guise de conclusion. Une piste qui achève un concert bien plus réussi que je ne le pensais à la base. Une entrée en matière qui ne sera pas la seule réussite de cette soirée.
C'est au tour, quelques minutes plus tard, de la première tête d'affiche de monter sur les planches. Venu du Japon, Mono verse dans un style qui diffère du reste de l'affiche. Qui plus est, devant une foule constituée en grande majorité d'amateurs de metal, on ne peut pas dire que le quatuor soit en terrain conquis. Et pourtant, les Nippons offriront ce soir LA claque de la soirée, et de loin le concert le plus marquant de ce plateau. Les musiciens démarrent tout en douceur avec « Recoil, Ignite » et prennent le temps de poser une atmosphère, de la développer et, au passage, d'attraper l'auditoire dans les somptueuses mélodies déployées. C'est tout le secret de Mono : la formation prend son temps, fait les choses avec soin, laisse doucement s'immerger avant d'offrir des parties dantesques qui constituent un véritable point d'orgue. Une fois pris dans le post-rock entièrement instrumental des Japonais, il est difficile de s'en échapper tant l'ensemble est envoûtant. L'attitude statique, humble et très concentrée des musiciens n'est pas dérangeante une seule seconde, et le combo n'a pas besoin de s'adresser au public pour transmettre son message : ses compositions suffisent largement. On ferme les yeux, on se laisse guider au travers des pièces délivrées, qu'elles proviennent d'albums récents (comme le split avec The Ocean), ou plus anciens (« Ashes in the Snow » et « Pure as Snow (Trails of the Winter Storm) » issus d'Hymn to the Immortal Wind). L'heure accordée au combo apparaît comme étant bien trop courte, tant elle m'a scotché. Ce soir, Mono nous aura fait voyager très loin, au travers de morceaux rêveurs et imagés, qui me laisseront un souvenir marquant. Magnifique, tout simplement.
Après quelques minutes d'attente, c'est à Sólstafir d'en découdre. J'étais plutôt curieux de revoir les Islandais (la cinquième fois en cinq ans), ceux-ci étant d'habitude bons sur les planches. Malheureusement, ce sera la douche froide. Une déception que je n'arrive pas complètement à expliquer, je dois bien le reconnaître. Peut-être le fait de passer après la décharge émotionnelle qu'est Mono... mais pas uniquement. Le post-rock des Japonais avait ce petit truc qui prenait aux tripes et emmenait très loin. Un élément que je peine à retrouver chez Sólstafir. Les pistes sont agréables, ont quelques belles ambiances et, pour certaines, passent encore mieux qu'en album (« Dagmál » ou encore « Ótta »), et sont correctement jouées. Mais le tout reste bien trop en surface, sans réelle profondeur et je n'arrive pas à être ému par le propos du quatuor. Même des titres qui ont mes faveurs comme l'excellente « Pale Rider » manquent de magie ce soir. L'une des causes principales viendra du chanteur Aðalbjörn Tryggvason, qui m'apparaît comme étant vocalement de moins en moins en forme. Ne se montrant pas toujours d'une justesse exemplaire, c'est surtout l'attitude scénique de ce dernier qui est discutable, avec un côté m'as-tu vu très prononcé, d'autant plus criant pendant le final « Goddess of the Ages ». Un jeu de scène qui ne se prête pas au propos des Islandais et offre un décalage désagréable. Après sept chansons, majoritairement issues du dernier opus en date, le quatuor (accompagné par un nouveau batteur) s'éclipse et promet de revenir en France. J'avoue reconsidérer sérieusement ma venue à leur prochain concert...
Verdict de la soirée? Mono vainqueur par K.O., devant un The Ocean qui sera, à mes yeux, la bonne surprise de cette soirée. Dommage que je ne puisse en dire autant de Sólstafir, qui m'aura déçu. En tout cas, je ne regrette pas d'être venu et j'attends avec impatience la prochaine visite des Japonais dans nos contrées. S'ils passent non loin de chez vous, foncez! Vous ne le regretterez pas.
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