La perspective de passer un samedi gris et terne à la terrasse de mon bistrot de quartier habituel m’a poussé à me remuer le derche et à acquérir un billet pour la
release party du dernier album en date des Français de
MERRIMACK :
« Of Grace and Gravity ». Il faut dire que les Parisiens font partie des rares dont je suis avec intérêt chaque sortie, aussi la perspective de pouvoir enfin les apprécier
live eut raison de ma fatigue chronique. De plus, le reste de l’affiche avait l’air plutôt attractif pour une soirée dédiée au
black metal puisque l’on retrouvera également les Portugais de
MORTE INCANDESCENTE, au registre on ne peut plus classique, ainsi que les Italiens de
NUBIVAGANT, dont je suis
a priori moins client sur le papier du fait de ce chant clair à la
ISENGARD mais qui pourrait se révéler plaisant sur scène. Par conséquent, me voilà installé au bar du
Backstage By the Mill (Paris), une salle que j’apprécie pour son accessibilité et la possibilité de bien y voir d’à peu près partout, à moins de rester coincé derrière un pylône.
Avec deux albums à son actif («
Roaring Eye » en 2020 ; «
The Wheel and the Universe » en 2022),
NUBIVAGANT a largement de quoi remplir son
set d’ouverture. La formation se présente sous la forme d’un duo (batteur + guitariste – chanteur), le marteleur de futs est une masse, son instrument semble minuscule en comparaison ! Il me semble que le concert débute sur « Into Eternal Night » et je trouve le rendu bien meilleur que ce que je craignais : le chant est juste, assez beau finalement, par moment je me dis que si
PLACEBO jouait du
black cela pourrait sonner ainsi (non, je n’étais pas encore ivre, cette réflexion est née dans un cerveau lucide) et, sur les premiers titres, la magie opère sur moi. Un mec fait le signe de croix devant la scène, le public semble sortir du casting de
Sons of Anarchy, je me laisse assez facilement emporter par la musique des Italiens, du moins sur le premier quart d’heure. En effet, au bout de quelques morceaux, tout finit par systématiquement se ressembler : les riffs sonnent à l’identique, les lignes de chant sont trop linéaires, il y a de bonnes idées et le style change un peu de d’habitude mais à force de répéter les sempiternels mêmes accords, sans variations d’intensité particulières, le temps s’étire jusqu’aux frontières de l’ennui. Quand la prestation se termine, j’ai mon compte bien qu’ayant globalement apprécié le spectacle, foncièrement atypique.
Concert filmé par Frankie Snow
MORTE INCANDESCENTE est également un duo. Là, ça n’a l’air de rien mais j’y reviendrai lorsque
MERRIMACK investira la scène. Comme prévu, les Portugais proposent un
black metal teinté de passages davantage
black n’ roll mais c’est hélas du fond de troisième division et je peine à trouver un quelconque intérêt à ces éructations braillardes. La conviction est pourtant là, les moments les plus brutaux me tirent un peu de ma torpeur mais, pour moi, la prestation est globalement une tannée, trouvant les morceaux sans intérêt. Il n’y a finalement que le dernier titre, construit sur un rythme de batterie tribal, qui pose une véritable ambiance, m’incitant par la même occasion à me montrer plus clément envers le groupe. Mais ma vision d’ensemble est probablement fausse, les musiciens remportant un vif succès auprès des premiers rangs (dont je fais partie d’ailleurs, la salle n’étant pas bien garnie). Je ne peux dans tous les cas même pas dire que j’ai trouvé le moment distrayant, ma découverte de la discographie des Lisboètes s’arrêtera là, sans regret.
Concert filmé par Frankie Snow
Heureusement, les Parisiens, eux, n’ont pas failli. Le quintette débarque sur scène et une évidence me saute aux yeux : enfin un « vrai » groupe ce soir. Parce que les duos s’est bien gentil mais c’est finalement ça qui me fait chier : ce dépouillement. Il ne se passe rien sur scène, ni visuellement, ni musicalement. Les structures sont simplistes, les guitaristes ne sont pas des techniciens hors pair, par conséquent ils répètent leurs riffs jusqu’à faire exploser le seuil de pénibilité auditive. Alors que là… Bon sang dès le premier morceau j’ai compris que le
show serait une pure branlée et, effectivement, je pense pouvoir mettre cette date sur le podium de l’année. Outre le fait que la qualité sonore soit indiscutable, parfait mélange de puissance et de précision, c’est d’abord le charisme inquiétant de
Vestal qui me frappe. Il émane de ce mec une aura malsaine saisissante que son chant maladif ne fait que renforcer. Les autres musiciens ne sont pas en reste question prestance scénique, le jeu de lumières permettant une immersion absolue dans ce
black metal d’où ne filtre nulle lumière.
La formation aura joué quatre titres de son dernier album et il est évident qu’ils se fondent à merveille au milieu de ceux issus d’«
Ashes of Purification » ou d’«
Of Entropy and Life Denial », l’impasse étant faite (il me semble) sur «
Omegaphilia » et «
Grey Rigorism ». Une heure incroyable, impitoyable, qui n’a fait que mettre en exergue les lacunes des premières parties. Que dire à part merci et confirmer que
MERRIMACK domine de la tête et des épaules la scène
black hexagonale ?
Concert filmé par Frankie Snow
Au retour, comme à l’aller, je me vois proposer de rentrer me rincer l’œil dans un bar à hôtesses. La première fois, j’ai décliné car j’avais soif, la seconde fois j’ai décliné car j’avais trop bu. La chic soirée !
1. The Birth of a Life’s Sacerdoce : of Nascency and Inelecutability
2. The Falsified Son
3. Sulphurean Synods
4. Subcutaneous Infection: of Flesh and its Decay
5. Beati Estis Cum Maledixerint Vobis
6. Dead and Distant Clamors
7. Horns Defeat Thorns
8. Under the Aimless Spheres
9. Descension from Life
10. Sublunar Despondency
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