L’événement privé que nous allons appeler l’Arronfest se tenait pour sa 4ème édition le dernier week-end d’août dans la campagne francilienne. Pour vous décrire l’ambiance, imaginez-vous retrouver des potes dans une clairière encaissée en forêt afin de passer du bon temps ensemble. Endroit où on vous a préparé feu de joie, picole, saucisses (cuites sur place au BBQ) et gros son ; vous conviendrez qu’il y a pire juste avant la rentrée !
Après avoir pris connaissance des coordonnées GPS fraîchement dévoilées, je me rends à l’endroit indiqué en fin d’après-midi, je trouve le plot de chantier qui indique le petit chemin à prendre à travers champs et j’atteins la lisière de forêt. À droite des voitures déjà stationnées, les quelques tentes installées signalent à la fois ceux qui sont là depuis le vendredi et ceux qui savent ne pas être capables de reprendre le volant après les festivités de la soirée à venir.
GRÔ BAH-TAAR est à l’œuvre quand je descends dans la carrière. Il semble que l’on compte bien sur ce duo pour progressivement mettre l’ambiance en début de programme car il était déjà en première partie la veille, avant que ne jouent
AxDxTx (Boysband goregrind),
PYRECULT (Blackened-hardcore) et
SMOKE (Post-stoner). Apparemment,
BARRAKUDA (Hardrock) qui était aussi à l’affiche n’a pas pu se représenter. Le public composé à ce stade d’une quarantaine de personnes se divertit des chansons françaises à textes engagés de nos troubadours qui – selon les plateformes – se mettent en avant comme « Bouts de filles faciles et marabouts » ou encore «
Shitty musician with good vibes ». J’ai cependant à peine le temps de prêter davantage l’oreille que les deux compères muent en une formation bestiale qui ferait passer
NAPALM DEATH pour de la Pop. À revoir pour creuser le phénomène. Ce premier en-cas est aussi le moment où je vois entrer en scène le jongleur qui nous fera une démonstration de son habileté jusqu’au bout de la nuit. Top pour l’ambiance, merci à lui !
b.0g-daN(OF2) CONSPIRACY
C’est avec « un peu » de retard ( ;-)) que Julien et Vincent, tels les frères Grichka et Igor, se lancent pour nous dans de la vulgarisation scientifique avec leurs fameuses « leçons ». En effet après l’introduction, les 11 titres qu’ils nous jouent se terminent tous par une conclusion qui nous aide à comprendre des sujets tels que la vitesse de la lumière, la matière noire, la gravitation, l’effet papillon, la courbure de l’espace-temps, etc. La caution sérieuse et scientifique du festival, merci de les avoir invités ! Ils poussent le vice au point de venir costumés, l’un avec une blouse blanche de scientifique (le percussionniste), l’autre en combinaison jaune (le chanteur), telle que celles portées par les professionnels manipulant des produits radioactifs. Le côté théâtral s’illustre enfin par une gestuelle mimant leurs explications, jusqu’à complètement
bugger pendant la boucle « Pour l’éternité et la même action » (à la fin de la leçon sur le voyage dans le temps rétrograde). Ce n’est pas pour rien que leur page Bandcamp indique « Brutal Quantic Gorenoise - Extrême vulgarisation scientifique ». Si vous voulez (ré)écouter tout ça au calme, leur album « Mentonium » est disponible en version digitale depuis septembre 2023. C’est sympa de nous cultiver les gars, ça pourra nous faire des pauses utiles entre du Porno-grind et du Death sataniste !
CAMPYLOBACTER
Puisque c’est l’instant scientifique, permettez-moi de partager la définition de cette ignominie coupable de représenter l'une des principales causes mondiales de maladies diarrhéiques (beurk). Le campylobacter (du grec καμπύλος, courbe) est un « genre de bactéries Gram négatif, micro aérophiles, oxydase positive, non sporulantes provoquant des intoxications alimentaires ». On comprend mieux maintenant pourquoi Yoann (aussi dans
SERPILLÈRE) et Ré (le
mastermind de
GORUPTED) qualifient leur son par les mots de « bouillie de cybergorenoise putride » ;-). Pour leur tout premier concert, leur mission est d’assurer la bande-son de l’activité apparemment très attendue du combat de
Caddie. Et malgré quelques problèmes techniques de début de
set, on peut dire que l’objectif est atteint car tout le monde se marre bien, que ce soit à l’intérieur des chariots, derrière à les pousser, ou tout simplement dans l’assemblée !
SEE PARIS AND DIE
On change complètement de registre musical puisque les Cergyssois sont aujourd’hui les fiers représentants de la scène Hardcore. Je les ai ratés l’année dernière lors de leur passage à L’International puis au Klub, c’est donc l’occasion de me rattraper. Ils nous délivrent une prestation assez noire et énergique qui provoque des effets des deux côtés du chapiteau. Tout d’abord de notre côté car c’est pendant leur
show que se produit le premier
pogo de la journée. Mais aussi du leur car à force de se dépenser, le chanteur (accompagné derrière le micro par un guitariste) n’a pas d’autre choix que de se dévêtir de sa parka. À savoir qu’il hurle très haut donc avis aux amateurs. Le quintet arrive aisément à créer une bonne interaction avec les festivaliers, dont les plus curieux pourront se pencher sur l’EP éponyme 5 titres datant de 2018 et sorti en autoproduction.
GRUIIIIK
Les
Thrasho lecteurs assidus depuis le début de l’année à notre rubrique « live report » sont déjà assurément familiers de ce nom de groupe sous forme d’onomatopée de grognement de cochon. On avait effectivement chroniqué leur
concert de janvier avec les Nantais de
TINA TURNER FRAISEUR (
interviewés dans nos pages) ainsi que
celui du mois de mai avec
WASTELAND. Cette fois, le batteur porte son costume de lapin (comme dans le clip hilarant « Gruxiiik » que je vous incite à visionner sur
YouTube) et un pistolet à bulles qui circule nous invite à profiter du spectacle via un nouveau prisme. La finalité reste néanmoins toujours de faire la fête et le chanteur n’hésite pas - à son habitude - à rejoindre le
pit pour se retrouver porté au milieu des
pogoteurs. Un petit
circle pit avant de se voir proposer quelques instants plus tard « une danse simple comme le Madison » et souligner ainsi le côté
groovy de leur Death/Grind. Pas mal pour un « premier concert » (leur
running gag) qui en plus se finit en beauté par un duo avec
GRÔ BAH-TAAR ; on en redemande !
NIHÏLANT
On enchaîne avec un quintet plus posé (tout est relatif, hein !) puisque ceux qui un temps se furent appelés DEVORER évoluent dans la voie du traditionnel Death Metal old school. Ils jouent donc de façon très appliquée et Keyser me fait remarquer à juste titre que le solo qui retentit est le premier entendu depuis le début des hostilités lancées en milieu d’après-midi. J’assiste à leur démonstration dans un esprit moins taquin que celui dans lequel était Sosthène lorsqu’il les a vus ouvrir il y a tout juste un an pour les brutes d’OLKOTH et de DEVANGELIC au Klub (cf. live report), et j’accroche. C’est même un véritable petit coup de cœur pour tout vous dire. Toutes les composantes de leur jeu s’imbriquent parfaitement et l’intervention au micro du bassiste me plaît également. Un extrait de leur futur 2ème album nous rappelle qu’une suite à « Graceless Planet » est attendue, apparemment plus personnelle et originale. Un des guitaristes porte un t-shirt KRONOS, faut-il se préparer à du plus brutal ? Bon, je n’en sais rien, on a juste à patienter maintenant :-).
DEADFUCK
L’écoute à la maison de « Valeur chair » (leur 2ème album dont on souffle la 1ère bougie) m’avait franchement donné envie de découvrir ces Lyonnais en live. Le trio est composé d’un batteur, d’un guitariste et d’un chanteur uniquement, car le bassiste ne servirait à rien ;-). Ça vaut d’ailleurs quelques blagues (« Il est où le bassiste ? ») à l’instant où les artistes s’installent. Après un petit réglage, la purée est envoyée et c’est parti pour un bon gros son Death-grind qui alimente un pogo quasi continu, manquant de peu de se terminer en lutte dans le sol semi-boueux. Mais il en faut plus pour les DEADFUCK (ça veut dire quoi en fait leur nom de groupe ?) qui lancent une innovation : le wall of Caddie ! Au cas où il faille expliquer, ce sont deux équipes (composées d’un gars dedans et d’un autre qui pousse) de chaque côté de la fosse qui se foncent dessus au signal sonore ! Ça fait son effet, il y a même un slam peu après. L’autre anecdote est le passage devant la scène d’un mec qui se défroque pour nous montrer son cul. Est-ce pour cette raison que GRUIIIIK a posté sur la page Facebook de l’événement que l’Arronfest, c’est là « où les contes de fées deviennent des comptes de fesses » ? En parlant des autres formations, je veux aussi mentionner l’intervention du vocaliste de b.0g-daN(OF2) CONSPIRACY, invité sur un des derniers titres. C’était peut-être l’ultime de la setlist initialement prévue mais le succès est tel qu’il y a 3 rappels. Il est vrai que c’est incroyablement intense et brutal, la branlée du festival (ils en font trembler la tonnelle) ! On aimerait les voir plus souvent à Paris (si des orgas nous lisent…).
Le karaoké se voit annulé pour cause de problème informatique, c’est donc l’occasion de se rendre au stand restauration (qui propose saucisses, cheese naan et salade grecque maison, en plus de bières pression fraiches) avant d’aller se faire copieusement insulter par TOURETTE.
Car - pour repartir dans une définition médicale - « le syndrome de Gilles de La Tourette est un trouble neurologique caractérisé par des tics moteurs et vocaux dont un symptôme peut être la coprolalie (production involontaire de mots grossiers ou obscènes) ». On comprend mieux pourquoi un « Bite chatte couille » leur échappe parfois entre deux morceaux, comme celui qui « parle de sperme, de fluide et de putréfaction » ou bien encore le « Marine, Marion et Jordan, on vous encule ». Ça se bouscule à l’écoute du dirty fuckin' Death Grind'n'Roll des Rémois qui sont à l’aise à mélanger les styles, un peu comme le fait KARRAS, dont le bassiste (qui nous offre un chouette solo) porte justement un t-shirt. Puis une balade qui précède la reprise « I got erection » de TURBO NEGRO (Deathpunk) en rappel. Un nouveau « Bite chatte couille » pour finir, en guise de remerciements à l’organisation et au public et on aura passé un bon moment. L’EP éponyme de 2022 de ce power trio est disponible via Cracra Records, putain de bordel de merde !
J’entends uniquement les premières secondes du DJ set de MULK (qui avait déjà croisé nos colonnes en 2009 ; voir l’interview) avant de rentrer à la casa. Il me serait donc difficile de vous faire un retour mais je ne doute pas que son concept « Extreme bpm music / Speedgore / Extreme cyberblastcore / Brutal electro gruik metal* » ait enflammé le dancefloor jusqu’aux aurores !
*choisissez la mention appropriée ;-)
L’édition 2024 est mémorable, un sacré cru ! On a même entendu des feux d'artifices d’un village à proximité, c’était la classe ! L’ambiance est bonne, c’est prix libre, sans aucune prise de tête, dans un esprit ultra underground et do it yourself pour je dirais, une centaine de personnes. Et puisqu’un certain Jérôme a lancé la curieuse comparaison avec le Motocultor Festival, je peux vous affirmer que des pointures qui ont joué là-bas cette année, telles que GORGOROTH, auraient aimé disposer d’un aussi bon son qu’à l’Arronfest, alors merci la Technique !
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