Limbes - Ecluse
Chronique
Limbes Ecluse
Après avoir trouvé sa thérapie mentale auprès du projet intitulé BLURR THROWER Guillaume Galaup a décidé de continuer l’exploration de son esprit dérangé et malade sous le nouveau nom de LIMBES, histoire de clôturer une page sans s’en éloigner complètement. Car évoluant toujours dans une sphère atmosphérique perturbante et ravagée le Parisien continue de proposer des morceaux longs qui laissent la part belle aux instrumentations, qui permettent ainsi de happer l’auditeur pour l’emmener au fin fond de son âme perturbée et tourmentée et ainsi lui permettre de lui faire comprendre sa douleur intime. Néanmoins réduire son œuvre à une pâle copie de SILENCER est franchement réducteur vu qu’on est dans un registre différent bien que cela reste très perturbant, tant l'ensemble va se montrer plus radical et hypnotique que ce à quoi son créateur nous avait habitué jusque-là confirmant qu'on est en présence d'un artiste intelligent, doué mais aussi indubitablement maladif. En effet on est en présence d'une musique qui ne va laisser personne indifférent, tant elle embarque instantanément dans les tréfonds de la psychiatrie classique à cheval entre la schizophrénie et d’autres moments moins dramatiques et plus lumineux.
Il faut dire que dès le démarrage de « Lâcheté » on sait où l'on met les pieds de par ces blasts et ces cris décharnés émergeant au milieu de guitares voilées et d'une ambiance neigeuse et grisâtre constante… comme si les atmosphères instables se combinaient dans un mélange de fureur, car ici tout est désespéré et sans espoir de retour à une tranquillité intérieure. Tempétueux dans sa conception comme son exécution cette plage ne ralentit pratiquement jamais l'allure et voit la batterie menée à deux cent à l'heure maintenir une cadence presque surhumaine, au milieu des riffs simplissimes et joués en boucle de façon récurrente et planante. Tout cela renforce donc le sentiment nihiliste et orageux qui émerge de ce chaos total qui voit néanmoins un court break synthétique et martial apparaître, comme si les médicaments faisaient leur effet avant que l'esprit ne retourne à ses divagations proches de la surchauffe interne. Pourtant si cette ouverture radicale donnait du fil à retordre malgré son accessibilité de façade « De courbes et de peaux » va trouver le moyen d'aller encore plus loin en termes de fureur comme d’intensité, vu que là tout y est déchaîné dans le cyclone porté par une rapidité démentielle et où ça tabasse de début à la fin sans discontinuer (où l’on voit toujours ces notes coupantes émerger des nuages tel un éclair de lucidité au sein du tonnerre présent dans le cerveau). Plus dépouillé dans son écriture il fait office de suite non-officielle à la plage précédente, confirmant que ce disque est compact et homogène tant les différents morceaux s'imbriquent totalement les uns dans les autres et pouvant être ainsi écoutés d'une seule traite comme un seul bloc musical (même si tout cela demande du temps et de la patience pour être totalement assimilé). Il est vrai que malgré un rendu assez sobre il est délicat de s'enfiler tout cela d'un coup au risque de partir totalement en vrille ou de faire un rejet de par la négativité qui s'en échappe, et ça n'est pas avec « Corridors » que les choses risquent de s'apaiser. Car ici on y retrouve les mêmes éléments que précédemment avec en supplément de nombreux roulements de caisse claire (on se demande d'ailleurs comment elle tient le choc), amenant un léger accent Punk ainsi que des accents épiques bien sentis sur le mid-tempo qui donnent de fait un côté guerrier et plus professionnel à un rendu toujours cradingue et bas du front.
D'ailleurs ce ressenti de plus grande expérience musicale va trouver son apogée sur le très long « Leurre » et son quart d'heure de gloire sans discontinuer, qui va servir de parfait condensé de ce que à quoi on a eu droit jusqu'à présent tout en dévoilant une pause agréable aux relents Jazz et électroniques cotonneux qui font du bien, en amenant de la sérénité et de l'apaisement à la tête comme aux oreilles. Pour le reste rien de neuf ni de surprenant, ça maintient une cadence très élevée de façon quasi permanente et conclut ainsi une réalisation qui met à genoux et auquel il sera nécessaire de récupérer ensuite en se changeant les idées, au risque sinon de plonger dans les abîmes tourmentés de son créateur qui s'est surpassé… mais à quel prix ?! Version plus primitive, déglinguée, folle et crade de ce qu'il faisait il y'a peu avec sa précédente formation celui-ci livre une galette atypique (qui aurait comblé en son temps Carl Jung et ses disciples) qui fera repoussoir pour les uns comme attractivité pour les autres, signe de l’intérêt de cette dernière qui est vraiment unique de par ce qu'elle dévoile au sein de la scène hexagonale qui n'en demandait pas tant. A voir maintenant si tout cela passera l'épreuve du temps et des écoutes multiples, tant il faut y aller progressivement et avec parcimonie pour adhérer au message, et le décrypter avec patience et découverte permanente... signe d'une vraie qualité générale (même si au final ce côté hermétique et la difficulté de faire ressortir une compo plus qu'une autre peut lasser), mais qui à l'instar de nombreuses bonnes choses est à consommer avec modération et par petits bouts.
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