Aina - Days Of Rising Doom
Chronique
Aina Days Of Rising Doom
Notre histoire prend place dans le paisible et paradisiaque royaume d'Aina, dont le peuple pacifique vivait depuis longtemps dans le bonheur le plus absolu. Le soleil caressait de ses doux rayons l'herbe ondoyante des vertes prairies du pays, enchantées par les mélopées cristallines des mesanges . Il n'y avait ni pauvres, ni êtres mauvais ou contrefaits : tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes... Mais un jour, les Dieux prédirent la chute d'Aina et envoyèrent un message d'avertissement aux Oracles. Trois prophètes se chargèrent de le transmettre au Roi, mais le brave et puissant Taetius Ainaen (Damian Wilson) qui leur rit au nez, leur expliquant que depuis la nuit des temps, Aina n'avait connu que paix et prospérité.
Torek Ainaen (Thomas Rettke le chanteur de la formation de heavy metal allemande Heaven's Gate), futur héritier du Trône d'Aina, était secrètement amoureux de la pure Oria Allyahan également surnommée la Vierge d'Argent (Candice Night qui officie dans Blackmore's Night), dont la beauté parfumait l'air tel un encens doux, mais celle ci lui préférait son frère, le brillant Talon (Glenn Hughes). Alors que Torek rassemblait son courage pour déclarer sa flamme à la sublime Oria, le beau Talon lui annonça qu'il allait se marier avec la magnifique jeune femme le mois prochain. Le coeur brisé, ivre de jalousie devant le bonheur insolent du jeune couple, le malheureux Torek quitta le château d'Aina.
Furieux, Torek voyagea bien au delà des contrées connues, et s'arrêta dans un royaume oublié, où des créatures hideuses et malfaisantes avaient trouvé refuge. Elles firent cependant de lui leur seigneur, et le célébrèrent comme l'incarnation de leur dieu Sorvahr. Plus le temps passait, et plus la haine qui le consumait gagnait en force. Son corps s'accommoda aux sentiments négatifs qui l'habitaient et Torek devient une horrible bête difforme, vouée au mal, et dotée d'une force prodigieuse. Il décida alors qu'il était temps de prendre sa revanche sur le Royaume d'Aina...
Contée par Michael Kiske (d 'Helloween, celui là même qui avait décidé qu'il en avait fini avec le metal) et dans une moindre mesure par Tobias Sammet (Edguy), Days Of Rising Doom, pourrait être comparé à un blockbuster américain. Aina, c'est avant tout un casting bigaré, rassemblant des vocalistes réputés d'horizons musicaux différents, des musiciens issus de formations reconnues tels Derek Sherinian (Ex-Dream Theater), Jens Johansson (Stratovarius), Thomas Youngblood (Kamelot), T.M. Stevens (Steve Vai et beaucoup d'autres!) et Emppu Vuorinen (Nightwish) et enfin une histoire simple qui plaira sans aucun doute aux amateurs de Fantasy, on ne peut plus manichéénne à la fin de laquelle, soyez rassurés, les Gentils vont gagner. Comme si cela ne suffisait pas pour appâter le client, Transmission Records a mis les petits plats dans les grands pour la sortie de « Days Of Rising Doom » en proposant une édition limitée sous la forme d'un luxueux digibook de 68 pages richement illustré, contenant deux cds (l'opéra metal est présent en intégralité sur le premier, tandis que le second est une compile de morceaux bonus sans grand interet ) et un dvd (avec un clip et le making of)
Aina est un pur produit de l'équipe de Transmission Records. Comme l'explique Sascha Paeth dans le making of, le projet est né de l'initiative du patron du défunt label, qui avait toujours révé de travailler sur un opéra metal. Composé presque intégralement par Robert Hunecke-Rizzo et bénéficiant des arrangements orchestraux de Miro (qui a collaboré avec Epica et After Forever entre autres, groupes phares de l 'écurie Tranmission), sur un concept et une histoire d'Amanda Somerville (coach vocal américaine qui a participé à l'élaboration d'albums des deux groupes cités précédement), produit par Sascha Paeth (principal producteur d'Epica, mais aussi de Rhapsody), « Days Of Rising Doom » est une création placée sous le signe de la variété, occillant entre heavy, metal progressif, rock FM, et tonalités bluesly.
Un casting redoutable, dirigé par une équipe expérimentée disposant d'un budget sûrement considérable pour arriver à ses fins, le projet est alléchant sur papier, mais en réalité, « Days Of Rising Doom » souffre d'un manque d'homogénéité flagrant. L'action met beaucoup de temps à démarrer : L'intro est anecdotique, le titre suivant, « Revelations » a le mérite de faire évoluer l'histoire mais ne comporte rien d'intéressant musicalement si ce n'est le solo de Jens Johansson. Pire encore, ces deux morceaux sont suivis d'un ballade sirupeuse du plus mauvais effet. Puis subitement le ton change, et voilà l'auditeur embarqué dans une suite de quatre compositions accrocheuses et bien ficelées. La fin de « The Siege Of Aina » annonce à nouveau une baisse de qualité confirmée par «Talon's Last Hope » dévoilant un Glenn Hughes aux intonations pleurnichardes. Et ce n'est pas la présence d'un André Matos à la voix melliflue qui remonte le niveau. Et la dégringolade continue encore et encore avec « Rape Of Oria » un titre atmosphérique qui en dit long sur les supplices que fait subir Torek à la princesse. Rien de sauve non plus « Son Of Sorvahr » : l'interprétation de Thomas Rettke et la participation de T.M Stevens ne font pas oublier les riffs pompiers souligné d'orgues kitch. On touche le fond avec l'insipide « Serendipity » et « Lalae Amêr », morceau inutile par excellence, écrit intégralement dans le langage du peuple d'Aina inventé pour l'occasion par Amanda Somerville. Heureusement « Rebellion » et ses mélodies péchues réveillent l'auditeur. La voix aux accents blues de Glenn Hughes, qui ne se prêtait pourtant pas particulièrement à ce genre d'exercice, s'accomode à ce titre heavy-speed, éclipsant ainsi « Oriana's Wrath» encombré par des choeurs trop présents. C'est « Restoration » qui clôt l'histoire d'Aina. Si vous tendez l'oreille vous pourrez y reconnaître des samples des titres précédants. Vraiment dispensable.
En plus d'un qualité en dents de scie, « Days Of Rising Doom » pêche par sa variété, qui devient parfois déroutante. Que dire du break aux arrangements veloutés qui fait irruption sur le morceau très typé speed metal « Flight Of Torek » pour accueillir l'intervention de Glenn Hughes, cassant de la meilleur façon l'élan du titre? Les exemples sont nombreux et l'on vient à s'interroger sur la pertinence de certains passages. Les solos de guitares sur « Lalae Amêr », paisible interlude orientalisant, paraissent réellement incongrus, comme tirés d'une autre composition. Les mêmes questions se posent à l'écoute de l'outro rock n'roll de « Revelations » qui tombe comme un cheveu sur la soupe. Une drôle de conclusion pour un morceau qui lorgne du côté du métal symphonique.
Autre fiasco monumental : les ballades. Passage presque incontournable dans toute histoire d'amour passionné, elles font partie intégrante de Aina. Interprétées par Mickael Kiske principalement, elles atteignent ici un degré de mièvrerie jamais effleuré dans le milieu du metal (même pas par Within Temptation, c'est dire!). Ce n'est pas le Kiske au timbre cristallin et aux aigüs stratosphériques des heures glorieuses d'Hellowen que l'on retrouve ici, mais un Kiske faiblard dont la voix aux intonations sucrées sied tout à fait à la prose gnangnan d'Amanda Sommerville. Prenez des lignes vocales mielleuses, posez les sur une tartine d'arrangements moelleux, saupoudrez de paroles fleurant bon la guimauve du style « her beauty and her innocence perfume the air like sweet incense » ou « but love will bloom even in gloom ». Enfin accompagnez le tout de bons sentiments et vous obtiendrez « Silver Maiden » ou « Serendipity », mets indigestes à déconseiller à quiconque désire éviter une crise de foie.
Mais pourtant Aina réserve quelques bons moments à l'auditeur. Au milieu de ballades sonnant « Disney metal » ou de titres traînants en longueur dans lesquels se croisent des personnages pâlots, se cachent des compositions de bonne facture dont l'efficacité est renforcée par l'excellence de leur vocalistes. « Flight Of Torek » est un véritable brûlot heavy au tempo rapide, doté de riffs accrocheurs. Qui d'autre que Tobias Sammet pouvait l'interpréter? Sa prestation est d'un telle qualité que l'on regrette qu'il soit relégué au simple rang de narrateur et ne participe réellement qu'à un seul morceau. L'autre surprise de l'album n'est autre que la présence de Thomas Rettke. Il est fort possible que son nom ne vous évoque rien et pourtant, l'homme est un vieux briscard de la scène métal puisqu'il officiait déjà dans Heaven's Gate, une formation de heavy allemande au début des années 90. Et Rettke s'avère être un choix particulièrement pertinent pour donner vie à Torek... Sa voix rocailleuse mais capable de flirter avec des aigüs surprenants fait des merveilles sur « Naschtok Is born » et « The Beast Within ». Il brille également sur le long « The Siege Of Aina » titre qui, pour ne rien gâcher, bénéficie par ailleurs d'un solo de Derek Sherenian.
L'édition limité de l'opéra contient deux autres galettes. Un second cd intitulé « The Story Of Aina », rempli de versions alternatives ou de singles sans intérêt. A noter, la présence de « Ve Toura Sol », traduction du titre « Rape Of Oria » dans la langue d'Aina. Le titre éponyme long de plus de quinze minutes, summum de l'inutilité, est en fait l'histoire d'Aina récité par Sebastian Thomson sur fond d'arrangements discrets. Le dvd bonus, « Beyond The Border » contient le clip de « The Beast Within ». L'originalité de ce dernier est d'être réalisé entièrement en images de synthèse, mais le résultat est d'une laideur affligeante... Transmission nous gratifie également d'un making of d'un quart d'heure, où l'on aperçoit l'équipe des créateurs d'Aina complètement gaga de leur bébé et d'autres gadgets totalement dispensables.
Cinq titres qui en valent la peine sur quinze pistes totalisant plus de soixante dix minutes de musique c'est fort peu. Créer un opéra metal est un challenge ambitieux qui ne supporte aucune négligence. Or les créateurs d'Aina semblaient trop se reposer sur leur casting, flamboyant il est vrai, plutôt que de se concentrer sur les compositions, au niveau vraiment trop aléatoire. Espérons qu'ils retiendront la leçon pour une suite éventuelle à ce « Days Of Rising Doom ».
| Alesya 1 Mai 2007 - 1660 lectures |
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