S'il y a bien une chose qu'on doit concéder à Benoît XVI, c'est qu'il aura œuvré plus qu'aucun pape avant lui pour ouvrir les yeux des derniers crédules ayant cherché en l'Eglise l'espoir et le réconfort qu'une vie misérable ne pouvait leur offrir. En effet si ce gugusse est vraiment l'émissaire du dieu des catholiques parmi les hommes, alors c'est soit que ce dernier n'existe pas, soit que c'est un fieffé connard. Dans le même ordre d'esprit, après la sortie d'un
« Crisis » magistral, le fait que Symbyosis ait obtenu aussi peu de considération, qu'il se soit fait lâcher par son label et qu'il ait été réduit à quémander quelques pesetas auprès de ses fans pour pouvoir financer son 2nd opus est bien la preuve que les dieux du metal tant loués par Manowar sont eux aussi de sacrées raclures, et que la bande à Joey DeMaio pourrait tout aussi bien troquer ses peaux de bêtes contre des toges et ses cheveux longs contre des boules de billards bien astiquées pour s'en aller vénérer Bouddha en lieu et place de ces divinités décidément aux abonnés absents, ou bien – ce serait un comble ! – sourdes comme impôts (
comme dit le fisc).
Quoi qu'il en soit, contre vents et marées, Franck Kobolt et Corrosive Bob, entourés pour l'occasion de Nikos Kevorkian (
Outcast), Antoine Rognon et Tariq Zulficar (
yeees, un vrai batteur a rejoint le groupe!), ont non seulement réussi à sortir une suite à
« Crisis », mais se sont payés le luxe de faire aussi bien – non: mieux – que précédemment, sur le fond comme la forme, la qualité comme la quantité, la musique comme le packaging. C'est ainsi sous forme d'un double CD somptueux aux faux airs de jeux vidéo que nous arrive « On the Wings of Phoenix », épopée de Science Fantasy aussi magistralement mise en images (
Maman, quels livrets magnifiques!) qu'en musique.
Avant de commencer à martyriser mon clavier pour vous parler des bienfaits de cet album, j'ai remis le nez dans la chronique de
« Crisis » et j'ai été frappé de voir à quel point la description de la musique alors pratiquée par le groupe restait d'actualité, preuve s'il en est que celui-ci a su rapidement se forger une personnalité et amener à maturation un style qui n'a plus à présent qu'à être décliné selon l'inspiration du moment, sans besoin (
ni même possibilité) de perfectionnement supplémentaire. On retrouve donc sur « On the Wings of Phoenix » ce thrash/death progressif et excessivement mélodique que l'on avait découvert sur
« Crisis », encore et toujours placé sous le haut patronage de guitares toutes puissantes, tour à tour taillant dans la bidoche à la hache, décrivant de complexes et étonnantes arabesques dignes d'un
Coroner shooté au metal scandinave, sprintant poignée en coin ou égrenant de longs soli gorgés de feeling. Accordons une phrase encore à ces fameux soli, qui flirtent souvent avec la minute tout en restant étonnamment digestes et bien intégrés dans les morceaux: Franck et Nikos y font preuve d'une virtuosité bluffante, enchaînant les passages au rendu très blues rock, les duels de twin guitares heavy metal, ainsi que des tirades réussissant à faire rimer émotions avec vitesse d'exécution. Les nouveaux morceaux sont une fois encore d'impressionnants travaux d'horlogerie, aussi délicatement qu'expertement agencés en des œuvres complexes mais limpides, tantôt ébouriffantes de puissance, tantôt vecteurs de sérénité, tantôt ascenseurs pour l'âme vers le lointain pays du Sublime. Les points faibles restent également les mêmes, à savoir une prod' un chouïa trop clinique et un chant éraillé dont l'étroitesse du spectre de modulation et la rugosité tranchent quelque fois un peu trop avec la délicate sophistication de la musique. Bref, on retrouve ici l'inimitable patte Symbyosis.
Mais au lieu de ressasser les ressemblances avec
« Crisis », parlons plutôt de ce qui est nouveau. On notera tout d'abord que cette fois-ci, le fait de développer une histoire ambitieuse et aussi magnifiquement illustrée (
on a déjà parlé des livrets, mais allez également le vérifier sur le site dédié à l'album) apporte une dimension supplémentaire à la musique du groupe. Ce développement va d'ailleurs de paire avec une mise en avant plus prononcée des orchestrations, ce qui renforce encore un peu plus le côté majestueux – et ambitieux – des compositions. A ce titre « The Venom » – superbe morceau plein de contrastes – illustre parfaitement cette évolution et prend par moment de véritables allures de B.O. grandiose. Mais pour moi, le gros plus de ce 2eme album, c'est « Phoenix Ashes », un CD bonus pour lequel j'aurai volontiers claqué 15 euros supplémentaires s'il avait été vendu comme un album à part entière. En effet là où les CDs bonus sont habituellement des fourre-tout à la qualité inégale, sinon moindre, celui-ci est l'occasion pour le groupe de lâcher encore plus la bride à sa créativité et de s'exprimer sans retenue ni contrainte dans toutes les directions que lui montre sa muse. Et mes aïeux, quel canon cette muse! Ecoutez-moi par exemple cette merveille qu'est « Crusades Part VI », un chef d'œuvre qui déploie dans l'écrin de velours du metal Symbyosien le diamant brut de passages classiques issus de la Symphonie n°9 en D mineur de Beethoven, pour un résultat atteignant des sommets seulement égalés par Hollenthon sur son « Lords of Bedlam ». Et après ce pur moment de bonheur, le groupe continue d'élever nos âmes avec l'enchaînement « Life » / « Dreamchild », sur lequel on se retrouve transporté loin au-dessus du sol, porté par des passages où le meilleur d'un
Devin Townsend s'adressant directement à notre cœur s'allie à des orchestrations sublimes, des guitares incisives et inspirées, un chant féminin angélique et des expérimentations à base de vocodeurs et de choeurs qui rappellent les plus grands moments d'un
At All Cost. Plus de 11 minutes et demi sans toucher terre mes enfants! Puis c'est une série de 5 hommages successifs qui s'ensuit, sous forme d'une composition inédite écrite à la gloire de
Napalm Death et de 4 covers – du
Slayer et du Nuclear Assaut, groupes qui pour le coup semblent étrangement pauvres au beau milieu d'un tel étalage de finesse, ainsi que du
Pestilence et du
Iron Maiden, bien plus à leur place ici tant les morceaux repris sont suffisamment sophistiqués et réussis pour ne pas faire pale figure par comparaison. Le reste est constitué des très bons « Crusades Part IV & V », ainsi que d'un retour vers
« Crisis » sur les dernières pistes du CD.
Certes je m'emporte un peu à l'évocation de « Phoenix Ashes », mais en m'attardant plus sur « On the Wings of Phoenix » j'aurais du évoquer avec la même emphase, aux côtés du « The Venom » cité un peu plus haut, le thrash/death formidablement mélodique et entraînant de « War Phenomenon » ou un « Peace » larger than life, au lien de parenté certain avec la doublette « Life » & « Dreamchild ». De toutes façons j'avoue ne plus savoir où donner de la tête à l'écoute de ce fabuleux double album. C'est un raz de marée d'excellence, une longue et délicieuse extase qui vous extrait pendant quasiment deux heures de votre pauvre condition de simple mortel, un exemple d'inspiration, d'homogénéité dans l'excellence et de symbiose réussie entre force, délicatesse, puissance et beauté. Je voulais initialement mettre un 9.5 à cet album pour tenir compte des menus défauts évoqués plus haut … Tssssss: dérisoire élan de mesquinerie qui n'aurait pas rendu justice au fabuleux voyage que nous offre ici le groupe.
10 COMMENTAIRE(S)
10/07/2017 18:33
J'ai le sentiment d'avoir un Ayreon en pleine forme, avec un bon gros accent Death qui va là où il faut. Les sorties de route au vocoder et autres effets sont utilisés par moments, on évite l'écueil de trop en faire.
J'apprécie franchement la rythmique, qui est impeccable. C'est un album qui me fait un bien fou, peu importe le morceau. J'ai le sentiment que ça s'adresse à moi, ça m'évoque plein de choses et, niveau inspirations, ça ne me rappelle que le meilleur de ce que j'ai en terme de Power prog sous l'égide Death metal.
Dans mon top, sans hésiter, avec Kalisia.
24/08/2009 14:38
Suis pas fan non plus de l'artwork, du concept-histoire et tout ça: certe c'est ambitieux et bien foutu mais ça manque un peu de bon gout (à l'image de la prod d'ailleurs: clinique, sans profondeur). Ce OTWOP n'en est pas pour autant mauvais, il est même plutôt bon et je prend quand même du plaisir à l'écouter.
10/08/2009 14:45
Ce n'est nullement ébouriffant sur quelque plan que ce soit : mélodiquement lacunaire, structurellement classique, et c'est assez répétitif surtout que l'album dure une heure.
Bref un album à écouter avec quelques moments agréables, mais loin d'être aussi bon que ce que dans le genre les frenchies de Fairlight, Chrysalis ou Kalisia ont déjà fait. Tout juste bien.
19/05/2009 21:41
7€ en déstockage à la FNAC !
12/04/2009 15:07
30/03/2009 10:25
29/03/2009 19:24
29/03/2009 13:05
29/03/2009 11:12
29/03/2009 04:28