Death Mercedes - Sans Éclat
Chronique
Death Mercedes Sans Éclat
Le monde du screamo français est décidément plein de surprise. Alors que je n'attendais plus rien du milieu depuis Daïtro, un groupe récent (même si fondé par d'anciens musiciens de groupes plus connus. Qui a dit « Amanda Woodward » ?) a réussi a me coller une petite claque. En provenance directe de chez Throatruiner, label que je ne vais pas me fatiguer à présenter vu que tout ce qui sort de chez eux est toujours qualitatif et reconnu, Death Mercedes entend faire du screamo/hardcore, mon bon monsieur. Et si possible, un peu à l'ancienne, eh ouais...
Enfin « à l'ancienne », d'accord j'extrapole un peu car ce serait sans compter sur les quelques innovations disposées ça et là mais j'y reviendrais. Comme d'habitude avec le genre, le titres sont plutôt courts et le chanteur déclame ses paroles en français sur des rythmiques empruntant autant au Metal Extrême (quelques blasts à l'occasion) qu'aux Math-rock et à ses patterns déstructurés. La première chose qui frappe, c'est que nos petits copains ont une production bien bétonnée (signée de tonton Francis Caste qu'on ne présente plus, un peu comme Throatruiner...). Un détail qui aurait pu gêner (Qui a dit « Birds In Row »?) mais qui n'est pas véritablement handicapant. À vrai dire, c'est même plutôt un plaisir de savourer cette basse métallique qui se plaît à faire résonner ses cordes, notamment sur le tout début de l'album. Mais, sachez tout de même que vous qui appréciez le charme d'un son un poil rétro et étouffé (Qui a dit « Il n'y a pas de Orchestre » ?), vous serez sûrement un petit peu désappointés à la première écoute de ce « Sans Éclat ».
En terme de compositions, il n'y a pas grand chose à dire, Death Mercedes fait le taf en incorporant dans ses titres les décrochages rythmiques, les envolées de violence et les petits passages plus mélodiques qui ont fait le succès du genre. De même, le chanteur assure le job et sait s'égosiller au moment opportun. Je vois d'ici dans vos yeux cette petite lueur de curiosité qui vous fait penser « Mais alors pourquoi eux plutôt qu'un autre ? ». Pourquoi eux ? En vérité, ce sont les quelques innovations marquées qui rendent Death Mercedes intéressant et véritablement émouvant. Premièrement, l'aspect Spoken Word très fréquent (Qui a dit « Fauve » euh, non, euh « La Dispute » ?) et la variation des intonations du chant sont des aspects clairement attrayants. Certains seront refroidis directement car le désavantage de cette pratique, c'est que l'on comprend quasiment tout ce que dit le vocaliste. Et les paroles sont quand même à la limite du cucul-la-praloche de haute-volée (Qui a dit « Mihai Edrisch » ? ) mais cependant, la technique vocale est tellement bien maîtrisée qu'on se laisse prendre au jeu et que l'on décolle au moment où la musique le décide. Pari osé donc, mais réussi.
On notera aussi un petit côté Post-Rock vraiment prononcé, notamment avec des guitares nébuleuses qui grattent à fond les ballons et qui sont mixées relativement fort. Personnellement, je trouve que c'est une grande qualité que d’insister sur le côté planant de la chose. Même si ces passages ne sont pas récurrents et qu'ils ne durent pas bien longtemps, cela donne un cachet spécifique à la musique de Death Mercedes. Envolées flirtant avec le post-rock donc mais aussi agressivité accrue par le son du disque, voilà un cocktail qui le fait bien. On pourra aussi remarquer la très bonne prestation du batteur qui livre des parties complexes et ma foi, fort originales. « Leurs choix désarment » par exemple, illustre très bien toute la richesse que l'on peut trouver dans l'album, ces influences subtiles mais présentes, cette technicité qui sert le bon déroulement du disque et bien évidemment ce petit côté mélodico-guimauve qui fait qu'on aime bien écouter du screamo. « Sans Éclat » pourrait facilement faire pleurer votre petite sœur ou votre cousine, si elle a trop bu, et c'est bien la seule chose qu'on lui demande de faire.
C'est angoissant, ça donne l'impression de ralentir le temps sur les passages les plus atmosphériques (même si ce n'est pas très long en réalité) et par moment, c'est carrément plombant. En fait, Death Mercedes c'est l'équivalent d'un Test de dépistage des MST, le risque de contagion inclus. D'ailleurs, même eux le dise ( Ces « Chiens Infidèles » qui prennent des risques non-négligeables avec leur santé, donc...). Nonobstant cette digression à visée humoristique assumée, « Sans Éclat » est véritablement un disque qui propose son quota d'émotions et presque chaque titre offre un bon moment bien déprimant ou l'on pourra faire bosser ses glandes lacrymales sous condition d'avoir un pot de glace Vanille à côté de la chaîne hi-fi. Peut-être que certains morceaux plus directs de type « Trop Tard » sont en dessous du lot, mais rien de bien insurmontable puisque ces titres durent moins de deux minutes. Croyez-moi, c'est bien trop éphémère pour pénaliser l'écoute, d'autant qu'ils restent tout de même de bonne facture. Au registre des mentions spéciales, on citera « L'inconnue de La Seine » avec une ambiance particulièrement soignée, « Borgne et Aussi Aveugle » qui après l'excellent premier titre a les couilles de faire aussi bien sinon mieux et le final, « Cafard de Bar » qui est une très bonne synthèse du groupe.
Bref, Death Mercedes, fort de son expérience musicale dans le genre sort un disque qui balance largement assez la sauce, autant en terme de frappe que d'émotions, pour que les amateurs daignent s'y intéresser. Malgré deux ou trois coups de mou dans le disque, les quelques apports proposés sont vraiment intéressants et donnent au groupe un style propre. Un très bon disque, pour vos soirées solo, à la recherche de votre moi profond et juste avant de regarder « Le Journal de Bridget Jones » pour la douzième fois de l'année.
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