De l'étonnement. Voilà ce que j'ai ressenti lorsque j'ai vu Oathbreaker en concert lors de sa venue à Metz pour le festival We Are A Young Team (vous pouvez d'ailleurs lire un live-report de cette soirée écrit par les collègues FleshOvSatan et Matpewka
par ici). J'y allais pourtant à reculons, n'ayant écouté de lui que le cliché
Mælstrøm. Le groupe était alors pour moi un exemple parmi d'autres de ces innombrables fans du travail au cirage de Kurt Ballou, où l'image agressive et obscure n'est là que pour maquiller une musique lisse au possible, entre crust, hardcore moderne et black metal. « Ce que l'on attendait de nous » me dira plus tard Caro Tanghe, avant d'appuyer que l'objectif était bien diffèrent avec
Eros|Anteros.
Et ça s'entend ! Si je pense toujours à un mix dans l'air du temps fortement influencé par Converge (« As I Look Into The Abyss » par exemple), la musique des Belges possède sur cet album une étrangeté qui la rend personnelle. Le quatuor fait enfin valoir ses atouts sans donner cette impression de classicisme qui encombrait
Mælstrøm. Cela se doit en grande partie à une voix de harpie contrastée par un chant clair lascif, plein de candeur et féminité rendant fascinantes les interventions de la demoiselle, mais aussi des instruments plus à l'aise dans les différents styles explorés sur le premier longue-durée. Tour à tour épique comme le crust le plus émotionnel, glacial comme le black metal le plus venteux et entêtant comme le meilleur de la vague de phéromone noyant metal et hardcore (les ombres de SubRosa, Grayceon et consorts planent derrière « The Abyss Looks Into Me »),
Eros|Anteros frôle l'absurde par ses mélanges incessants et pourtant ne lâche jamais son étreinte.
Car Oathbreaker paraît ici s'inscrire dans une version actualisée des groupes hardcore des années 90, ceux qui ne se posaient pas de questions quant aux classifications et appellations d'origine contrôlée, préférant assommer l'auditeur de leur vision à-part, presque expérimentale, toujours catchy. Plus que Converge, ce côté fourre-tout doté d'une cohérence propre me rappelle des formations comme
Damad (il y a un peu de la folie de Victoria Scalisi chez Caro Tanghe) ou Union Of Uranus et son urgence entre crust et screamo préfigurant ce que sera plus tard le magique Circle Takes The Square.
Eros|Anteros use de la même violence merveilleuse, donnant à ses leads mordantes un caractère onirique qui enchante et brise dans le même temps. Il suffit d'écouter l'élevée et frénétique « No Rest For The Weary » ou encore les pauses à la fois sexy et glauques de « Agarta » ou « Offer Aan De Leegte » pour s'en rendre compte ! Oathbreaker n'est plus l'élève ennuyeux de
Mælstrøm : il voyage désormais seul, dans un pays imaginaire dont il détient seul la clef, entre majesté et colère, poésie lunaire et expérience éprouvante pour les nerfs.
Même dans ce qui pourrait lui faire défaut,
Eros|Anteros arrive à tirer des qualités, notamment dans cette production signée Kurt Ballou qui, une fois n'est pas coutume, donne ce qu'il faut de netteté aux notes aiguës qu'aiment jouer les guitares d'Oathbreaker. Rien à déplorer ici, à part quelques compositions en deçà des attentes (le final « Clair Obscur », culminant à onze minutes et un peu décevant par rapport à ce qui le précède). Si cette nouvelle direction plaçant sauvagerie et magie sur le même piédestal possède encore une certaine timidité ne la rendant pleinement satisfaisante que lors d'une écoute attentive, elle s'avère tellement prenante qu'elle donne envie de savoir où les Belges iront par la suite.
Enfin, Oathbreaker mérite pour moi ses pochettes symboliques, l'imagerie énigmatique qu'il se plaît à développer avec ses confrères de la Church Of Ra, les louanges que d'autres ont pu lui donner dès le départ. Si
Eros|Anteros ne convainc pas toujours (« Nomads », beaucoup trop marquée par la bande à Bannon), ce qu'il transmet à son meilleur est d'une telle bizarrerie enivrante qu'il mérite définitivement qu'on s'y arrête. Une œuvre s'extirpant des carcans habituels, une beauté maladive qui reste longtemps en mémoire... Que demander de plus ? Ah ! Ces Belges...
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