Au Diable la neutralité helvète. Le pays a beau ne jamais se mouiller dans les conflits internationaux, sa scène musicale extrême est tout, sauf timorée. Kruger incarne plus l'efficacité Suisse que son célèbre visage "tempéré", puisque, depuis 2002, le combo balance au visage du monde apeuré des disques entre Sludge et Post-Hardcore, faisant la juste balance entre "émotion" et violence pure et simple. Ainsi, Kruger nous revient quatre ans après
"For Death, Glory and the End of the World", un disque fort bien mené, avec "Adam and Steve", toujours chez Listenable Records. Galette attendue au tournant par les fans et les amateurs, dont l'appétit avait été ouvert par l'EP "333", qui dévoilait deux titres dudit opus.
Derrière "Adam and Steve", titre énigmatique, se cacherait en fait un slogan tout droit emprunté aux bigots catholiques américains, lorsqu'ils manifestaient, dans les années 70, contre l'homosexualité. Quoi de mieux pour illustrer cet aphorisme qu'une simple pomme non entamée, qui vient orner l'artwork de façon simple et directe ? On regrettera un petit peu le fourmillement de détails et le côté "graphique" que l'on pouvait trouver sur les jaquettes de l'album précédent et de "Redemption Through Looseness", certes, mais nous ne sommes pas là pour juger des qualités plastiques de "Adam and Steve", mais de ses qualités musicales. Et soyez rassurés, de ce côté-ci, le contrat est fort bien honoré.
Kruger n'empruntant aucun détour ni artifice superflu, "Adam and Steve" se passera d'introduction, pour démarrer sur "Bottoms Up", une pièce qui personnifie à merveille l'expression "C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes" : une batterie qui claque, suffisamment bien mixée pour qu'elle n'empiète pas sur le reste des instruments, une basse qui vrombit, des couches de guitares épaisses à souhait, et un chant... Complètement hystérique. Le tout au service d'une piste bien construite, alternant parties saccadées qui sont autant de brises-nuques en puissance et passages plus lourds, plus hallucinés, débordants de chants clairs, énigmatiques, mystérieux. Un joyeux patchwork musical, oscillant toujours entre chaos complet et puissance maîtrisée, une parfaite synthèse de ce qui vous attend sur un album qui jouit déjà d'une puissance sonore exceptionnelle (Magnus Líndberg, tout est dit).
Kruger a pris le risque, sur "Adam and Steve", de rallonger un peu plus la durée des morceaux, leur conférant une teinte presque plus "progressive" que sur
"For Death, Glory and the End of the World". Le déploiement des ambiances permis par ces durées un peu plus importantes fonctionne très bien sur certains titres ("Charger", ses côtés presque
Mastodon-esques et ses parties plus mélancoliques) mais devient parfois à peine agaçant : si le final poignant de "Farewell" parvient à faire oublier ses quelques longueurs, un titre comme "Mountain Man" finit par tourner un peu en rond, malgré le petit passage Noise le clôturant. Les titres plus courts, en revanche, restent extrêmement bien ficelés : de "The Wild Brunch" et son "refrain" irrésistible sur cette batterie complètement folle jusqu'au morceau éponyme qui en deviendrait presque inquiétant, Kruger mixe bon nombre d'influences et d'univers différents au service d'une ambiance générale entre le défouloir le plus total et le travail d'orfèvre, tantôt poignant, tantôt menaçant.
"Adam and Steve" est indéniablement une réussite. Les Suisses affirment leur patte musicale au travers d'un brûlot qui nécessitera plusieurs écoutes pour être pleinement assimilé, mais vers lequel on reviendra avec plaisir. Même si certains titres auraient mérité d'être amputés de quelques trentaines de secondes, l'album possède suffisamment de temps forts et de potentiel "live" pour se bonifier avec le temps, et évite l'écueil de la facilité et de l'auto-plagiat avec brio (Cinquième production du combo, tout de même). Une réussite, une confirmation d'un talent déjà bien affirmé, "Adam and Steve" gagne sa place dans le haut du panier des sorties de l'année.
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