Enfin une bonne surprise en ce début d'année ! Surprise car je ne voyais pas Bloodiest revenir aux affaires, surtout après presque cinq ans d'absence discographique et un premier longue-durée excellent mais si particulier que je l'imaginais mal avoir un successeur. Ce groupe issu de différentes formations (dont je ne vais pas refaire la généalogie complète, lisez ma chronique de
Descent si vous souhaitez plus d'informations) avait pourtant signalé qu'il était bien vivant en 2015 en participant en tant que guest à la dernière œuvre de Wrekmeister Harmonies,
Night of Your Ascension. Les choses sérieuses se déroulent cependant ici pour les Ricains, toujours épaulés par le label Relapse malgré un succès qui s'est davantage traduit en estime qu'en ventes.
Et il n'y a qu'à espérer que Bloodiest gagne en popularité avec ces nouvelles quarante-trois minutes, ces dernières se révélant d'emblée comme à la hauteur des souvenirs laissés par leurs grandes sœurs de 2011. Toujours personnelle dans sa mixture entre drone, folk et post-metal, la formation menée par Bruce Lamont (qui montre une nouvelle fois toute la grâce de sa voix de shaman moderne, cf. « The Widow ») renouvelle son style unique juste ce qu'il faut, accentuant la part progressive de sa musique. Là où
Descent fonctionnait par des répétitions enivrantes, la mouture 2015 titre sa force du mouvement, empilant les mélodies telles des canons, jusqu'à des explosions se trouvant soit en fin de titre (« Broken Teeth »), soit à leur suite (le final « Suffer », descendant directement de « Separation »). Un vrai plaisir musical, où chaque écoute se prend à s'attacher à tel ou tel détail, passé inaperçu auparavant et attrapant l'oreille par la suite.
Mais ce qui marque chez Bloodiest, au-delà de moments simplement « beaux » (« The Widow » et « He Is Disease » en tête), est cette ambiance faite de rituels à la fois oniriques et sanglants. Si la troupe parvient à ne jamais tomber dans un poncif permettant de mettre sur ses riffs un nom au dessus des autres, elle me semble proche de Neurosis dans son propos, comme une enfant respectueuse de l'héritage de son père, souhaitant le transmettre sans le recopier. Tour-à-tour rêveur, meurtrier, transcendé et serein, cet album sans titre transporte pourtant aisément, au rythme de ses humeurs, allant jusqu'à donner à ses sentiments humains un rendu mouvant, vibrant, qui fait que j'aime à voir chaque chanson comme un être à part entière.
Impressionnant par sa construction en poupées russes où chaque partie trouve sa place dans l'ensemble et chaque obsession sa logique prise à l'échelle du disque, cette nouvelle œuvre, passée un temps, donne tout de même à reprocher à Bloodiest qu'il tourne un peu trop souvent autour du pot. Passées quelques lignes de force, les va-et-vient continus montrent quelques moments de creux où l'on aimerait que les Ricains se lâchent plus, à la manière de « Mesmerize » qui, malgré son libellé, n'envoûte pas assez. Une fabrique de détails, enthousiasmants pour la plupart, mais parfois en deçà de ce que Bloodiest est capable d'offrir. Ce sera la seule critique faite à ce disque qui donne constamment l'impression de faire résonner les correspondances entre nous et le monde. La marque des vrais poètes, comme l'a dit quelqu'un.
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