Gloson - Grimen
Chronique
Gloson Grimen
Ce qu’il y’a d’incroyable avec la scène Suédoise c’est qu’elle ne cesse jamais de se renouveler et de proposer encore et toujours des groupes inconnus au bataillon qui deviendront grands dans les années à venir, à l’instar des mecs GLOSON qui frappent un très gros coup avec leur premier album. Formé en 2014 à Halmstad, le quintet avait fait parler de lui grâce à un premier EP réussi et une version live de celui-ci sortie peu de temps après, qui confirmait que sa musique passait très bien l’épreuve du feu et du public. S’inspirant de NEUROSIS aussi bien que de ses compatriotes de CULT OF LUNA (d’ailleurs Magnus Lindberg s’est chargé de la production) sa musique prend aujourd’hui toute son ampleur durant cinquante minutes sans-fautes, qui sont mises en valeur par le guitariste/percussionniste qui réalise un travail remarquable qui rend justice à la qualité d’écriture de l’ensemble, celui-ci n’hésitant pas à lorgner à la fois du côté du Sludge comme de celui du Doom et du Post-Metal.
A la fois gras et atmosphérique « Prowler » nous entraîne directement dans l’univers de ses géniteurs via des riffs gras et rampants à la sonorité sombre et mystérieuse, aidés en cela par les différentes voix des membres qui s’accordent entre elles pour renforcer ce sentiment. Portés par une batterie lourde et fine (jouant beaucoup sur les toms pour donner un côté brut et tribal), l’ensemble des instruments restent sur un tempo volontairement bridé se faisant presque suffocants et d’une grande noirceur entre solo déchiré, growl d’outre-tombe et basse massive pour obtenir un rendu incroyablement prenant malgré la durée ce premier titre. Cela sera d’ailleurs une constante tout du long, car hormis « Specter » plus court (et qui montre une facette différente de la batterie avec des passages acoustiques doux et couplés avec du violon et violoncelle, sans oublier l’habituelle explosion électrique), le reste des compos tournera toujours au minimum dans les huit minutes (et même deux dépassent la dizaine) et pourtant malgré la complexité des arrangements (en apparence simples) celles-ci ne sont jamais répétitives ou lassantes, et ne souffrent d’aucunes longueurs ce qui est un véritable tour de force. Ce sentiment est confirmé avec « Fabulist » qui débute de manière écrasante et Doomesque, dont le rendu ne variera pas des masses durant toute sa durée, pourtant en y ajoutant une légère variation au niveau de la batterie (Samuel Karlsson derrière son kit réalise tout du long une prestation impressionnante) ainsi qu’un break salvateur où seule la guitare se fait entendre, les gars arrivent une nouvelle fois à accrocher l’auditeur sans discontinuer pour lui offrir un instantané plus direct et simple que ce qui va suivre.
Car après un début en fanfare la suite va atteindre des sommets de créativité, en premier lieu avec « Antlers » au démarrage légèrement mélancolique et spatial (où là encore le frappeur de la bande s’occupe beaucoup de ses toms), et renforcé par une voix susurrée qui permet aux autres membres de jouer calmement avant de sortir des parties plus explosives et lourdes. Ici beaucoup de variations sont présentes et on n’hésite pas à alterner allègrement entre les différentes influences où l’on passe sans souci de notes guitaristiques glaciales et apaisantes, à d’autres accordées plus bas pour donner du son grave étouffant et presque hypnotique comme avec ce qui va suivre. Place en effet aux deux pièces-maîtresses de cette œuvre gigantesque, avec d’abord « Cringe » hypnotique et sensuel mis en lumière par des nappes de claviers d’une grande sobriété, et où le chant est mis au second rang. Ici comme sur l’ultime plage la voix est presque un faire-valoir, et n’intervient que quand c’est nécessaire ce qui ajoute encore à l’ambiance mystérieuse et obsédante, comme sur « Embodiment » qui clôture les débats. Après une introduction tout en volupté l’ensemble monte progressivement en température, avant l’arrivée du riff principal et de la batterie qui ne changeront pas beaucoup jusqu’à un coup de chaud de courte durée et un retour au calme. Cependant il ne va pas s’éterniser car revoilà déjà une autre explosion qui elle va se prolonger afin d’alourdir son propos et créer quelquechose d’hyper massif jusqu’à ce que le chant se pointe pour les ultimes minutes. Celui-ci déjà discret tout au long de ses prédécesseurs trouve ici son apogée tant il se fait harmonieux et s’allie aux arrangements dantesque des guitaristes qui nous emmènent vers des contrées inexplorées et inattendues, avant d’en terminer par une dernière salve de mélodie et de douceur.
Avec un son naturel, équilibré et profond ce petit bijou est une des grandes révélations de ce début d’année, réalisé par un combo qui ne va certainement pas rester encore inconnu longtemps, car il a tous les atouts pour marquer les esprits. Outre son écriture d’une incroyable richesse et particulièrement fouillée, il possède un dynamisme qui ne faiblit pas tout de la première à la dernière seconde, et montre encore une fois la qualité des signatures du label Art Of Propaganda qui continue de dégoter des formations totalement inconnues mais au talent indéniable et à la créativité exacerbée. Autant dire que cette galette va prendre aux tripes instantanément, mais demandera également un grand nombre d’écoutes pour être totalement assimilée et en saisir toutes les subtilités qui s’y cache et que l’on découvrira progressivement au fil du temps.
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