Blood Of The Wolf avait épaté son monde en 2015 avec son premier full-length
I: The Law Of Retaliation. Sortis de nulle part, les Américains impressionnaient par leur brutalité belliqueuse mêlée à un sens de la mélodie épique remarquable. Du coup, direct dans les découvertes de l'année, en attendant la confirmation. Justement, le combo de Chicago est ressorti de sa tanière en avril dernier un deuxième album dans la gueule,
II: Campaign Of Extermination. Toujours en autoproduction mais les membres ont eux subi pas mal de dégâts puisque seul subsiste le chef de meute Mike Koniglio (chant/guitare, ex-Rellik) autour duquel trois nouveaux prédateurs se sont rassemblés. Illustré par un bel artwork macabre et portant un titre ne respirant pas vraiment le vivre ensemble, je n'avais toutefois aucune appréhension sur le résultat. J'étais même excité comme une pucelle le soir du bal à l'idée d'entendre la suite du premier chapitre ultra prometteur.
Ce que l'on peut déjà en dire, c'est que malgré le renouvellement du line-up aux trois quarts, on reconnaît sans peine le style de la formation. Dès les premières secondes de "Thunder The Drums Of War" qui suivent les bruits de tonnerre de l'intro (pour le coup on repassera sur l'originalité), on sait qu'il s'agit de Blood Of The Wolf. Une qualité rare, surtout pour un groupe récent, qu'il faut mettre en avant. Le combo d'outre-Atlantique joue en effet un style de death metal peu fréquent, sorte de brutal blackened death metal épique et guerrier. Un style qui met l'accent sur deux choses. D'un côté la brutalité, bien mise en valeur par une production ultra musclée faisant la part belle à la batterie très en avant dans le mix. Un peu trop d'ailleurs, en particulier au niveau de la grosse caisse très utilisée sur les nombreuses rafales de double supersoniques. Je trouve également le son des drums trop synthétique et le tout manque de feeling, avec des fois cette impression que le batteur joue tout seul sans se préoccuper des autres. Ça colle néanmoins très bien au côté froid et radical d'une entité qui se veut implacable, supérieure et cherche à en imposer. Pour ce faire, Blood Of The Wolf joue aussi très souvent pied au plancher. Un peu moins que
I: The Law Of Retaliation, certes.
II: Campaign Of Extermination se fait légèrement plus varié, proposant davantage de mid-tempos, de breaks divers ou de touches thrashy. La troisième piste "Beneditio Ultionis: Their Blood For My Glory" ne blaste d'ailleurs jamais et se cale pendant plus de cinq minutes en mode down/mid tempo dissonant. On pouvait s'en douter en regardant la durée des morceaux, plus longue que sur le premier disque. Les deux œuvres font chacune trente-cinq minutes alors que
II: Campaign Of Extermination compte huit morceaux au lieu de dix pour son grand frère. On passe donc en moyenne de 3'30 à 4'25, pas négligeable. Mais foutre Satan, quand même, qu'est-ce que ça défouraille! Attendez-vous à une orgie de blast-beats dévastateurs. C'en est franchement jouissif pour ceux qui, comme moi, vouent un culte au dieu blast. Brutal, le chant l'est aussi. Mike Koniglio nous sort en effet un growl particulièrement puissant, compréhensible et éructé avec une conviction certaine. Le placement généreux dans le mix ainsi que la superposition épisodique avec des intonations un peu plus éraillées aident bien aussi à faire des vocaux un des éléments les plus féroces de la musique du quatuor et un de ses nombreux atouts. La petite réverbération n'était par contre pas indispensable.
D'un côté la brutalité. De l'autre la mélodie. On peut tout à fait jouer une musique à la fois très brutale et très mélodique. Blood Of The Wolf le démontre de façon convaincante. Le truc des Américains en fait, c'est, sur ses blast-beats, de placer des riffs en tremolo aux mélodies marquées assez simples qui ont le don de rentrer en tête facilement. Voilà l'autre grande qualité de la formation, le feeling mélodique. S'en dégage une atmosphère épique qui donne envie de lever le poing et conquérir le monde. Plus raffiné, on remarque également des notes de tristesse et de nostalgie sur certains motifs ("The Sword Is My Light And My Salvation" à 1'57, "With Fire And A Thousand Flashing Blades" à 4'12...). Encore une fois, le combo blast-beat / tremolo mélodique appuyé prouve à quel point il peut s'avérer redoutable tant que l'on maîtrise l'art de la mélodie qui tue, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Pour compléter le tableau, la formation rajoute à son riffing pas mal d'influences black metal (débuts de "The Sword Is My Light And My Salvation" et "With Fire And A Thousand Flashing Blades", "A Sermon Of Slaughtered Foes" à 1'35, etc.) et un peu de thrash ( "The Sword Is My Light And My Salvation" à 1'17, 2'45 et 3'33, l'ouverture de "With Fire And A Thousand Flashing Blades" puis à 1'28, "A Sermon Of Slaughtered Foes" à la cinquième minute...) que l'on trouve aussi dans certaines rythmiques type tchouka-tchouka. Les Ricains n'ont par contre toujours pas décidé de se mettre aux solos puisqu'un seul apparaît sur "With Fire And A Thousand Flashing Blades", qui plus est trop bref alors qu'il démarrait plutôt pas mal.
Clairement, les mecs font de gros efforts sur le riffing. Ils se décarcassent quand beaucoup de groupes brutaux ne jurent que par la vitesse d'exécution ou la puissance de la production. Blood Of The Wolf a compris qu'il n'existait pas d'album marquant sans grand riff. J'aime ainsi beaucoup leur vision du metal extrême. Du bourrin mais qui reste largement musical, avec tout un tas d'influences. Un peu comme si Deströyer 666 faisait du brutal death en s'acoquinant avec des deatheux type Kataklysm (quand ils valaient encore quelque chose), Temple ou Arghoslent tout en se rapprochant de purs blackeux européens tels que des Dark Funeral, Satyricon, Marduk ou Immortal de la grande époque. La vieille scène melodic black/death suédoise (Dissection...) a dû aussi jouer un rôle pour les Américains, tout comme le death metal polonais (Vader, Behemoth...). Mais si la qualité est bien toujours au rendez-vous sur ce deuxième chapitre, je me dois de tempérer les louanges. Sans
I: The Law Of Retaliation, j'aurais bien sûr déjà adoubé
II: Campaign Of Extermination sans condition. Sauf que le deuxième album n'atteint pas le niveau de son prédécesseur et se fait globalement moins inspiré. On le sentait venir dès "Thunder The Drums Of War". Comme je l'ai écrit plus haut, on y reconnaît tout de suite la patte du groupe. On remarque aussi que le groupe a déjà fait mieux en terme de mélodies mémorables. Et en effet, Blood Of The Wolf n'arrive pas toujours à retrouver l'impact de son premier opus. Les excellents "The Sword Is My Light And My Salvation" et "With Fire And A Thousand Flashing Blades" se démarquent nettement en pouvant prétendre à figurer sur le grand frère. Les autres titres s'avèrent plus ou moins éloignés de ce niveau. Il n'y a aucun morceau vraiment mauvais, quoique je ne sais toujours pas si j'aime bien "Beneditio Ultionis: Their Blood For My Glory", le titre le plus lent mal placé dès la troisième piste, ou s'il me fait chier. Je vais finir par pencher sur la deuxième solution même si la lead principale en tremolo a un effet lancinant et hypnotique pas désagréable. C'est bien que le groupe diversifie un poil plus son propos, on ne va pas leur reprocher d'éviter de trop se répéter. Mais franchement, la seule chose que l'on attend quand ça se calme, c'est que ça blaste à nouveau sur des tremolos mélodiques épiques en diable! Aucun titre vraiment à jeter donc, cependant on compte bien quelques riffs plus génériques que l'on remarque forcément plus vu la qualité du reste, et surtout on croise davantage de moments dispensables. Les semi-blasts moches au démarrage de "Erupting Volcanic Wrath", le riff d'intro blackened bof ou le break genre "hey hey hey" à la grosse caisse de "Scorched Earth" Ceremony", le dernier morceau "A Sermon Of Slaughtered Foes" pourtant bien épique et introduit par de l'acoustique pas vilain mais dont le premier riff mid-tempo banal tombe à plat, le son de batterie trop plastique gâche la meilleure mélodie et qui traîne de toute façon trop en longueur, pour donner quelques exemples.
Déception alors au bout du compte? Je n'irai pas jusque-là tant la formation ricaine se montre méritante en se cassant le cul pour proposer quelque chose de précieux et supérieur, qui plus est en auto-production.
II: Campaign Of Extermination se place certes distinctement en-dessous de
I: The Law Of Retaliation qui en avait estomaqué plus d'un, surtout de la part d'un groupe inconnu. L'effet de surprise ne jouant plus, on attendait forcément beaucoup de Blood Of The Wolf. Au regard du potentiel des Américains, on sait donc qu'ils peuvent faire mieux, en particulier sur ce point de la mémorabilité des mélodies, moins inspirées ici dans l'ensemble. Si l'on compare par rapport à ce qui se fait ailleurs, le combo de Chicago reste par contre largement au-dessus de la masse. Son style peu commun, son feeling mélodique et épique rare, son riffing travaillé, l'intensité jouissive de son death metal malgré une approche un peu plus nuancée, le groupe conserve toutes les qualités qui l'avaient révélé il y a trois ans. Tout cela demeure plus que recommandable. Car si vous aimez votre death metal rapide, brutal, carré, moderne (dans le bon sens), bien produit, aux mélodies travaillées, aux ambiances épiques et guerrières et que des touches blackened ne vous effraient pas, vous ne pouvez décemment pas passer à côté de Blood Of The Wolf.
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