Tempestarii - Chaos at Feast
Chronique
Tempestarii Chaos at Feast
Dites voir, les blackeux de chez nous, ça vous dérangerait vraiment d’aller honorer un label français, profondément artisanal, tenu qui plus est par une artiste de talent qui s’efforce de signer des groupes originaux et surprenants ? Je me permets de vous poser la question, étant donné que les sorties de Transcendance restent loin de s’attirer autant de succès que mérité. On vous met sous le nez un groupe formé par un ancien de SubRosa, qui propose un album court, intense et personnel, et vous, vous faites la fine bouche. Vous mériteriez une reformation de Nehëmah avec Hreidemarr au chant, tiens.
Je râle un peu, mais sans déconner, il y a de quoi. Une pyramide maya perdue dans un tempétueux chaos, au sommet de laquelle s’ouvre un terrible vortex, ça ne vous attire pas ça ? Une oreille de jetée, et tout le reste suit pourtant. Tempestarii fait dans le bouillonnant, le dominateur, l’écrasant. La production toute taillée dans l’obsidienne, épaisse et acérée à la fois, vous saisit au col d’entrée de jeu. L’album se dévoile dans une homogénéité de son impressionnante. Il se dégage quelque chose de très ombrageux, de monumental. Votre oreille prendra sûrement un peu de temps à démêler tout ça à la première écoute, à discerner les lignes de guitare et les mélodies. Les blasts réverbérés sont eux aussi méchamment hostiles, martèlement lointain et redoutable qui participent à ce grand tourbillon sonore.
Tempestarii reste dans ses hauteurs. Il ne se donne pas réellement la peine de descendre à notre échelle. Tout ici évoque des sommets hors d’atteinte, où la matière cesse d’être pour laisser place à l’Ailleurs où trônent d’insoupçonnables puissances. La musique du groupe donne l’impression de venir se fracasser depuis l’extérieur sur les maigres barrières atmosphériques qui séparent encore notre petit monde bien étiqueté de l’inconnu total qui s’étend au-dehors. Quelque chose, là-haut, en a eu assez de la présomption de ces petits bipèdes prétentieux, et a décidé de venir mettre des coups de boutoir à nos repères, histoire de nous rappeler à notre juste place.
L’entité ne manque à aucun moment de subtilité, malgré l’intensité de ses assauts. Les mélodies en trémolo-picking sont construites sur des motifs relativement simples en eux-mêmes, mais élevés très haut grâce à des rythmiques cyclopéennes en arrière-plan. Voyez la fin de « Deathwards Xibalba », où les leads presque épiques grimpent, tournoient, pour finalement se taire et s’élever à nouveau quand d’énormes accords massifs viennent s’écraser sur nos fronts. Tempestarii serait presque classable dans une hypothétique case « black metal atmosphérique brutal ».
Quatre pistes longues, menées très majoritairement blast battant, soutenues par une voix distante et menaçante manifestement fatiguée de devoir retenir les coups que méritent pourtant bien les faibles créatures d’en-bas. Et pour majestueuse que soit la musique de Tempestarii, elle se montre capable d’une vraie malice. Sur « Our Spears Point to Heaven », la même mélodie en forme de chute nous rattrape à chaque fois que nous pensons atteindre les tréfonds de l’abîme, pour mieux nous laisser choir à nouveau. Une forme de sadisme, mais non pas petitement mesquine. Plutôt de l’ordre de l’anathème qui estime qu’un simple renversement ne suffirait pas à punir nos méfaits. Il faut que la chute soit longue, raide, brusquement interrompue, puis abrupte à nouveau. Que nous ayons le temps de voir le terme venir.
Le pinacle de l’album arrive sur « Aeternus », avec sa mélodie pantocratique et ses incantations déclamées. La toute-puissance se manifeste en un ouragan de mélodies arpégées qui culminent finalement, après une longue chevauchée impitoyable, sur des dorures émaillées d’onyx proprement sublimes, faites de notes entremêlées et de murmures. Grandiose.
L’album s’achève en laissant une certaine empreinte dans les oreilles et l’esprit. L’écoute s’est faire particulièrement immersive. Le son est si dense et si vaste qu’il emporte réellement avec lui à la rencontre de ses entités salvatrices décidées à mettre un terme aux inepties humaines. De SubRosa, le bassiste a ramené un goût pour le son écrasant et les sons épais, mais mis cette fois au service de colère et de la fureur venue de plus haut. Chaos at Feast est une très belle pièce, qui ne souffre pas de réel défaut, mais qui pourrait exploser encore davantage. Encore un peu d’intensité, des riffs plus cruels encore, et nous pourrions bien être face à un troisième album proprement référentiel.
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