Hailz PENDULUM ! C'est une véritable satisfaction pour moi que de pouvoir vous permettre d'approfondir l'univers de votre groupe dans cette interview ainsi que de développer un peu les quelques données qui s'échappent furtivement de votre opus Les Fragments du Chaos sorti en janvier dernier qui ne laisse guère filtrer autre chose que l'immense noirceur avec laquelle vous semblez tous avancer dans la vie de tous les jours et que vous libérez à travers votre Black Metal mélancolique et nostalgique porté par des textes justes.
A – Genèse du groupe
1- Vous ne faites pas parler pas beaucoup de vous sur les médias habituels du Black Underground et sur ses nombreux réseaux du net français. Pas de photos, très peu d'interventions... tant mieux ! Si je suis bien content de ne pas avoir à faire à l'énième groupe nombriliste et poseur au possible, pourriez-vous tout de même détailler pour Thrashocore les circonstances de la formation du groupe ?
Death : Après la sortie d'APOPTOSIS j'ai commencé à composer, mais mon inspiration m'amenait vers des musiques plus sombres, plus black. On a décidé de créer un groupe à part pour ne pas polluer APOPTOSIS car on s'orientait vers quelque chose de plus brut, plus primaire.
2- Je sais que vos musiciens jouent dans d'autres projets tels que APOPTOSIS pour votre guitariste, MIND ASYLUM pour votre chanteur... quel est votre parcours, chacun, au sein de cette vaste scène Black Metal et qu'est-ce qui a fait arriver tout le monde à PENDULUM, au moins pour un temps ?
Death : Winter, Naja Atra et moi, nous sommes dans APOPTOSIS ; on a gardé ce trio de base car on bosse bien ensemble et on possède le même état d'esprit : "La musique avant tout." Cette fois on voulait quelque chose de plus sincère, de plus primaire, les émotions mises en avant et pour ça des textes en Français. On a pas voulu se précipiter et on a mis du temps avant de trouver le bon chanteur pour représenter PENDULUM, un soir j'ai pensé subitement à Errance de MIND ASYLUM, un gars avec qui nous entretenions d'excellents rapports ; et la suite a été extrêmement rapide, ce mec est vraiment un incroyable chanteur, On lui a donné carte blanche et il s'est approprié les morceaux en les transcendants, la justesse du ton et de ses placements étaient vraiment impressionnants comme si il avait lui même écrit les paroles en sachant quand et comment les interpréter.
3- Restons dans le domaine musical « passif », avez-vous subit des influences pour PENDULUM ? Des groupes qui vous ont marqués musicalement au point d'être sous leur joug durant la composition de cet opus ?
Death : Oui et non, il ne faut pas se voiler la face il y a forcément une influence dans le jeu de quelqu'un, durant la composition de PENDULUM, j'écoutais en boucle 3 albums en particulier :
ANKRISMAH - Dive in the abyss
TERATISM - Via Negativa
LYCANTHROPY'S SPELL - Forest of Misanthropy
Je ne saurais dire si cela à directement influencé ma musique.
4- Tant qu'on y est, un petit avis sur la scène Black Metal actuelle ? Y-a-t-il des groupes avec lequel vous êtes liés, pour une raison ou pour une autre ? Voire même des groupes que vous détestez ?
Death : La scène actuelle est très prolifique et il y a en France du très bon ainsi que plus au nord de l'Europe et ailleurs dans le monde, je veux dire par là que de nos jour de très bonnes choses sortent, on est loin des phrases que j'entends régulièrement :
"Le black est mort"
"Tout ce qui sort n'apporte rien comparé à DARKTHRONE et la 2° vague Norvégienne"
La meilleure :
"Je télécharge car au milieu de tous les merdes qui sortent il y 5 % de groupes qui méritent qu'on se penche dessus et dans ces 5 % une petite partie mérite l'achat d'un CD donc je télécharge et j'écoute 10-20 fois un CD avant de l'acheter pour être sûr de mon investissement"
Je préfère qu'on me dise simplement je télécharge parce que j'ai pas envie de dépenser mon fric dans un CD et pas une excuse de ce genre, ce qui serait honnête et ne me dérangerai pas, je ne vois pas vraiment le plaisir d'acheter sans la surprise de la découverte, mais je suis peut être à part.
Pour finir je dirais que le principal problème de la scène de nos jours c'est son public, tu es bien placé pour voir le monde qui se bouge pour les concerts de petite et moyenne envergure, c'est la mort lente de pas mal d'associations et labels qui est en train de se passer.
Nous sommes évidemment liés à APOPTOSIS mais aussi à MIND ASYLUM, Winter a d'ailleurs écrit les paroles du prochain album de MIND ASYLUM. A part ça, pas de lien particulier avec d'autres groupes.
... ensuite, on va jouer à un petit jeu : je cite un nom de groupe qui me semble en rapport -proche ou plus éloigné- avec PENDULUM, et vous me dites ce que vous en pensez en quelques mots.
BURZUM : Death : Pas dans ma discographie même si c'est un très grand groupe, je n'ai jamais été vraiment attiré.
NYKTALGIA : Death : Comme Burzum, pas dans ma discographie.
SILENCER : Death :
Death Pierce Me est simplement traumatisant.
5- Dernière question dans ce sens, toujours musicale donc, y-a-t-il eu éventuellement des influences hors Black Metal et a fortiori hors Metal pour la genèse des Fragments du Chaos ?
Death : Je ne pense pas.
B – Accouchement des compositions
6- Il y a un certain sens de la mélodie dans votre riffing... dans quelle mesure celle-ci doit-elle être importante dans le Black Metal ? J'ai tendance à penser qu'elle vous sert à certains moments mais qu'elle a tendance à être trop envahissante dans d'autres... du coup, comment gérez-vous l'alternance entre mélodie et dissonance dans une composition ?
Death : Hormis la musique bruitiste expérimentale, toute musique est mélodique, la progression harmonique d'un morceau est en soit une mélodie qu'elle soit sinistre ou joyeuse. La mélodie c'est un ensemble de notes de différentes hauteurs, la musique est l'addition d'une ligne mélodique et d'un rythme, donc la mélodie est obligatoire dans toute musique.
Si certaines lignes mélodiques nous desservent je dirais que c'est une question de goût, tu parles de certains morceaux comme clairement moins bons que d'autres et pourtant j'ai le retour d'autres personnes qui ont un avis diamétralement opposé au tiens.
La composition dans PENDULUM n'est pas réfléchie mais spontanée, je ne me dit jamais que mon morceau sera construit de telle manière (INTRO - COUPLET - REFRAIN - etc ...), je ne décide pas d'être dissonant ou mélodieux c'est un ensemble qui se forme naturellement.
7- Composer pour PENDULUM, est-ce être dans un état second, est-ce être instinctif ou est-ce être méticuleux ?
Death : C'est être instinctif dans mon cas mais pour ce qui est de Winter ou le chanteur c'est être dans un état second, quand ils sont dedans ils sont coupés du reste du monde, je le sais car je vois comment Winter procède et Errance m'a dit que les textes et la musique l'ont vraiment touché et habité, je pense que ça se ressent dans son chant.
8- D'ailleurs, comment s'est passé le travail de composition du groupe ? J'ai crû comprendre que vous étiez handicapés par la distance entre membres, comment avez-vous procédé pour fournir ce travail de longue haleine et cohérent à quatre ? Peut-on envisager de voir un jour un concert de PENDULUM ? Travaillez-vous dans ce sens ?
Death : Les membres sont éparpillés en France l'enregistrement se fait en home studio pour la guitare et la basse, en studio pour le chant, la batterie et le mixage (Dithering Sound Studio dans notre cas pour le mixage / mastering).
D'abord la guitare, la basse et les textes. Ensuite la batterie, ce qui à été rapide.
Puis le chant ce qui à été le plus laborieux à mettre en place (problème pour trouver le chanteur) mais extrêmement rapide dans l'exécution.
Finalement Le mixage/mastering.
Chacun ayant eu carte blanche il fallait surtout trouver des personnes ayant les mêmes affinités musicales, ce qui à été notre cas.
Les concerts sont très compliqués à mettre en place car il faut pouvoir se retrouver pour répéter et il faut un sacré niveau pour monter sur scène, bien composer, enregistrer c'est une chose mais maîtriser parfaitement un set sur scène c'est autre chose, c'est bien sûr quelque chose qu'on envisage mais ça va demander du travail et de l'organisation donc du temps.
C – Textes et concepts
9- Vous semblez assumer totalement cette faiblesse d'un être humain « fantôme » omniprésent dans vos textes, à l'image de cette troublante « prière » dans « La nature » (« Ayez pitié de mon âme, ayez pitié de moi
»). L'homme, le « je » égoïste à travers lequel vous vous personnalisez tous est en permanence au bord de la rupture. Bien que certaines paroles soient à mon sens moins pertinentes, vous ne donnez pas pour autant dans cette misanthropie éculée et risible diffusée par beaucoup trop de groupes soi-disant en mal de vivre, il ressort de vos textes une certaine nostalgie de la jeunesse, des relations avortées, du passé. Est-ce comme cela que vous vivez aujourd'hui ?
Winter : Pour ma part je ne parlerai pas de faiblesse, chaque texte révèle une prise de conscience libératrice. Le "Je" est simplement là pour que chacun puisse s'identifier. Je ne vis pas dans le passé mais d'une certaine manière il fait parti de mon présent et forcément de mon futur.
10- Dans sa relation avec le miroir (« Le verre »), dans l'égoïsme de ses textes, dans la solitude du personnage que vous inventez, je rapprocherais votre premier opus Les Fragments du Chaos et son concept général d'une œuvre littéraire telle que celle d'Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray. Votre entité me semble très proche du protagoniste de l'auteur irlandais... que pensez-vous de cette comparaison ?
Winter : Je ne connais pas cette œuvre.
11- Dans le même ordre d'idées, vous êtes vous inspirés d’œuvres littéraires pour la composition de vos paroles, de même que pour certaines ambiances établies par vos riffs ?
Winter : Non.
12- Restons sur les textes, à mon avis la pierre angulaire de votre sortie : si vous exprimez et assumez entièrement vos peurs, est-ce que vous avez des fantasmes autre que « Je veux qu'on ne m'oublie pas, je veux rester dans les mémoires, gagner ce seul combat!
» et même des vices à exprimer à travers PENDULUM ?
Winter : On y lira ce qu'on veut bien y lire, mais pour moi il n'y a pas de peurs ni de fantasmes. Tu cites le texte « La nature » on peut voir ce texte juste comme l'ordre naturel des choses avec un être doté d'une pensée, de sentiments, qui subit sont déroulement avec ses propres mots, sa propre vision de ce qu'il est en train de vivre et ressentir.
13- Vos titres, très incisifs et directs, jouent beaucoup sur la sensation pure (« La corde », « La poudre », « La folie »)... qu'est-ce qui pousse à associer une sensation, dans toute sa simplicité, à un ensemble musical cohérent, en bref, comment parvenez-vous à nommer un morceau ?
Winter : Le nom de chaque piste à été choisi suivant l'élément central du texte, quelque chose de clair et direct.
14- Dans le même ordre d'idée, une question à laquelle il me semble difficile de répondre à la simple lecture des textes, y-a-t-il un ordre « conceptuel » des titres (représentant différentes étapes d'une vie ou un mécanisme intellectuel amenant vers la folie) ou avez-vous privilégié le musical pour la liste des morceaux ?
Winter : Il n'y a pas d'ordre conceptuel hormis « La Folie » qui se devait de clôturer cet album.
15- Parlez moi de ce concept central dans votre musique qu'est le suicide. Courage ultime ou lâcheté finale ? Vous sentez-vous proches de cet état d'esprit assez totalitaire, avez-vous connus des gens qui ont choisi de mettre fin à leurs jours brutalement ?
Winter : Le concept central n'est pas le suicide, le suicide n'est certainement pas le but, la mort du personnage ne découle pas d'une volonté de mettre fin à ses jours. Dans "Le verre" il se trouve en face d'un miroir et lui réclame vérité, il veut enfin qu'il puisse refléter sa véritable perception ce qui le conduit vers une mort certaine, c'était son prix à payer pour enfin exister en étant lui même. Pour "L'acier" au début il est juste spectateur et il décide par une prise de conscience de ne plus l'être et de devenir acteur de sa vie et donc de sa mort. Ils cherchent tous d'une certaine façon d'être maître de leurs pensées ou de leurs actes.
D – Artwork et production
16- Que représente votre artwork, sorte de pieuvre squelettique assez minimaliste ? En quoi fait-il, pour vous, la différence avec ces nombreux artworks noirs et monochrome du Black Metal en général ? De même, a-t-il une signification particulière pour vous ou même une signification philosophique que vous voudriez exprimer dans cette interview ?
Winter : PENDULUM est centré sur l'être humain, son esprit fragile et la mort, donc quoi de plus représentatif qu'un crâne humain ? Dans le livret il y a d'autres images représentant d'autres squelettes, d'autres morts, d'autres histoires.
17- Aujourd'hui, avec un certain recul, que changeriez vous à la texture de votre son ? J'ai regretté dans ma chronique un côté un peu trop synthétique de la batterie et une trop grande mise en retrait de la basse, qui aurait à mon sens du plus peser sur l'atmosphère lourde et écrasante que vous essayez d'instaurer. Qu'en pensez-vous ?
Winter : Pour la basse c'était un manque de moyen, une basse de mauvaise qualité tout simplement, effectivement je regrette qu'elle ne soit pas plus présente.
Death : Pour la batterie on a justement essayé d'avoir un son le plus naturel possible pas de trig pas de compression ou autre artifice, juste une reverb dessus, je ne la trouve pas synthétique personnellement, le problème de la basse se retrouve lié avec la caisse claire aussi (c'est du moins ce que m'expliquait le batteur) on a essayé un autre mixage mais c'était pas bon même si la basse ressortait bien cette fois.
E – Questions annexes
18- Quelles sont ces « catastrophes que je ne peux décrire »
auxquelles vous faites références dans « La Folie » ? Faites-vous référence à l'actualité récente ou bien à des éléments marquants de votre vie passée ? Au-delà de ça, vous préoccupez vous de l'actualité ou même des « événements passés » pour l'écriture de vos textes ?
Winter : Pas forcément de catastrophe en particulier ou de lien avec l'actualité. Il y a parfois des scènes qui marquent les gens et qui laissent des empreintes indélébiles.
19- J'ai pu constater avec joie et une certaine nostalgie moi aussi que vous rendiez hommage à Jeff de Chapel of Ghouls dans votre pochette. Que représentait cette personnalité de la scène Black Metal française pour vous ? Je glisse tout de même un petit compliment, en imaginant que si il était encore de ce monde, votre album lui plairait beaucoup ! Avez-vous d'ailleurs eu l'occasion de lui faire écouter des brouillons de votre disque ?
Death : On en a pas eu l'occasion mais on était très attaché à son travail et sa personne on suivait régulièrement son émission et on l'appelait assez souvent à l'antenne. Il a fait beaucoup pour le black Français et notamment la possibilité pour pas mal de groupe de se faire entendre par le biais de sa radio, que ça lui plaise ou non tu lui envoyais ton CD, tu passais à l'antenne. On a pas eu l'occasion de lui faire écouter de brouillon on lui disait à chaque fois "on te fera écouter un truc fini pour ne pas te gâcher le plaisir", dommage qu'il ne soit plus là, il nous manque.
20- Pourquoi ne pas avoir fait le choix de la démo, avant la sortie du full-length ?
Death : Parce que c'était suffisamment mature pour faire quelque chose de plus abouti qu'une démo même si je ne suis pas contre ce format qui à un côté UG très appréciable.
22- Est-ce que PENDULUM est destiné à l'album unique (comme le laisse présager ces riffs et cette atmosphère qui sentent fort la libération) ou bien pensez-vous trouver l'inspiration pour de futurs opus ? Avez-vous déjà des projets dans ce sens ?
Death : Certainement pas un album unique, mais ça demande du temps de faire quelque chose de correctement abouti, et puis il y a APOPTOSIS à ne pas mettre de côté.
23- Les derniers mots sont pour vous, si vous souhaitez apporter des précisions ou aborder des points sur lesquels je suis resté muet. De mon côté, je vous remercie d'avoir pris le temps de répondre à mes questions et vous souhaite sincèrement le meilleur pour la suite, que j'espère fertile.
On aime pas particulièrement les interviews ou la promo à outrance mais celle-ci était vraiment intéressante, donc merci à toi pour tes questions et ton investissement.
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