Heir pour l'album "Au Peuple De L'abîme"
Interview
Heir pour l'album "Au Peuple De L'abîme" Entretien avec Matthieu (Guitare), Maxime (Guitare) et François (Basse) (2017)
1. Salut les gars, tout d’abord bravo pour cet excellent premier album et de prendre un peu de temps pour répondre à ces quelques questions, tout d’abord pour commencer pouvez-vous me raconter la création du groupe ?
Matthieu : Merci, on a apprécié ta chronique de l'album, qui en montre une réelle compréhension.
Maxime : HEIR est à la base le projet de Matthieu (Guitare) et Diego (Batterie), que nous (moi, François (Basse), et Loïc (Chant), qui a quitté le groupe il y a quelque mois), avons rejoint rapidement, et nous avons réellement commencé à travailler en Septembre 2015. Le postulat du groupe était que l’Homme a hérité d’une Terre qu’il ne mérite pas. Nous avons commencé à composer très vite, et nous avons commencé à cerner une direction musicale du groupe, autant au niveau des ambiances que des riffs.
2. Le projet et concept du disque est très ambitieux, pouvez-vous l’expliquer pour nos lecteurs ?
Maxime : Chaque morceau est une histoire, un constat, une expérience de chute, d'échec, selon un point de vue différent. Tous ces textes traduisent la déchéance de l'Homme, qui n'apprend rien de ses erreurs, qui reste cette créature cupide et si égoïste. L'artwork par exemple représente cette notion à travers Auguste, premier empereur romain, qui incarne la chute d'un système, la république romaine, oligarque, au profit d'un système autocratique, l'empire romain. Ce nouvel empire se reconstruit sur les ruines bancales de l'ancien système, créant un semblant de nouvelle société tout aussi malade que la précédente. C'est un cycle qui s'est répété de nombreuses fois et qui se répète encore aujourd'hui. Nous avons vu cet album comme un tout uni, pour ne pas nuire à la cohérence et à l'ambiance des titres. Nous avons d'ailleurs viré ce qui devait être l'intro au dernier moment parce qu'elle n'avait pas sa place selon nous dans cet album.
3. Pourquoi ce choix de nom pour le groupe ? Que signifie-t’il ?
Matthieu : Le choix du nom s'est fait après pas mal de réflexions, c'est quelque chose qui n'est clairement pas venu facilement (généralement quand on s'occupe d'autre chose que de la musique on plante souvent). Le choix s'est porté sur ce nom parce qu'il est plein de sens et est très cohérent vis-à-vis des thèmes abordés par le groupe. "L'homme a hérité d'une terre qu'il ne mérite pas", "Nous les faibles, avons hérité de la terre", autant d'expressions qui justifie le nom du groupe. Ce nom est l'expression d'une honte, celle que l'on a, que l'on porte sur l’espèce humaine pour son incapacité de bien se comporter avec ses pairs, son environnement, tout ce dont elle a hérité et qu'elle est incapable de respecter.
4. La Grèce antique et son histoire sont très présente au sein de l’album, qu’est-ce qui vous fascine tant chez elle ? Y’a-t-il d’autres mythes, légendes ou écrivains qui vous ont influencé ?
Matthieu : "Très présente" serait pas le terme que j’emploierai, finalement les seules références à la Grèce antique sont dans "L'Heure d'Helios" et "Meltem", et... ben ce ne sont que des références. Si elles ont un sens, bien entendu, ces références ont peu d'importance face aux paroles. Ce choix est dû d'une part à l’esthétique "antique" qu'on a lié à l'album, et ce choix est dû au fait que les personnages/situations/croyances/etc éloignées de nous temporellement sont plus à même de revêtir une symbolique forte et "accessible", du fait qu'on en soit détaché. Helios aurait pu être remplacé par n'importe quelle figure de pouvoir déchue, Meltem par n'importe quel vent, c'est juste une manière de rendre l'album un tout petit moins ancré dans la réalité. Il en est de même avec la pochette représentant Auguste : avec lui Rome est passé d'une oligarchie à une autocratie, "Les pages tournent, les maux ne changent pas". On aurait pu avoir une pochette ayant pour thème la révolution française ou n'importe quel après-guerre au Moyen-Orient le message aurait été le même.
5. Comment s’est passé le processus de composition ? Tout était-il déjà prêt lors de l’arrivée au studio ?
Maxime : Oui, nous avions les morceaux écrits, et maquettés. Nous ne composons pas en studio, nous écrivons chacun de notre côté, nous envoyons les maquettes et partitions aux autres membres du groupes qui le modifient si nécessaire, et si nous sommes d’accord sur un morceau nous le jouons. Durant les répétitions nous ne modifions presque rien, nous jouons surtout sur l’intensité de chaque partie, sur l’interprétation, plutôt que sur l’écriture.
6. Le côté brumeux et aérien de la production renforce le mystère autour de chacun des titres, ce choix était-il voulu au départ ?
Matthieu : Au départ, nous n’avions pas vraiment d’idée globale de comment l’album devait sonner, c’est un choix qui s’est construit au cours de l’enregistrement et du mixage. Asgorn (Silent Ruins studio) est l’artisan du son de l’album. Si nous avions des idées concernant des éléments précis, comme un son de batterie plutôt naturel, sans trigger, un son plutôt compromis entre efficacité et ambiances (même si effectivement ces dernières sont favorisées), c’est pendant le processus que les décisions ont été prises. Si nous savons ce que nous voulons en termes d’ambiances et que les morceaux sont fixés, nous acceptons aussi le fait que dans le domaine du studio on soit plus compétent que nous. Les ingés sons qui participent à l’album sont artisans de ce qu’il sera finalement, et leur marque dans tous les cas est présente, et c’est dans l’acceptation de cela que le son de l’album est le fruit (toutes mesures gardées) de notre vision de notre musique mais aussi de celle d’Asgorn. La volonté de faire un album qui favorise l’immersion plutôt que la compréhension immédiate de tout ce qui se passe a toutefois guidé sa conception.
Maxime : Nous ne voulions pas un son qui soit trop facile à aborder, par peur de tomber aussi dans quelque chose trop classique et déjà-vu, mais plutôt quelque chose de massif, et brumeux justement. Ce n’est pas forcément facile à la première écoute, mais dès qu’on surpasse cela, il y a une satisfaction d’avoir « dompté » ce côté retors, une sorte de récompense personnelle pour l’auditeur.
7. La pochette est absolument magnifique, et en total raccord avec la musique, qui s’en est chargé ?
Matthieu : C’est Cäme Roy de Rat qui s’en est chargé, nous avons été mis en contact avec lui via LADLO et ce fut une collaboration dont nous sommes pleinement satisfaits. Il a su représenter parfaitement les concepts que nous lui avions confié, et effectivement, la symbolique utilisée est totalement en accord avec l’album et les thèmes qu’il aborde.
8. Bien que chacun des morceaux oscille aux alentours des huit minutes, on ne ressent jamais de lassitude tant on est happé au fur et à mesure des écoutes, cette longueur était-elle voulue au départ, ou est-ce le hasard et l’inspiration qui ont fait leur œuvre ?
Maxime : Nous ne nous sommes jamais dit « on veut des morceaux de minimum 6 minutes ». C’est venu comme ça, selon l’inspiration de chacun effectivement. Cependant c’est à relier à nos influences, beaucoup des groupes que nous écoutons produisent des morceaux longs, immersifs, et cela déteint forcément sur notre musique. Il me semble aussi qu’un morceau plus long permet de mieux rentrer dedans, on a le temps de s’adapter à l’ambiance, au tempo, aux mélodies, et je trouve que c’est bien plus prenant.
Matthieu : On est trop influencé par des groupes de Doom, de Sludge et de Post-Hardcore dans HEIR pour faire des morceaux courts.
9. Le choix du Français pour les textes est une excellente idée, car outre le fait de leur qualité d’écriture ils permettent de mieux rentrer dans l’univers musical. Comment cela s’est-il effectué ? Est-ce uniquement votre chanteur qui s’en est chargé ?
Matthieu : Tu as bien cerné le pourquoi de ce choix, car le choix du français s’est fait dans un souci de profondeur des paroles et de cohérence, au regard des paroles fournies sur la démo. C’est d’ailleurs avec l’arrivée du français que l’on a commencé à écrire à plusieurs. L’écriture des paroles a été l’affaire de Loïc et moi, même si c’est son écriture qui est la plus présente sur l'album. L’écriture en français a permis aussi l’arrivée de paroles bien plus significatives à des niveaux plus personnels; et par la compréhension bien plus avancée de tous les membres du groupe des paroles, l’intériorisation de ces dernières et la manière dont on vit la musique en tant que groupe en concert ou en répétition n’est plus la même. L'usage du français, en plus de servir au mieux notre propos, a permis de rendre chaque interprétation de chaque morceau bien plus forte, la charge émotionnelle mise dans un concert semble être bien plus forte maintenant, même pour ceux qui n'ont pas participé au paroles, et c'est une vraie satisfaction que la parole d'un seul au nom du groupe soit portée sans concessions par chacun.
Maxime : Oui, nous-mêmes on se sent plus proches du texte, pour moi par exemple qui ne participe pas à l'écriture je suis en accord avec les messages et les idées véhiculées, je trouve ça très important de ressentir le texte autant que la musique.
10. Vous êtes signés chez Les Acteurs de l’Ombre, dont on ne cesse de vanter la qualité de son catalogue, comment vous êtes-vous retrouvés chez eux ?
Maxime : Ils nous ont contacté quelques semaines après la sortie de notre démo, "Asservi", et nous ont proposé de participer au split avec IN CAUDA VENENUM et SPECTRALE, que nous avons donc rejoint. C'est clair que c'est un label qui a acquis une grosse notoriété, et qui est devenu un gage de qualité au fil des années.
François : Suite à la sortie du split sur Emanations, on était restés en contact avec LADLO, donc dès lors qu'on a eu suffisamment de matière pour sortir un album, on leur a envoyé tout ça sous forme de maquettes, pour lesquelles ils ont manifesté un certain intérêt, qui s'est définitivement confirmé suite à l'enregistrement. Donc on peut dire que ça s'est fait de manière assez naturelle !
Matthieu : Comme toutes les mauvaises blagues cyniques, ils nous ont trouvé sur internet.
11. Malgré sa jeunesse HEIR dégage une impression d’unité, de force et de cohérence, êtes-vous d’accord avec cela ? A quoi est-elle due selon vous ?
Matthieu : C'est l'impression que l'on donne vu de l’extérieur parce qu'on propose un produit fini, mais on l'obtient en étant que rarement tous d'accord sur la marche que nous avons à suivre. Je ne vois pas trop le rapport avec le fait qu'on soit jeune
Maxime : Après le fait qu'on soit rarement d'accord me semble être un avantage, parce qu'on finit toujours par trouver un compromis, qui n'est pas précipité, tout est du coup assez réfléchi. Mais je comprends qu'on puisse sembler unis, car de l'extérieur les gens voient un produit fini qui a été réfléchi depuis un certain temps et sur lequel nous avons eu pas mal de divergences. Mais on en est tous très fiers et on espère effectivement proposer un tout cohérent, c'est important de créer, d'apporter quelque chose de plus que simplement des morceaux de musique, il faut essayer de créer un univers particulier, et on essaie de faire ça autant que possible.
12. Le Post-Black est assez tendance depuis quelques temps (et nombre de formations de ce style sont apparues depuis peu), n’avez-vous pas peur de n’être qu’un effet de mode ?
Matthieu : Alors, on a surtout peur que sur un malentendu on soit classé comme « un énième groupe de Post-Black ». On écoute nos goûts, on apprend des groupes que l'on admire, qu'ils soient jeunes, vieux ou morts; ainsi que, à la limite, des conseils de personnes que l'on respecte. Le terme « Post-Black » est un raccourci qui évite de passer dix lignes à chaque écrit à expliquer ce que joue un groupe. Comme les termes «Avant-garde » ou « Progressif » il désigne plus une manière d’aborder le Black-Metal qu’un style, ce sont donc certains groupes qui sont à la mode, pas le «Post-Black» je pense. Donc ce supposé « effet de mode », jusque-là, ne nous concerne et ne nous affecte pas.
13. Les groupes Toulousains ont sorti de très bons albums ces derniers mois, quels rapports entretenez-vous avec eux ? Comment se porte la scène Metal par chez vous ?
Matthieu : Effectivement ces derniers mois il y a eu des belles sorties à Toulouse, et on sait que ça va continuer, certains albums de qualités vont sortir soit en cette fin d'année soit l'année prochaine (« Echoes From Silent Shores » d'EXYLEM, l'album d'ALLEGIANCE). On ne prétend pas connaitre tout le monde, mais en tout cas on entretient des bons rapports avec le monde qu’on connaît. Les dernières sorties qui sont marquantes pour nous sont en plus celles de groupes qui sont réguliers depuis quelques années, bien plus expérimentés que nous et qui méritent le respect pour leur implication dans la scène toulousaine et la musique qu'ils produisent (BLACK MARCH, SOYUZ BEAR). Toulouse a quand même un passé en ce qui concerne le Black-Metal, et il y en a des groupes toujours présents et excellents (MALKHEBRE, INSANE VESPER, DARVULIA). Après, c'est un peu comme partout il semble, les orgas et les salles vont et viennent, une partie des gens se plaignent toujours pendant que quelques motivés font que les scènes vivent encore. En vrac, quelques autres groupes trop biens de Toulouse, dont certains ont même pas besoin d'être présentés : HAVENLESS, GRIEF, SEKTARISM, ERYN NON DAE., DYING GIANTS, PLEBEIAN GRANDSTAND, UMBRA, WOODWORK.
14. Au niveau de vos influences, y’a-t-il des groupes ou artistes qui fassent l’unanimité parmi vous ? Avec qui aimeriez-vous partager l’affiche ?
Maxime : Alors oui, on pourrait dire AMENRA, NEUROSIS.
Matthieu : CULT OF LUNA, THE GREAT OLD ONES fait aussi l'unanimité je crois. On a eu l'occasion de partager l'affiche avec TGOO on était fiers et très contents de les revoir en concert. Sinon effectivement, AMENRA et NEUROSIS sont des artistes que l'on rêverait de rencontrer pour la majorité d'entre nous.
15. Quels sont vos projets pour 2018 ?
Maxime : Justement, on réfléchit beaucoup à ça en ce moment, on a des idées toutes différentes, on ne sait pas trop encore.
Matthieu : C'est le grand débat du moment.
16. C’est l’heure de se quitter, je vous laisse le mot de la fin…
Merci pour l'intérêt porté à ce que l'on fait.
I am just a throne away
I am the heir
One breath away
I will rise as your son
And i will be the one.
Amenra - Le Fils des faux. Il fallait que je parte pour que tu viennes.
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