Des trois albums d’Abandon,
When It Falls Apart est souvent celui oublié, jeté dans l’ombre de ses deux successeurs. Et on comprend rapidement pourquoi.
Avec sa durée courte, ses fondations fortement inscrites dans l’underground d’une époque, il passe vite pour un album dispensable, sorte de brouillon d’un talent qui appelle encore à germer et se définir. Autant l’annoncer d’emblée, on ne contredira pas ici certaines critiques envers ce longue-durée bien maigre, presque une introduction des choses à venir. Pour autant, il paraît important d’appuyer que
When It Falls Apart est bien cela : une introduction, indispensable pour qui vénère les autres créations de la formation afin d’en saisir tout le cheminement.
Un peu comme
Neurosis, qui trouvera sa pleine personnalité avec
Souls at Zero mais dont on ne peut faire l’économie d’écouter
Pain of Mind et
The Word as Law. En effet,
When It Falls Apart paraît l’équivalent de ces deux œuvres, un exutoire clairement punk dans son esprit, titillant les scènes crust et sludge dans ses climats révoltés et ses atmosphères sociales marquées par la domination des puissants et l’aigreur des impuissants. On pensera ainsi plus d’une fois à la hargne d’un Dave Edwardson en entendant le chant rustre de Johan Carlzon, déjà habité par la tristesse mais préférant lui donner des coups de latte que la laisser prendre toute la place (cf. « This Weeping Mind », hanté par l’esprit des Ricains). Une rage qui ira même jusqu’à évoquer les mordantes peintures de déclin post-moderne de
Dystopia (les alternances de voix, explosant sur « Ain't It Funky Now? »), montrant qu’avant de s’attaquer à l’intérieur, ses tourments, ses douleurs puis ses deuils, les Suédois ont pris à cœur de décrire un décor qui ne donne pas nécessairement envie de sortir.
Gonflées de samples misérabilistes, selon une certaine tradition du punk le plus extrême, ces vingt-neuf minutes appuient à chaque instant la noirceur de leur propos. Cependant, l’amateur de
In Reality We Suffer et
The Dead End notera qu’autre chose se dessine dans cet album plus original qu’il peut le laisser croire. Des riffs qui cherchent à s’envoler sans y parvenir ; une production crue et grésillante, presque aérienne et clairement éteinte ; deux derniers titres étalés et écroulés où les guitares sortent des mélodies funèbres, une ambiance qu’Abandon surlignera par la suite… Une somme de détails qui font de
When It Falls Apart un début certes trop vite expédié – aussitôt commencé, aussitôt terminé –, certes inscrit dans son époque au point d’en paraître daté (un air de déjà-entendu handicapant), mais un début qui, dans son nihilisme, permet de prendre la pleine mesure de ce qu’aura réalisé la bande lors de sa petite période d’activité : une discographie à mettre parmi les plus réussies évocations du désespoir de notre civilisation.
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