Blodhemn - Sverger Hemn
Chronique
Blodhemn Sverger Hemn
Malgré un manque criant de reconnaissance concernant son projet solo Invisus conserve néanmoins toute sa motivation et continue de faire parler de lui régulièrement avec aujourd’hui son quatrième album en dix ans, qui distille encore et toujours une vision pure et dure du genre agrémentée d’une qualité imparable. Car finalement la seule chose qui a changé depuis le très bon
« Mot Ein Evig Ruin » c’est le passage vers Dark Essence Records (histoire sans doute d’être 100 % local via la signature sur le sympathique label de Bergen), vu que pour le reste musicalement il n’y a pas de surprises à avoir tant ça reste balisé et virulent, mais à l’efficacité implacable et sans baisses de régime. Cependant avec le temps et l’expérience accumulée le bonhomme a progressivement densifié sa musique mais sans pour autant y perdre son côté percutant et frontal, point qui trouve ici son paroxysme vu que ce nouveau chapitre est le plus diversifié et addictif jamais publié par ses soins. Si l’ombre de TAAKE a souvent régné via des morceaux crus et aux accents Punk celle-ci est désormais concurrencée par le IMMORTAL deuxième période qui va prendre une ampleur importante et surtout marquante, tant ici le rendu va tout balayer sur son passage.
Mais en attendant cela c’est sur du classicisme parfaitement exécuté que va s’ouvrir ce nouvel opus via le varié et impeccable « Fraa Djupet… » qui montre le traditionnel ensemble de la panoplie technique du multi-instrumentiste, où brutalité et lourdeur se mettent sur un pied d’égalité tout en possédant un dynamisme de tous les instants. Sobre et redoutable cette première plage donne le ton de très bonne façon, et cela avant que ne déboule le court et cradingue « Vil Livet Av Deg » qui va jouer sur le mode rien-à-foutre tant ça crie et défouraille de tous les côtés tout en conservant une envie de remuer la tête entre deux rasades de blasts et de mid-tempo furibard à l’accroche imparable. Marquée par une obscurité totale et une odeur de mort qui rôde en permanence cette composition (à l’instar du tout aussi sombre et débridé « Velg Din Gift ») y dévoile une couleur noire à son zénith, mais qui va aussi paradoxalement côtoyer des ambiances plus blanches et neigeuses qui n’en oublient cependant jamais de conserver leur rugosité et leur force de frappe. En effet si la noirceur s’est faite entendre majoritairement c’est au tour de la blancheur immaculée de retentir pour quelques moments de gloire remplis d’une certaine nostalgie et mélancolie, comme on peut s’en rendre compte tout d’abord sur le rampant « Farvel Feioey » où les arpèges coupants se mêlent à des riffs froids et une batterie qui reste majoritairement bridée, pour obtenir un rendu différent du reste mais tout aussi cohérent. Néanmoins si la violence diminue d’un cran elle n’est pas absente des débats loin de là, et même si elle se fait plus discrète elle n’est pas oubliée comme le monstrueux « Opp Or Lemmen » va le prouver avec ces cris désespérés, sa hargne de tous les instants et son ambiance occulte qui prend aux tripes parcourus de plans épiques guerriers propices au headbanging. Avec sa sensation hypnotique et magnétique (du fait de longues boucles glaciales et envoûtantes) ce titre sert de parfait amuse-gueule avant l’arrivée de la pièce-maîtresse de cette œuvre intitulée « Tid », et qui durant quasiment dix minutes va nous embarquer entre les forêts immenses et les fjords imposants.
Si ces mots peuvent faire penser instantanément au mythique clip de « Blashyrkh (Mighty Ravendark) » du binôme Demonaz/Abbath, le début de cette conclusion va nous renvoyer directement vers lui via ce voile de guitare en guise d’introduction avant que la suite ne propose de façon continue nombre de ralentissements et accélérations, entre haine et relative sérénité où le soleil tente de faire une percée entre deux rafales venteuses riche en flocons. Embarquant l’auditeur dans cette saison où le jour se fait rare l’écriture ne montre jamais de longueurs malgré sa durée conséquente du fait de ses nombreux changements d’attitude autant que météorologiques, qui clôt un enregistrement impeccable de bout en bout et qui ose plus en jouant sur les deux tableaux. S’améliorant constamment le Norvégien livre donc une galette haletante et riche en émotions, qui joue facilement sur les deux tableaux sans jamais en faire trop dans un sens comme dans l’autre - et ce même si cela standardisé et sans surprises. Cependant il y’a fort à parier qu’avec en prime sa magnifique pochette ce « Sverger Hemn » aura un impact important dans l’underground et fera définitivement sortir son auteur du relatif anonymat dans lequel il a toujours évolué jusqu’à présent, même si cela n’a jamais entamé son envie de continuer à faire vivre une certaine vision du style dans le pays qui l’a vu prendre racine. Il est donc fortement conseillé à ceux qui ne le connaissent pas de se pencher dessus (à l’instar de ses précédentes réalisations) car il y’a peu de chances qu’ils soient déçus, tant le rendu est à la hauteur des influences cités précédemment et qui même sans les atteindre contentera largement le plus grand nombre et montrera que la Norvège a encore et toujours de bonnes choses à dire à la face du monde.
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