Lunar Chamber - Shambhallic Vibrations
Chronique
Lunar Chamber Shambhallic Vibrations (EP)
Dernière signature en date du label 20 Buck Spin, Lunar Chamber n’a rien du groupe incontournable dont tout le monde parle. Vraisemblablement en activité depuis déjà une paire d’années, la formation américaine entretien depuis quatre ans une page Facebook à coups de publications pour le moins sporadiques destinées à un public de "followers" tout aussi restreint. Il faudra attendre l’annonce de leur signature sur le label de Pittsburgh pour que les gens (moi le premier) daignent s’intéresser à ces trois garçons (aidés par un batteur de session en la personne de monsieur Kevin Paradis) dont l’existence était jusque-là confinée (en tout cas à travers cette obscure entité) à un anonymat assourdissant. D’ailleurs à ce jour, Lunar Chamber n’a toujours pas de pages ni sur Metal Archives (enfin ceci était vrai lors de l’écriture de cette introduction il y a encore quelques jours) ni sur Discogs. C’est dire... Aussi, saluons encore une fois le flair de 20 Buck Spin qui, comme souvent (pour ne pas dire toujours) ne s’y est pas trompé en mettant la main sur ce trio prometteur.
Fruit de cette signature, un premier EP intitulé Shambhallic Vibrations dont l’artwork façon compilation New Age tout droit sortie des étagères de chez Nature & Découvertes n’est clairement pas l’atout principal de Lunar Chamber. Pourtant, en plus de ce chouette logo qui n’est pas sans m’évoquer celui d’Imperial Triumphant, cette oeuvre signée des mains du Tchèque Vojtěch Doubek aka Moonroot (Anguish, Chthonic Cult, Eosphoros, Gorgon, Nokturnal Mortum, Remete et j’en passe) à le mérite de ne pas tomber dans la facilité des clichés inhérents au Death Metal. Bien sûr, celle-ci ne fera certainement pas l’unanimité et devrait même tenir quelques potentiels auditeurs à distance mais malgré son côté un brin fauché et naïf qui transpire ces mauvaises démos des années 2000, je lui trouve tout de même un petit quelque chose, probablement grâce à ces couleurs chatoyantes. Cependant, là n’est pas l‘essentiel.
En effet, ce que l’on retiendra de Shambhallic Vibrations ce sont surtout ces cinq compositions (enfin plutôt trois si on enlève les très bons "Intro (Shambhallic Vibrations)" et "Interlude (Ancient Sage)" qui, comme leurs noms l’indiquent, servent ici d’introduction et d’interlude) de Brutal Death technique particulièrement bien troussées, notamment de la part d’un groupe qui jusque-là n’avait encore jamais rien sorti.
Enregistrés entre 2021 et 2022, les quelques titres de ce premier EP sont passés notamment entre les mains expertes de Greg Chandler (Esoteric, Lychgate, Self Hypnosis) et Colin Marston (Krallice, Gorguts, Behold The Arctopus...) à qui l’on doit respectivement le mixage et le mastering. Tout cela donne lieu à une production soignée à la fois moderne, puissante et équilibrée mais surtout bien loin des pires travers portés ces déni!ères années par le genre. Cela peut sembler quelque peu anodin mais se régaler d’un album de Brutal Death technique sans avoir à se farcir une production en plastique aseptisée et sans saveur est devenu quelque chose de plus en plus rare. Ici, les instruments respirent et s’expriment pleinement pour notre plus grand plaisir à commencer par cette basse fretless qui s’avère être un véritable régal tout au long de cette presque demi-heure.
Alors oui, Lunar Chamber s’adonne bien à la pratique d’un Brutal Death technique puisque de ces riffs tarabiscotés à ces déferlantes de notes en passant par ce groove subtile mais définitivement irrésistible, ce growl lourd et profond sans oublier bien entendu ces séquences bourre-pif menées à coups de blasts soutenus et autres changements de rythmes nerveux et syncopés à perdre pied, les Américains cochent à peu près toutes les cases du genre. Seulement voilà, réduire la musique de Lunar Chamber à cette seule formulation s’avère malgré tout beaucoup trop réducteur. En effet, les Américains prennent ici un malin plaisir à prendre le contrepied de ces nombreuses déflagrations et autres coups de boutoirs grâce à quelques séquences beaucoup plus mélodiques et progressives qui ne devraient pas manquer d’attirer l’attention de tous les amateurs de groupes tels que Dream Unending, VoidCeremony, Blood Incantation, Ænigmatum, Horrendous et compagnie. Pour se faire, outre cette basse vibrante d’un autre monde, le groupe va notamment utiliser un clavier afin d’alimenter des ambiances évoquants aussi bien Twin Peaks ("Intro (Shambhallic Vibrations)", "Interlude (Ancient Sage)", les toutes premières secondes de "III. Crystalline Blessed Light Flows... From Violet Mountains Into Lunar Chambers" suivi de ces breaks à 4:24 et 7:23) que les profondeurs abyssales de l’espace connu et inconnu ("Spirit Body And The Seeing Self", "The Bodhi Tree"). De la même manière, Lunar Chamber n’hésite jamais à lever le pied ou tout simplement à changer de rythme et de ton afin de mieux laisser libre cours à ses envies. Des envies qui vont du chant clair ("Spirit Body And The Seeing Self" à 2:30 et 6:16, "The Bodhi Tree" à 4:06, "III. Crystalline Blessed Light Flows... From Violet Mountains Into Lunar Chambers" à 3:33 et 11:41) à de longues séquences instrumentales ("Spirit Body And The Seeing Self" de 3:54 à 6:02, "The Bodhi Tree" à 2:39 et 4:06) en passant par l’exploration de sonorités résolument plus Doom comme c’est le cas notamment sur l’excellent "III. Crystalline Blessed Light Flows... From Violet Mountains Into Lunar Chambers » ainsi que par quelques longs solos mélodiques capables de vous amener ailleurs rien qu’en fermant les yeux ("Spirit Body And The Seeing Self" à 1:01 et 4:24, "The Bodhi Tree" à 3:25 et 4:57, "III. Crystalline Blessed Light Flows... From Violet Mountains Into Lunar Chambers" à 9:58).
Bref, sans nécessairement bousculer les codes en vigueur dans le milieu, Lunar Chamber épate tout de même par la pertinence de son propos, sa mise en place osée, sa liberté de mouvement et d’expression ainsi que par ses parti-pris marqués et audacieux. Aussi, on aurait vraiment aimé que cette première rencontre ne soit pas limitée à un simple EP même si ces vingt-huit minutes s’avèrent particulièrement réjouissantes et surtout prometteuses. Certes, le côté progressif et mélodique des Américains ne sera pas sans faire tiquer les amateurs de Brutal Death purs et durs qui trouveront probablement à y redire mais en ce qui me concerne, je suis sous le charme de Lunar Chamber et de sa musique à la fois brutale et nerveuse et en même temps aérienne, progressive et au groove absolument délicieux. Bref, c’est ce que l’on appelle une entrée en matière particulièrement réussie.
| AxGxB 2 Mai 2023 - 994 lectures |
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