Dégénéréscence - كاديمية القمر الكيميائي
Chronique
Dégénéréscence كاديمية القمر الكيميائي
Ce nouvel album est très facile à haïr. Il peut même être traité de tous les noms. Parce qu’il trahit totalement les fans des sorties précédentes. Parce qu’il utilise des sons trop éloignés de ce que le metal est censé mettre en valeur. Oui, ce serait très facile de le mettre à poubelle en pestant également contre le mal de tête provoqué par la pochette psychédélique sur laquelle trône un avertissement d’écoute en japonais ou par l’emploi de l’arabe comme titre d’album. Il veut dire quoi d’ailleurs ? Eh bien il signifie « Académie chimique de la Lune ». Et qu’est-ce que c’est d’ailleurs que ces mélanges improbables et grossiers ? Japonais ? Arabe ? On y perd son latin, et ça ne mérite pas plus qu’une écoute de quelques instants. Je le comprendrais parfaitement, mais je regretterais simplement l’incompréhension, la confusion.
DËGENERESCENCE a commencé sa carrière il y a quatre ans, et nous l’avons vécu ensemble, en chronique, avec Hélas! Je n'étais pas fait pour cette haine..., un album extrêmement touchant de black metal désespéré et torturé. Le groupe tenu uniquement par Infämie était revenu en 2022 avec une suite au contenu plus régressif et quelque part plus cru et plus révolté. Une petite évolution qui avait déçu ceux qui espéraient retrouver les mêmes éléments dépressifs qu’auparavant, mais qui convenait aux amateurs de crasse. Une petite évolution qui ne laissait absolument pas penser que la suite partirait dans des directions totalement opposées. Ce troisième album garde quelques éléments black metal, musicalement et vocalement, mais uniquement sur quelques passages, et le reste est un ensemble d’assemblages de musiques électroniques, de dub, de rap, de rock, et de nombreux samples venant eux aussi de partout, et aussi bien en français qu’en japonais. C’est au premier abord un bordel sans nom d’influences diverses, mais cela se révèle rapidement bien plus que ça, avec beaucoup plus de profondeur.
Cet album est en fait tout simplement une autobiographie mise en musique et sons. Il regroupe ainsi toutes les expériences vécues jusqu’à maintenant par son géniteur, que ce soit des expériences voulues ou imposées. Tous ces éléments sont comme des flashs de vie, des réminiscences plus ou moins enfouies. On trouve d’anciennes mélodies qui ont bercé toute une vie, mais aussi des paroles entendues ici ou là en français ou en japonais, tirées d’un animé ou d’une série, d’un jeu-vidéo ou d’un film, d’un reportage ou d’un groupe de rap. Tout ce qui est resté dans un coin de la mémoire et de l’âme se retrouve et se bouscule sur cette galette. On dit que l’on revoit une sorte de best-of de sa vie avant de mourir, eh bien c’est la même chose ici mais en version sonore. Cela pourrait être indigeste, mais l’auteur tente de maitriser ces bribes de souvenirs et de les accorder ensemble, de les rendre harmonieux, peut-être afin de mieux les accepter et de ne plus avoir à les subir. Cette approche m’a beaucoup rappelé STUPEFLIP, et certains parleront de DIAPSIQUIR, qui crachent finalement tout leur vécu sans aucun filtre. L’objectif dépasse l’ordre de l’uniquement musical. Cet album est une cure personnelle, et il ne plaira qu’à ceux qui seront attirés par ce genre d’expérience. Le Gloubi-boulga d’une vie, avec l’amertume et la nostalgie qui vont avec. Après deux albums qui essayaient de fuir ce monde, de crier le mal-être, celui-ci lui fait face sans la moindre fuite. Au final, beaucoup détesteront, mais cela ne fera rien, ce n'est pas fait pour être aimé. Peut-être pour être compris tout simplement... En tout cas, non, ça ne se note pas.
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