Vafurlogi - Í Vökulli Áþján
Chronique
Vafurlogi Í Vökulli Áþján
Si les années 2010 ont sonné l’avènement de la scène Black Metal islandaise avec l’émergence de formations telles que Svartidauði, Sinmara, Misþyrming, Naðra, Sól Án Varma, Almyrkvi, Wormlust et quelques autres encore, il semblerait pourtant que depuis quelques années le soufflet soit légèrement retombé. Un constat qui n’a pas grand chose à voir avec la qualité des sorties qui ont suivi cette fameuse impulsion (on se souvient tous des parutions quasi-simultanées de Flesh Cathedral (décembre 2012), Aphotic Womb (septembre 2014) et Söngvar Elds Og Óreiðu (février 2015)) mais plutôt avec un parfum de fraîcheur et de nouveauté qui depuis s’est tout simplement étiolé. Cependant, ce n’est pas pour autant que l’Islande ne continue pas de nous offrir encore quelques belles surprises. Après le premier (et unique) album de Sól Án Varma sorti l’année dernière, c’est celui de Vafurlogi qui a attiré mon attention cette année.
Formé à Reykjavík en 2018, Vafurlogi réunit quelques musiciens jouissant déjà d’expériences pour le moins significatives. Né de l’imagination de Þórir Garðarsson (Sinmara, ex-Svartidauði, ex-Chao, Almyrkvi (live)…), le projet est complété en 2020 avec l’arrivée de Ragnar Sverrisson (Helfró, Ophidian I, ex-Beneath, ex-Svartidauði (live)...). Si le groupe a depuis accueilli deux nouveaux membres dans ses rangs (Eysteinn Orri Sigurðsson (Nyrst, Úlfúð, ex-Draugsól...) à la seconde guitare et Samúel Ásgeirsson (ex-Show Me Wolves) à la basse), c’est bien sous la forme d’un duo qu’il a écrit, composé et enregistré ce premier album paru le mois dernier sur le label Norma Evangelium Diaboli. Un album intitulé Í Vökulli Áþján qui ne devrait pas manquer de vous inspirer confiance grâce à cette illustration plutôt chouette signée des mains de l’artiste italien Raoul Mazzero plus connu sous le pseudonyme de View From The Coffin (Continuum Of Xul, Demonomancy, Ekpyrosis, Fuoco Fatuo, Sepulcros, Sotherion...).
Produit de bout en bout par Stephen Lockhart à qui l’on doit l’identité sonore d’une grande partie de la scène islandaise puisqu’il a effectivement collaboré avec à peu près tout le monde (d’Abominor à Almyrkvi en passant par Auðn, Draugsól, Mannveira, Ophidian I, Sinamara, Svartidauði, Zhrine et quelques autres encore...), Í Vökulli Áþján en partage sans grand suspens de nombreux traits et autres caractéristiques, notamment à travers ces guitares décharnées, rugueuses et dissonantes dont les sonorités évoquent autant un Rock sombre à la sauce scandinave ou allemande qu’un Black Metal froid et famélique mais également lumineux (on pense pas mal à Taake sur certains passages / mélodies).
Musicalement, les huit titres composés par Þórir Garðarsson s’inscrivent eux aussi dans le paysage local sans pour autant sonner comme une resucée de Sinmara ou de Svartidauði. Il faut dire que l’écriture, malgré un ADN commun naturellement partagé, n’est pas non plus tout à fait identique. Moins dense mais aussi plus "simple" (avec des guillemets car cela n’est clairement pas un reproche dans ce cas de figure), le Black Metal de Vafurlogi mise sur une approche beaucoup moins tarabiscotée (sans pourtant manquer de personnalité) ainsi que sur la luminosité accrue de ses mélodies dont certaines possèdent d’ailleurs un caractère étonnamment plus léger et enjoué (c’est le cas notamment sur l’excellent "Viðjar Holdsins" dont les riffs particulièrement entêtants et guillerets rentrent aisément dans le crâne mais également dans une moindre mesure sur le tout aussi convaincant "Iðrun Og Ótti"). Affichées pour la plupart aux alentours des quatre minutes (cinq titres sur huit), ces compositions se concentrent effectivement sur l’essentiel dans un esprit rappelant davantage la scène Black Metal des années 90 (cette introduction acoustique à la sauce Dissection sur "Reikul Vofa" semble d’ailleurs on ne peut plus claire) que celle plus dissonante des années 2000/2010. Le ton est donc dans l’ensemble majoritairement soutenu même s’il n’est pas rare de voir le duo calmer le jeu en certaines occasions.
Car derrière ce propos effectivement "simplifié", il faut bien se rendre à l’évidence que ces quelques compositions n’ont pourtant rien de quelconque. En dépit d’une approche effectivement plus directe, les changements de rythmes et d’intentions s’avèrent ainsi nombreux tout au long de l’album. Un parti-pris qui fait que chaque composition demeure ainsi en perpétuel mouvement et ne se limite pas à répéter bêtement les mêmes patterns encore et encore malgré certaines mélodies permettant de conserver un semblant de trame. Si cela rend évidemment l’immersion peut-être un petit peu plus « compliquée », cela permet aussi à Í Vökulli Áþján de gagner en intérêt, révélant ainsi à chaque nouvelle écoute un petit peu de ce qui fait son charme et sa personnalité (comme par exemple ces quelques arrangements dispensés en quelques occasions comme cette guitare acoustique sur "Reikul Vofa", ces voix claires et mélodiques sur "Hvíldarsálmur" et "Úr Iðramyrkri"), ce synthétiseur sur les premières secondes de "Úr Iðramyrkri"...).
Enfin, on ne manquera pas non plus d’adresser un petit pouce levé à l’égard du chant grave et légèrement en retrait de Þórir Garðarsson qui se prête ici à cet exercice pour la première fois de sa carrière. Une prestation des plus réussies qui, couplée à ces paroles gutturales scandées en islandais, vient contraster avec la luminosité et la légèreté des mélodies déployées tout au long de ces quarante-trois minutes en insufflant un soupçon de noirceur et une pincée de menace sur lesquels on n’ira clairement pas cracher.
Faisant pour Þórir Garðarsson office en quelque sorte de palliatif après l’arrêt des activités de Svartidauði et la mise au repos momentanée de Sinmara après la sortie de son dernier album en 2019 (mais que l’on espère retrouver prochainement), ce premier album de Vafurlogi s’inscrit dans tout ce qui fait la particularité et le charme du Black Metal islandais sans pour autant manquer de personnalité. Nul n’ira évidemment crier au génie à l’écoute de Í Vökulli Áþján mais difficile de nier néanmoins l’efficacité, la variété et les qualités mélodiques de ce premier album mené d’une main de maître. Habitué à être dans les bons coups, Norma Evangelium Diaboli ne s’y est une fois de plus pas trompé en signant Vafurlogi dans son roster puisque même si le duo n’a rien de neuf à nous offrir, ces huit compositions d’envergure possèdent tout ce qu’il faut pour espérer convaincre.
| AxGxB 9 Octobre 2024 - 444 lectures |
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