Déjà très clairs quant à leurs intentions (voir la chronique de
The Prophetic Dawn), les Polonais de Toughness ont décidé d’en rajouter une couche en sollicitant cette fois-ci les talents de l’illustrateur finlandais Turkka G. Rantanen. Si ce nom ne vous dit rien, c’est qu’a priori vous n’êtes pas particulièrement versé dans le Death Metal en provenance du pays aux mille lacs puisqu’on lui doit en effet de nombreuses illustrations pour des groupes pourtant incontournables tels qu’Adramelech, Ascended, Demigod, Demilich, Depravity, Funebre ou bien encore Purtenance. Cela veut probablement dire également que la musique de Toughness n’est peut-être pas pour vous puisqu’évidemment ce choix artistique ne doit absolument rien au hasard lui qui en 2022 avait réussi à attirer l’attention de certains d’entre nous en allant marcher ouvertement sur les plates-bandes d’Antti Boman et sa bande.
Pour ce retour aux affaires, peu de changements à signaler puisqu’à l’exception d’un nouveau batteur (dites bonjour à Maciej Gransztof) arrivé dans les rangs de la formation en 2023 après les départs successifs de Damian Jaworski et de Jerzy Wójcik, Toughness nous revient à l’identique. C’est donc à nouveau sur le label Godz Ov War Productions que parait en février dernier
Black Respite Of Oblivion, un deuxième album composé de neuf nouveaux morceaux pour une durée de quarante-six minutes. Je ne l’ai pas mentionné plus haut mais on ne manquera pas d’apprécier évidemment le coup de pinceau atypique de monsieur Rantanen qui d’emblée apporte un certain cachet à ce nouvel album qui ne fait donc absolument aucun mystère de ses influences et autres sources d’inspiration.
Une fois n’est pas coutume, commençons par les choses qui fâchent. En vérité elles ne sont pas nombreuses et ne concernent finalement que le chant que je trouve personnellement beaucoup trop en avant dans le mix. En effet, même si je n’irai pas jusqu’à dire que le point est rédhibitoire, une écoute attentive, notamment au casque, permet de se rendre compte assez rapidement que Bartek Domański, même s’il signe une prestation exempte de tout reproche avec sa voix d’outre-tombe particulièrement profonde, prend malheureusement un petit peu trop le pas sur ses autres camarades. Encore une fois, cette petite sensation de déséquilibre n’est pas fondamentalement gênante pour l’appréciation de ce nouvel album mais difficile néanmoins de s’en débarrasser une fois qu’on l’a remarqué.
Pour le reste, si comme moi vous êtes ultra clients des tournures tarabiscotées, du groove chaloupé et du growl particulièrement profond de Demilich, alors je ne vois pas trop comment vous ne pourriez pas succomber aux charmes de Toughness et de son Death Metal tout aussi tordu et alambiqué. Seule petite subtilité en comparaison du célèbre groupe finlandais, l’intérêt porté par les quatre garçons de Toughness à ces quelques variations progressives qui ponctuent leur musique ("Abominating The Scourge" à compter de 2:43, "Embrace Blackness" à 2:27, "Open Wounds Of The Forgotten Planet" à 3:19) et la place accordée une nouvelle fois à cette basse aux rondeurs toujours aussi sexy et délicieuses typique de tous ces groupes technico-progressifs que sont Cynic, Atheist, Death, Nocturnus et compagnie... Des choix qui évoquent un subtil désir d’émancipation même si on ne va pas se mentir,
Black Respite Of Oblivion reste profondément marqué par l’influence de Demilich et de Timeghoul tout au long de ces quarante-quatre minutes.
Une chose est sûre, le groupe qui maitrisait déjà son sujet sur
The Prophetic Dawn, continue ici de nous régaler avec une formule restée relativement inchangée qui voit ainsi se succéder une fois de plus mais avec peut-être davantage de fluidité attaques plus ou moins frontales menées sur fond de blasts et de riffs sensiblement plus "simples" et directs (souvent en de nombreuses occasions et de manière assez brève comme c’est le cas sur "Abominating The Scourge", "The Profanity That Creates An Expression Of Pain At The Impossibility Of Ascending To The Lower Realms", "Black Respite Of Oblivion", "Embrace Blackness", "Carrion Entrails (Lost Abyssal Disbelief)" et j’en passe), séquences redoutables de groove à l’image de ce que l’on peut entendre tout au long de "The Profanity That Creates An Expression Of Pain At The Impossibility Of Ascending To The Lower Realms" ainsi que sur d’autres titres comme "Embrace Blackness" à 0:10, "Condemned To Noxious Persistence" à 0:23 ou "Open Wounds Of The Forgotten Planet" à 4:05, solos et autres leads mélodiques de grande qualité travaillant de concert afin d’instaurer des atmosphères abstraites évoquant des mondes étranges et insoupçonnés et enfin une approche dynamique certes en partie calquée sur celle des Finlandais de Demilich mais malgré tout toujours aussi rafraichissante de part son originalité et son parti-pris à contre-courant de tout ce qui se fait habituellement dans le Death Metal.
Après des débuts particulièrement engageants, Toughness vient aujourd’hui enfoncer le clou et prouver à ceux qui peut-être en doutaient encore qu’il est l’un des meilleurs élèves de cette bizarrerie finlandaise aujourd’hui devenue culte. Comme tout ceux qui se sont risqués sur le même chemin, le groupe polonais a naturellement choisi de laisser de côté toute originalité mais c’est le prix à payer lorsque l’on marche ouvertement dans les pas de formations qui à l’inverse ont permis en leur temps d’ouvrir de nouvelles voies quitte à ne pas faire l’unanimité... Quoi qu’il en soit,
Black Respite Of Oblivion est un album toujours aussi solide et à vrai dire peut-être même un petit peu plus abouti dans son écriture, dans son exécution et dans ses transitions. Seul petit reproche à son adresse, un chant légèrement trop en avant qui a tendance à s’imposer sans raison valable face aux autres instruments qui heureusement restent parfaitement lisibles. Réservé à un public averti n’ayant pas peur de se frotter à des titres à tiroirs et à géométries variables, le Death Metal de Toughness ne fera évidemment pas l’unanimité mais ne devrait pas manquer d’enthousiasmer une fois de plus ces auditeurs qui se délectent de ce genre de Death Metal à la fois groovy et tarabiscoté.
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