William »
Craig Ackerman »
Imperial Triumphant - Goldstar
Chronique
Imperial Triumphant Goldstar
« Jazz is stupid. I mean, just play the right notes ! » disait le personnage d’Angela dans la version américaine de la série The Office. Vous avez là à peu près mon avis sur ce genre musical ainsi que les mélanges qu’il a pu engendrer dans le metal. Quelques exceptions existent, comme les influences décelables chez Axis of Perdition, Spektr ou encore Akercocke, mais la plupart des jumelages entre metal extrême et jazz ont entraîné chez moi des bâillements polis tandis que d’autres claquaient des doigts l’air savant.
Ça tombe bien car Imperial Triumphant semble avoir pris son parti de ne jouer que les bonnes notes sur Goldstar. Un virage surprenant, en particulier après le particulièrement abscons Spirit of Ecstasy. Peut-être y a-t-il le sentiment d’être allé trop loin dans la complexité pour elle-même, sans doute y a-t-il la volonté de composer des morceaux taillés pour les planches, plus courts et incisifs (une démarche assumée et répétée en interview). Tant mieux, tant le trio de New York n’a jamais sorti deux fois le même album tout en gardant une certaine cohérence de fond : toujours plus alambiqué, cherchant à aller au plus près d’une vision de leur ville d’activité tentaculaire, inhospitalière, vendeuse de plaisirs artificiels mais avant tout créatrice de nausée – celle sartrienne, particulièrement mise à l’honneur sur les hauteurs de Alphaville – et d’asservissement.
Une discographie qui me laissait toujours un sentiment d’entre-deux, globalement positif (en particulier concernant Alphaville et Vile Luxury), regrettant tant de détours pour une ambiance qui fascinait de ses images d’architecture inhumaine, de fourmilière où chacun étouffe, un discours presque anticapitaliste en arrière-plan, assumant d’afficher l’horreur pour mieux la condamner – jusque-là. Une question d’équilibre en somme, de juxtaposition entre le fond et la forme qui s’avérait précaire et jamais pleinement jouissive – jusque-là, bis. Sur Goldstar, le cerveau hurle de contentement dès le départ avec « Eye of Mars » et ses rappels tirant autant du côté de Gorguts que d’un Deathspell Omega période Fas s’enivrant de luxe et de volupté. Le calme sera cependant aux abonnés absents, la voix de Zachary Ezrin récitant son death metal d’une façon particulièrement dégoulinante pour le plus grand plaisir des amateurs.
L’intention de revenir à une musique plus frontale, assumant désormais pleinement son allégeance au sordide porté par une ambiance urbaine, ne sera jamais remplacée par une autre durant les trente-huit minutes de cet album (exception faite du morceau-titre, ironique et accentuant l’atmosphère de New York chez Bioshock de l’ensemble). Voleur critiquant les voleurs (tout le monde aura noté les emprunts aux Beatles sur « Industry of Misery » et à Georg Friedrich Haendel sur « Hotel Sphynx »), Imperial Triumphant assume de capitaliser sur ses acquis pour les parfaire. L’optimisation s’entend sur « Pleasuredome » et les clinquantes inflexions groovy apportées par Dave Lombardo, un parmi d’autres guest-stars qui ne font jamais d’ombre à Goldstar, ce dernier s’appropriant chacun pour en faire son produit (le plus beau pied-de-nez étant l’utilisation de Tomas Haake, batteur de Meshuggah, comme… narrateur). Un fignolage expert que l’on sent jusqu’à la production de Colin Marston et son travail sonore qui semble avoir été fait pour le groupe (au point qu’il a remixé – avec succès – Vile Luxury l’année précédente).
Autre raison pour laquelle Imperial Triumphant réussit ici pleinement son hold-up : l’éclatante obédience mathcore s’affichant sur Goldstar rappelant le meilleur des années 2000 où le chaos se jouait de façon aussi mentale que physique – une particularité qu’il partage avec son frère Pyrrhon. Des racines qui se retrouvent en filigrane ici, présentes sur un « NEWYORKCITY » rappelant les liens qu’il y a pu avoir entre le punk extrême et le jazz (ne voulaient-ils pas plutôt écrire « Naked City » ?) mais aussi sur les spirales descendantes de « Gomorrah Nouveaux », le matraquage dissonant de « Rot Moderne », cette basse métallique, ce goût de l’absurde retombant toujours sur ses pattes agiles…
Assez. Goldstar, malgré son format resserré, son optique d’aller plus directement au fond des choses, est d’une richesse incroyable, au point qu’il fait oublier l’objectif d’être exhaustif. Imperial Triumphant promet la réalisation de tous les rêves dans ses délires de publicitaire à l’ancienne, même les plus nocturnes (« Lexington Delirium » et son ambiance étoilée). Il ne les concrétise pas tous, notamment dans une brutalité qui peine encore à sortir et que j’aimerais entendre fendre davantage le costume de self made men encore un peu trop soignés à mon goût. Question de sensibilité, de même que concernant celle de l’amateur de longue date pouvant trouver l’ensemble moins impressionnant que des prédécesseurs plus généreux en durée et complexité. Formellement, difficile pourtant de mettre en défaut cette synthèse qui a la puissance de l’évidence pour elle, accomplissant parfaitement cette représentation d’un New York rongé de l’intérieur derrière sa beauté. Après avoir tant entendu la formation tourner autour, voilà qui donne envie de dire « Enfin » !
| | Ikea 26 Juin 2025 - 1398 lectures |
| |
DONNEZ VOTRE AVIS
Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer.
AJOUTER UN COMMENTAIRE
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par Lestat
Par Jean-Clint
Par xworthlessx
Par Ikea
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par Lestat
Par Krokodil
Par Niktareum
Par Jean-Clint
Par Jean-Clint
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène