Chronique
Malepeste Ex Nihilo
Malgré quinze ans d’ancienneté et quelques sorties intéressantes au compteur MALEPESTE n’a jamais véritablement explosé au sein de la concurrentielle scène Black française, la faute à une musique sans doute trop passe-partout et au manque criant de personnalité pour que ses auteurs parviennent à s’extraire des limbes de l’underground le plus occulte. Du coup après dix ans de silence discographique (seulement interrompu en 2018 par un Split en compagnie de DYSYLUMN) ce troisième album est clairement celui du changement, car s’il veut pouvoir percer le quintet a compris qu’il allait devoir se démarquer pour exister et être dans la lumière. Terminé donc l’attirail avec le maquillage, les pentagrammes et le déguisement primitif et place à un style visuel plus mystérieux et rétro où l’on pourrait se croire dans un cabinet de curiosités digne de Georges Méliès. Musicalement il était donc aussi logique que le style change et fini ainsi des morceaux crus et sans concessions pour des accents presque Post-Metal et atmosphériques, où l’expérience de ses membres s’est révélée comme jamais tout en leur faisant faire un vrai bond en avant
Car évoluant maintenant dans une ambiance typique des Acteurs de l’Ombre où ils sont désormais signés ceux-ci vont dès l’ouverture (« Ab Chaos ») dévoiler des accents presque psychiatriques, où le voyage entre l’expérience de mort imminente et l’au-delà inconnu apparaît par tous les bouts. On se retrouve en effet instantanément happé par quelque chose de froid et sec (aidé par cette batterie qui claque) où les accents martiaux côtoient une rythmique assez lente aux nombreuses cassures et rempli d’atmosphères qui enrobent l’ensemble délicatement. Doux et cotonneux mais pas dénué de noirceur comme de virulence ce premier titre va donner le ton du reste à venir qui ne va pas dépareiller, qu’il se fasse plus élaboré comme plus direct et frontal… ce que le très bon et ambitieux « Quaestionis » va parfaitement mettre en valeur. Car si l’on retrouve les mêmes éléments que la plage précédente le rendu va progressivement être autant lumineux que sombre, se dévoilant plus hypnotique en jouant le grand écart sur les couches musicales qui nous embarquent aux confins de la philosophie comme la psychothérapie, tant c’est éthéré et glacial sans que le tempo ne s’emballe ici aussi outre mesure afin d’amplifier le côté addictif de l’ensemble qui malgré un sentiment de répétition n’est jamais linéaire. Si la vitesse s’est faite jusqu’à présent absente « Imperium » va voir au contraire la mettre au jour, même si dans un premier temps c’est encore le bridage qui se retrouve à l’honneur vu qu’on est en plein recueillement et envoyé dans les confins de l’esprit humain et du cosmos, avant que ce long moment sombre et tribal ne cède la place à une explosion en règle où blasts comme la rapidité générale retentissent afin de bien faire comprendre que l’ensemble sera tortueux malgré son ressenti de plénitude initial. Refaisant ensuite l’éloge de la lenteur dans sa troisième et dernière partie cette composition très dense et variée montre donc deux facettes antagonistes mais aussi complémentaires, où l’on comprend que le dynamisme va aller crescendo sur ce disque… et effectivement avec « Stupor » qui s’enchaîne juste après on va immédiatement s’en rendre compte.
Se montrant guerrier comme jamais grâce à une météo gelée et où l’obscurité y est maximum ce titre livre une vision remuante et intense où le vent pénétrant et les ténèbres prennent le pas sur le reste (même si la lumière de la Lune reste en embuscade), exploitant ainsi une facette plus rugueuse et rentre-dedans sans que les accents solaires soient néanmoins absents. Misant donc sur une facette primale sans pour autant que la rythmique ne s’emballe de façon débridée le rendu y est toujours impeccable, et cette vision épique va s’intensifier sur le tout aussi profond « Acceptio » qui mise beaucoup sur la rapidité et le médium pour headbanguer, tout en n’hésitant pas à lever le pied afin d’offrir tout un panel de jeu dans la droite ligne de ce qui a été entendu auparavant Ajoutant à cela quelques sentiments d’occultisme comme de religieux le mélange se dévoile de façon majestueuse tel l’espoir après les tourments, ce que « Relapsus » va parfaitement confirmer pour terminer cette longue aventure intérieure. Débutant par de douces notes la suite va aller crescendo en intensité… du bridage absolu jusqu’au tabassage le plus virulent, agrémentée d’accélérations ici et là où le headbanging est de mise sur fond d’ultime bataille entre le bien et le mal… relançant ainsi la machine à de nombreuses reprises qui se termine par des redoutables accents tribaux. Tout cela permet donc de mettre l’auditeur en apesanteur afin qu’il trouve l’apaisement requis, avant que ne retentissent en guise de conclusion les ambiances symphoniques exacerbées d’une écriture à tiroir un peu longue à se mettre en place, mais à la fluidité constante (à l’instar de tout ce long-format) qui se clôt tel un blockbuster dont on a déjà la nostalgie une fois terminé le générique.
Car effectivement ce ressenti va apparaître immédiatement les ultimes notes jouées, vu qu’on se rend compte qu’on va avoir besoin de se replonger régulièrement dans cette œuvre pour bien y saisir toutes les subtilités qui s’y trouvent, et qui ne va pas laisser indifférent. Car moins facile d’accès qu’on ne pourrait le croire de prime abord cette galette est clairement aujourd’hui la meilleure sortie par ses auteurs, qui ont mis le paquet pour y parvenir et ce malgré quelques petites longueurs évitables et de plans étirés parfois inutilement. Mais malgré ces points de détails à l’influence mineure sur le bilan final pour le reste on appréciera cette sortie de haute volée d’une profondeur insoupçonnée, qui démontre que la bande a bien fait d’élargir ses horizons qui vont dorénavant autant vers les Lituaniens d’AU-DESSUS que leurs compatriotes de BÂ’A… signe donc que ça ratisse large, mais sans jamais empiéter l’un vers l’autre. La preuve ultime que le vécu musical de chacun des musiciens a été utilisé à bon escient, et qu’il faudra désormais les suivre plus attentivement tant le manque de visibilité est désormais terminé pour eux et c’est tant mieux.
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