Noël, il y a vraiment des années avec, et des années sans ... Mais non enfin, 'soyez pas ballots: on est d'accord qu'il est relativement rare que le calendrier saute sauvagement du 24 au 26 décembre, même les annus les plus horribilis. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a vraiment des années où ça craint, par exemple quand Tata Micheline pète un câble entre les huîtres et le boudin blanc truffé, ou qu'au lieu de l'intégrale de
The Crown tant attendue, mamie vous offre un coffret 8 Cds du Crown of Thorns de Jean Beauvoir. Et puis d'autres fois par contre, alors que le traditionnel bilan est bouclé et que vous n'attendez plus rien que le bêtisier annuel de France 3 pour tourner la page et accueillir janvier à bras ouverts, paf, il tombe au pied du sapin un truc aussi improbable que génial, du genre que vous n'auriez a priori jamais eu l'idée de mettre dans votre lettre au Papa Noël.
« The Pulse of Awakening » qu'il s'appelle le Santa Claus ex Machina 2009. Je ne l'avais vraiment pas vu venir le bougre … Déjà, l'album s'inscrit dans le courant « Cyber metal », oui, c'est bien ça, bidibidip, raideur robotique et guitares issues de la Matrice, enfin bref. Vous en connaissez beaucoup, vous, des fans autoproclamés de Cyber metal? Voilà, vous voyez où je veux en venir … Et pourtant, c'te beigne mes enfants! Martial, mélodique, burné, groovy, tranchant, grandiose, touchant, majestueux … Oui oui, je sais, je sors les violons, mais si l'occasion s'y prête et que c'est justifié, on ne va pas s'en priver!
Le groupe? Sybreed. Allez zou, c'est l'heure de la fiche technique. On va faire court et efficace. Suisse. Listenable Records. 3e album. Mixage et arrangements par Rhys Fulber. Pochette de Spiros "Seth" Antoniou (
Septic Flesh). Des questions? Pour le reste de la bio – les orientations sexuelles, politiques, culinaires – je vous renvoie aux derniers numéros de Paris Thrash, « le poids d'émo, le choc des faux trves ». Le style pratiqué? Un mélange de la froide martialité de
Fear Factory, de sombres rêveries et de mélodies poignantes à la
Opeth /
Frantic Bleep, et de pirouettes-cacahuètes saccadées et polyrythmiques from
Meshuggah-land, option
Textures pour la bonne oxygénation de l'ensemble. Plus des pointes cyber black, genre Crest of Darkness époque « Project Regeneration ». Plus une dimension new wave / soft electro / goth. Oui je sais, moi aussi ça m'aurait fait peur une telle description, si si. Mais en fait non.
« Antares », l'album précédent, avait récolté tellement de bonnes chros à sa sortie que je l'ai acheté sans même en écouter une note. Sauf que vu qu'il est encore perdu vers le milieu de ma pile d'albums à écouter dès que possible, je ne pourrai vous en parler avec à propos que vers septembre/octobre 2010. Par contre l'album fut chroniqué en son temps sur Thrasho par $am, collègue qui nous a quitté suite à une nécrose malheureuse de l'extrémité pénienne. Celui-ci n'avait alors point succombé à l'enthousiasme ambiant. Que nous disait ce regretté confrère des défauts du groupe? Deux critiques ressortaient clairement:
*
le chant. Bien que Ben prenne de multiples intonations, on distinguera 2 grands types de vocaux: l'un plutôt extrême, entre cyber black et
Soilwork grognon, et l'autre franchement clair, aux vertus adoucissantes indéniables (
Cajoline inside), du genre à se voir qualifier de « gay » par les plus ours d'entre vous. Navigant sur des eaux troubles mais profondes allant de l'émo le plus nasillard (
« Human Black Box ») au metalcore le plus suave, de douceurs
Frantic Bleepiennes à des accents plus goth, ce chant pourra en effet vous filer des boutons si vous ne parlez que le patois Graoumpfleuargl.
*
la touche electro. Je ne sais si cet aspect n'était présent que sous forme d'un vernis artificiellement accolé à la musique sur le précédent opus. Quoiqu'il en soit, sur « The Pulse of Awakening », les gouzigouzis electro ne sont ni systématiques, ni encombrants. Je dirais qu'ils sont présents en filigrane, comme une pointe de menthe ou de coriandre qu'on ne remarque vraiment que si l'on essaie de décortiquer les harmonieuses saveurs qui nous ravissent les papilles auditives.
Donc les réserves passées restent d'actualité: si vous êtes réfractaires à ces aspects, bien que l'album soit une pure tuerie, vous risquez de continuer à bouder les Sybreederies.
Maintenant, il faut arrêter les minauderies. Cet album est gavé ras la capsule de putains de morceaux qui rendent tous durs les corps caverneux. Les passages couillus ont une vraie paire de noix de coco dans le falzar (
mention spéciale à « I Am Ultraviolence » qui pioche chez SYL, Meshuggah et un Soilwork shooté aux hormones de rhino). Quand il s'agit de faire la teuf, les paillettes « happy goth indus metal » pleuvent à foison sur le dance floor. Et nom de dieu: quand avez-vous entendu pour la dernière fois une telle collection de refrains entêtants à s'en pourrir le crâne pendant des semaines et des semaines, hein, je vous l'demande?
Le dernier Townsend? C'est vrai, jolie comparaison, même si on ne court pas franchement dans le même couloir. Là on est plutôt dans un registre proche de l'école modern mélodeath typé late-
Gardenian et The Defaced. Tantôt poignant, tantôt majestueux, tantôt fruit d'un mariage étroit entre fragilité et puissance, Sybreed nous permet de faire d'importantes provisions de lignes de chant envoûtantes pour l'hiver à côté desquelles les stocks de la fourmi font pitié. Et tout est à l'avenant: des orchestrations grandioses mais mesurées (
sur « Lucifer Effect » et « From Zero to Nothing ») à l'exercice de la reprise (
un « Love Like Blood » plutôt fidèle et bien intégré), en passant par la pause douceur (
le bien nommé « In the Cold Light »), rares sont les faux pas. Une telle somme de subtilité, de patate, d'accroche et de majesté ne peut - à mon sens - s'expliquer que par des musiciens en plein état de grâce artistique au moment de la composition.
Et vous pouvez y aller: que vous considériez un album comme une collection de singles (
que des tubes ici, dont les meilleurs sont « Nomenklatura », « Doomsday Party », « Human Black Box », « Electronegative » … mouais, cette entreprise me parait finalement assez futile!) ou comme un shoot de passages d'anthologie, c'est la carton plein! On ne fait que passer de refrains superbes (
« KillJoy », « Nomenklatura » …) en saccades moshy (
à 2:45 sur « I Am Ultraviolence », à 3:30 sur « Lucifer Effect »), de ricochets rythmiques hyper groovy (
à 5:14 sur « Lucifer Effect » encore) en mosh parts atmosphériques (
façon Textures, à 2:50 sur « A.E.O.N ») … On en remplirait des pages, et à défaut ce sont les kleenex qu'on remplit du fruit d'orgasmes auditifs à répétition.
Bref, avec ce cadeau de dernière minute, le Père Noël m'aura retourné comme une crêpe cette année. Je me refuserai néanmoins à mettre plus de 9 à « The Pulse of Awakening », histoire de protester contre le fait de m'avoir amené à m'extasier devant un album dans la description duquel j'ai dû utiliser les mots « émo » et « goth »! Mais sûr que si cette galette avait bercé mes années lycées, et par conséquent qu'une dimension affective supplémentaire était venu biaiser la notation, j'aurais été taquiner la note ultime. Résumé du pavé: excellentissime.
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo
Par Jean-Clint
Par Troll Traya
Par alexwilson
Par Sosthène