Dark Order - Cold War Of The Condor
Chronique
Dark Order Cold War Of The Condor
Comment appelle-t-on la femelle du condor? La chambre à coucher, parce que c'est là qu'on dort (la condor)! Si j'ai choisi d'introduire ma chronique par une blague, aussi pourrie soit-elle, c'est parce que la suite risque d'être beaucoup moins amusante. Je ne connaissais Dark Order ni d'Eve ni d'Adam avant de recevoir ce promo et ça ne m'aurait pas dérangé qu'il en restât ainsi. L'écoute de ce troisième full-length des Australiens, intitulé Cold War Of The Condor (d'où la blague), s'est en effet souvent transformée en chemin de croix. Interminable et déséquilibré, l'opus m'a ainsi causé bien des bâillements. D'autant plus dommage qu'en y écoutant de plus près, l'album n'est pas dénué de qualités.
Mais le principal défaut de Cold War Of The Condor restera rédhibitoire en ce qui me concerne. Au risque de me répéter, un album de thrash doit durer 30 à 45 minutes grand maximum, sauf quand on s'appelle Metallica ou Heathen. Ce qui n'est pas le cas de Dark Order qui nous pond là un pavé indigeste de plus de 76 minutes. Indigeste parce que même en variant les ambiances, les Australiens ne font pas preuve de suffisamment de richesse dans les compositions pour garder notre attention tout ce temps. Et il faut bien avouer que son thrash n'est pas non plus franchement bandant. Comme beaucoup, Dark Order vénère Slayer, ce qui se ressent à la fois dans les riffs, les solos chaotiques, les passages plus ambiancés aux leads malsaines et dans le chant gueulard, sorte d'Araya en plus grave et plus hardcore. Le problème c'est que c'est le Slayer des deux derniers albums, c'est à dire du thrash plat, sans inspiration et générique au possible. Il y a bien quelques riffs qui sortent du lot et des titres relativement corrects comme "Dissension Of The Raptor" ou "Operation Condor", carrément du thrash/death avec ses blastouilles et son riff bouillant, mais dans l'ensemble, l'amateur de thrash aura bien du mal à trouver une bande-son efficace pour sa prochaine beuverie. Comme quoi il ne suffit pas de faire "chuka-chuka" pour jouer du bon thrash!
Heureusement, le combo de Sidney ne se cantonne pas aux parties rapides et varie bien son jeu. Si ça n'avait pas été le cas, nul doute que ce Cold War Of The Condor aurait eu encore plus de mal à passer. On sera ainsi presque ravi de rencontrer des passages mid-tempo plus groovy et headbangants, des séquences lentes à ambiance sombre voire quelques arpèges et autres séquences acoustiques, qui à défaut d'être originaux ont au moins le mérite de faire le job à peu près convenablement et d'éviter une trop grande monotonie. En parlant d'originalité, figurez-vous que Dark Order a malgré tout quelques atouts dans sa manche. Cold War Of The Condor est en effet un album concept sur le régime de Pinochet, une thématique qu'on retrouve dans toutes les paroles criées soit en Anglais soit en Espagnol, ainsi que dans quelques samples historiques comme sur l'intro "September 11th 1973" où la foule scande le nom d'Allende. Pourquoi ce thème somme toute surprenant? Tout simplement parce que les membres du groupe sont presque tous d'origine chilienne.
Sans forcément parler d'originalité, d'autres motifs de satisfaction existent. On notera déjà une basse bien présente, une rareté sur un album de thrash, et une production assez sèche qui convient bien au style. Si la plupart des solos ne valent gère mieux que ceux de la paire King/Hanneman, certains, plus construits et mélodiques, se démarquent comme celui de "Criminal Of State" à 7'20. Et outre les breaks en arpèges ou la guitare acoustique, le côté limite progressif de Dark Order se retrouve sur certaines parties surprenantes en chant clair plutôt réussies, même quand ça chante en Espagnol (et Satan sait que je déteste cette langue pourtant!) comme sur la triste et mélancolique "A Lament For Victor Jara". Des sentiments également présents sur le final "Requiem Eternal" qui clôt l'album sur une bonne note. "Criminal Of State" sonne lui presque comme du Nevermore, même si le chanteur n'a pas le talent de Warrel Dane. Une variété de chant bienvenue complétée par des murmures menaçants sur "Villa Grimaldi" et son final lent et noir, les chœurs hardcore de "State Of Siege" ou encore "Tears Of The Exiled" et ses backing vocals écorchés.
Des bons points qui sauvent l'opus du naufrage total mais qui ne l'empêchent pas d'échouer à accrocher la moyenne. On saluera Dark Order pour la leçon d'histoire, les tentatives convenables en chant clair, les passages plus brutaux parfois limite death et les quelques bons riffs qui parsèment Cold War Of The Condor, mais celui-ci ne se fait pas assez riche pour éviter les passages à vide sur une durée aussi importante. Je ne sais pas ce qu'ont les groupes de thrash en ce moment à nous pondre des albums d'une heure mais il faudrait y mettre un terme rapidement. Dark Order aurait réduit de moitié son œuvre tout en gardant les quelques touches d'originalité, la pilule serait bien mieux passée. C'est vraiment dommage car, je le répète, Cold War Of The Condor a de bons côtés et proposent quelques moments excellents. Mais j'attends plus d'un groupe venant d'un pays qui nous a offert Hobbs' Angel Of Death et Slaughter Lord. Dans la catégorie clones de Slayer, on leur préfèrera les Grecs de Suicidal Angels, bien plus directs et efficaces.
| Keyser 17 Janvier 2011 - 1456 lectures |
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