Fleshpress - Pillars
Chronique
Fleshpress Pillars
Il y a le sludge que tous connaissent ou devraient connaitre, celui de Grief, Eyehategod, Fistula, Grief, Buzzoven ou Grief, celui qui ne se situe pas tant dans les caniveaux de quelconque rue où s’échangent des seringues servant l’augmentation de son C.V. chapitre M.S.T. que la partie basse du cerveau humain, le bulbe rachidien, cet endroit contrôlant les fibres motrices du corps qu’il découpe une à une pour nous laisser vaguement mammifères, haletants, suants, mollusquants. Il y a ce sludge-là.
Et il y a le sludge de Fleshpress, qui est autre. Un sludge que peu fréquentent (Bizarrement, et malgré la présence de Mikko Aspa à la batterie, la musique des Finlandais reste une affaire d’initié) mais dont le monde sera bientôt informé comme on l’est lors d’une épidémie taille globale : atteint avant de savoir, relevant les symptômes avant d’apprendre la maladie. Ho ! On a bien eu des signes avant-coureurs, Burning Witch, Iron Monkey et sa sclérose posée par plaques, ces étirements Monarch-iens où l’eau se dilate par la force des amplis causant progressivement inondation puis noyade parmi des sirènes en plein sabbat aquatique… Des tests préliminaires en vérité puisque Pillars, lui, ne figure ni onirise mais réalise en attaquant par l’air, qu’il rend voluptueux par l’allongement de titres et une basse aux lignes volantes, douces et pourtant concrètes, venimeuses, sans avoir à jouer fort pour nouer, son garrot provenant de molécules de synthèse vouées à l’infiltration terroriste : ici, la réfrigération du black metal qui conserve les bactéries dans leur pure forme par une voix qu’on qualifierait de proche de l’aphonie si celle-ci évoquait encore quelque chose d’humain et non un vent piquant l’oreille ; là, le sludge phagocytaire qui mange, avale le système immunitaire de son rictus d’éboueur fou ; enfin, l’ambiant qui vacille de bacilles, Koch tournant de l’œil sur de lentes montées usant de mélodies plutôt que volumes, acculant par l’extension de motifs jusqu’à leurs mutations où le front ruisselle et les yeux fixent, transe fébrile des effervescences ne naissant pas de chaleurs de cagnard mais de frissons langoureux laissant affaibli.
Ho (bis) ! On a bien tiqué sur des évènements communs à tous bien qu’intérieurs, cocasses puis bizarres, trop pour qu’on explique encore aujourd’hui leur présence : cette hypnose qui manque aux autres œuvres de Fleshpress et explose ici, exponentielle au point de laisser figé (littéralement, et ça n’arrive d’habitude jamais le temps d’un disque complet – alors quand en plus celui-ci dure un peu moins d’une heure vingt, vous imaginez le pouvoir de paralysie…) ; cette guerre mentale ; ces résistances qui lâchent ; cette relation nouvelle à l’oxygène, qui ne se respire plus mais s’invite en nous ; cette toux profonde dont on ne s’inquiète pas tant on exulte à éructer malgré cette peau qui blêmit… Et la faim et la fièvre et l’estomac qui grimpent, la voracité devenant le signe distinctif d’une humanité convertie au Terne, attachée à dépecer des victimes néandertaliennes par l’attaque de mains blanches sans veines apparentes, grattouillant avec l’attention et la légèreté des araignées les tôles d’acier cachant les apeurés jusqu’à ce que l’espace vibre, qu’augmente la propagation et se créé la pandémie.
« On n’en ressort pas indemne » en somme, ou plutôt plonge à pieds joints dans le bonheur de ne plus exister autrement que par le primaire poussé à son plus haut niveau d’esthétique, la même guidant le Deathspell Omega de Fas (présentée sur Pillars dans une version au repos et autrement plus lubrique car dégagée de religiosité) ainsi que l’album généralement incompris d’Unearthly Trance, V (présentée ici dans une version polaire et tout aussi vicieuse). Entre nous, voilà une belle trithérapie.
| lkea 1 Mai 2012 - 2316 lectures |
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