Nous avions laissé les
NO RETURN en 1995, sur un troisième album plutôt contesté :
« Seasons of Soul ». S’en était suivi l’EP «
Red Embers », dont le style est encore totalement dans l’esprit du disque précédent et qui marque la dernière apparition de
Tanguy Bourgeois au chant. C’est donc en un peu moins de trois ans que les musiciens vont opérer leur mutation, sans pour autant renier le passé. En effet, la marque tribale présente sur la pommette du visage ornant l’EP est reprise sur la poitrine des personnages illustrant «
Self Mutilation », une façon claire pour le groupe de dire qu’il ne change pas radicalement mais qu’il évolue fortement.
Il y a donc eu du changement autour des indéfectibles
Alain Clément (guitare) et
Didier le Baron (batterie) avec les arrivées d’un nouveau bassiste (
Olivier Herol), d’un claviériste (
Malko Pouchin) et, surtout, de la nouvelle voix de la formation :
Steeve Petit, alias
Zuul. Et à la différence de certains groupes où les mouvements de personnels n’exercent aucune influence sur la musique, le quintette fait peau neuve, se réinvente pour prendre l’orientation qui restera la sienne par la suite : un
thrash death metal puissant, racé comme on aime à le dire, également beaucoup plus technique. Il reste que l’on peut parfaitement concevoir d’être fan de la première heure et d’avoir lâché la bande à ce moment-là ou, inversement, de ne pas adhérer aux débuts mais de fondre sur ce qu’elle a sorti ces vingt dernières années.
Les compteurs sont donc remis à zéro. Et alors que « Do or Die » se lance, un premier constat s’impose : les mecs ont mis le paquet sur la production. Elle est clinique, froide, conquérante, à l’image de compositions qui se révèlent être la jonction parfaite entre le
death metal de
« Contamination Rises » (complexité, agressivité), la précision chirurgicale d’un
FEAR FACTORY à l’époque de «
Demanufacture » et le riffing de
SLAYER dans sa période post
« Decade of Aggression » (« Truth and Reality »).
S’il fallait cependant le préciser, les Français conservent une personnalité, des spécificités qui les rendront toujours identifiables. Le style est certes moins clivant qu’auparavant mais il est pratiqué à un tel niveau d’intensité, d’exigence, qu’il serait malvenu de critiquer quoi que ce soit. Je craignais l’introduction d’un clavier, je suis bien vite rassuré quant à son usage et pour cause, il est quasiment inexistant, réduit à ambiancer les compositions de sonorités futuristes subtiles (« Sect » par exemple), d’où mon parallèle avec l’Usine à Peur. Quant à la performance vocale de
Zuul, elle est simplement parfaite, son timbre à la croisée du
thash et du
death collant parfaitement aux nouvelles ambitions de
NO RETURN. Pour le reste,
Alain Clément et
Didier le Baron se font plus que plaisir : le premier étale une collection de techniques de jeu impressionnante, ses solos n’ont jamais été aussi bien maîtrisés, c’est un riff, une claque. Pour ce qui est du second, il insuffle une dynamique incroyable aux morceaux, il est le cœur de la machine, pas forcément hyper démonstratif dans l’approche de son instrument mais précis, musclé, diversifié, il fallait bien cela pour faire de «
Self Mutilation » l’un des meilleurs albums de
thrash death européen. Car oui, en 2000, si vous m’aviez demandé de choisir entre
SOILWORK,
THE HAUNTED voire
DARKANE (même si
« Rusted Angle » reste encore une grosse fessée), ma décision aurait été prise sans aucun temps de réflexion, le chauvinisme n’ayant même pas besoin d’être pris en compte.
A titre personnel, c’est vrai que j’ai arrêté de suivre le groupe après cet album,
« Machinery » étant le dernier que j’écoute encore avec plaisir mais bon sang, cette décennie 1990 – 2000 fut un véritable parcours sans fautes en dépit de son éclectisme.
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03/03/2024 19:21