Chthonic - Final Battle at Sing Ling Temple
Chronique
Chthonic Final Battle at Sing Ling Temple (DVD)
CHTHONIC est l’un de mes groupes favoris. Les Taïwanais ont d’abord su attirer mon attention avec Seediq Bale (2005) puis me convaincre définitivement avec Mirror of Retribution (2009) qui a fait exploser leur personnalité jusqu’alors un peu trop lisse. Ils effectuent depuis longtemps un black à clavier très imprégné de death et comparé à CRADLE OF FILTH, en grande partie à cause de vocaux tout aussi nasillards. CHTHONIC est parvenu à s’affranchir peu à peu de ses influences avec l’intégration d’éléments traditionnels de plus en plus assumée, mise en avant et surtout efficace. On retrouve surtout un Erhu, instrument à cordes aussi appelé « violon chinois », qui a longtemps été utilisé pour la musique de l’opéra chinois. Tout le monde a déjà dû en entendre puisqu’on en retrouve souvent dans les bandes originales des films asiatiques. Le mélange des claviers, de l’Erhu et des mélodies agressives a trouvé son apogée sur Takasago Army, un des albums phares de 2011, et a rendu de plus en plus difficile la comparaison avec un CRADLE OF FILTH qui a en plus pris une autre voie depuis quelques années.
Ces Asiatiques restent encore peu connus en Occident et pourtant ils soulèvent les foules dans leur pays. Pas uniquement pour des raisons musicales, mais aussi pour leurs idéologies. Pour eux, le black et la musique tout simplement est un outil de propagande pure et dure. Ils affichent ouvertement leur opinion sur la Chine et réclament plus d’autonomie pour Taïwan. Ils dénoncent surtout le passé et les violences subies par leurs grand-parents. Le leader de la formation organise des groupes de discussion et des conférences à propos des droits humains et a même eu l’occasion de s’entretenir avec le Dalaï-Lama, avec lequel il partage de nombreux points de vue. Difficile de trouver quelqu’un qui s’engage autant dans une cause et l’argument « Que de la gueule ! » est irrecevable. C’est ce que certains ont pourtant pensé en ne regardant le groupe que de loin. C’est à cause des costumes portés par les musiciens, le merchandising agressif et aussi la notoriété de la bassiste attirant les puceaux en chaleur (ou les vieux vicelards comme moi). Mais non, CHTHONIC c’est vraiment un tout. Une musique, un visuel, un concept, une façon de penser et de revendiquer.
On retrouve cette sincérité et cette logique indéniables sur cet album live, ne serait-ce qu’en découvrant le lieu où a été donné le concert : le temple Sing Ling. Celui-là même qui apparaît dans les chansons du groupe : « Sing Ling Temple » sur Mirrors of Retribution et « Quell the Souls in Sing Ling Temple » sur Takasago Army. Cet endroit situé à 400 kilomètres de Taipei est chargé d’histoire. Certains doivent connaître l’incident 228 de 1947 qui a vu le gouvernement Kuomintang réprimer violemment un soulèvement et faire entre 10.000 et 30.000 victimes. Les derniers retranchés se réfugiaient alors dans ce temple et beaucoup de victimes y sont tombées. On comprend pourquoi CHTHONIC tenait tant à y faire un live mémorable. L’entreprise a été difficile et a pris plusieurs mois car les religieux étaient opposés au projet. Il a fallu que la mairie intervienne, persuadée que cela serait une bonne campagne de pub pour la ville.
C’est ainsi que cette soirée mythique du 22 octobre 2011 s’est organisée et qu’elle a été enregistrée pour donner 2 CD et 1 DVD. Leur contenu est le même, à savoir un live de près de 105mn découpé en deux parties. La première est composée de 5 titres tirés de Mirrors of Contribution suivis d’un solo à la flûte Pgaku par un vieillard mystique qui semble perdu sur scène et qui disparait aussi vite qu’il est arrivé. 3 morceaux de Seediq Bale suivent. La deuxième partie propose quant à elle la totalité de Takasago Army avec deux invités de marque. C’est d’abord Zhan Ya Wen, la chanteuse de musique traditionnelle taïwanaise, d’ordinaire habituée aux maisons de retraite et émissions Druckerienne du dimanche mais qui n’est qu’une demie-surprise pour les connaisseurs puisqu’elle a déjà posé sa voix sur des titres d’album. Elle aussi n’est pas vraiment dans son élément, mais elle apporte de la fraîcheur, battant lentement le rythme du bras pour ne pas se perdre dans le morceau surdynamité (« Southern Cross »).
L’autre invité est l’Américain Randy de Lamb of God. Il arrive sur la fin de « Takao » puis enchaine sur « Oceanquake » en emportant tout sur son passage ! Complètement possédé, sa voix d’outre-tombe ajoute une énergie démentielle ! Il court dans tous les sens et bouge plus en 5mn que le reste du groupe pendant tout le live ! Il tabasse un max et on rêverait presque qu’il prenne la place du chanteur attitré. C’est un des grands moments du live.
A part ces interventions, peu de surprises dans ce live un peu trop statique et où l’image est assez moyenne. Les plans manquent d’impact et il y a pas mal de parlotte aussi, un problème quand on ne parle pas le chinois. Ces passages qui ont été coupés sur le CD ont l’air de galvaniser l’auditoir et on imagine qu’il s’agit de discours refaisant le monde et surtout l’histoire de Taïwan. Pour preuve le moment durant « Quell of the Souls In Sing Ling » où l’on brûle un drapeau du Kuomintang (je rappelle que c’est le parti politique de Taïwan qui fut lié à Tchang Kaï-chek).
Par contre, le son est plus que satisfaisant. Les claviers sont là mais moins en avant que sur l’album et l’agressivité des titres en est augmenté. Les guitares ont un vrai côté death, et c’était un très bon choix pour électriser l’auditeur. On bat du pied tout du long et on frémit en reconnaissant dès les premières notes chaque titre. On retrouve le plaisir habituel dû au mélange du black et death occidental lié à une forte personnalité et quelques apports asiatiques.
Le DVD propose aussi un clip de « Quell of the Souls In Sing Ling » et deux minutes de successions d’images présentant la préparation du concert. Les deux sont très gadgets et inutiles.
L’avantage de ce live est qu’il peut donner envie de s’intéresser au groupe si on ne le connaît pas. Il représente bien son orientation depuis 3 albums, et plaira aussi aux fans. La pochette est dans le ton, le livret aurait pu être plus fourni, et le seul point faible est le manque de variation dans le filmage. Le CD permet surtout de se faire une copie sur Ipod ou autre pour l’écouter n’importe où, mais on pourra alors préférer les albums studio...
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