Merrimack - Grey Rigorism
Chronique
Merrimack Grey Rigorism
Le « phénomène » (tel que le nomme les médias) ne vous aura certainement pas échappé si vous suivez un tantinet l'actualité : « Fifty shades of Grey » est le dernier torchon à la mode. Du porno vendu en librairie et ciblé pour vieilles vicieuses, pour "cougars" périmées, pour frustrées massives ou pour mères de famille regrettant leur jeunesse parsemée d'alcool et d'activités sexuelles bien plus excitantes que la vulgaire Fiat Panda qui remplit actuellement le rôle de moteur sexuel dans leur vie bien réglée (et pourtant ménopausée, comme quoi...).
Bref, le concept de cette sous-littérature (Hé non je t'arrête tout de suite Mr. Lecteur ! Ce n'est pas de la mauvaise foi, parce que tous les gens qui lisent un minimum s'accordent à dire que ce bouquin n'a aucun style littéraire, même les journalistes TV, c'est dire...) qui mélange la thématique Harlequin avec Bienvenue à Jersey Shore, c'est donc d'apporter cinquante nuances d'une couleur, via la relation sexuelle. Bah après tout, pourquoi pas ? C'est un concept qui se tient même si à mon avis ce n'est pas vraiment ce parti pris qui attire le lectorat, c'est plutôt le fait de pouvoir se masturber sans devoir se battre avec l'historique de Google Chrome... En plus c'est moins grave de se faire griller avec un livre dans les mains qu'avec un film qui tourne à fort volume sur l'ordinateur, vous en conviendrez. Bref tout ceci m'a fait subitement penser qu'un groupe de musique a pris exactement cette idée (à savoir nuancer une couleur et un concept tout au long d'un disque). D'ailleurs mon petit doigt me dit qu'il est clairement plus judicieux de se pencher sur ce groupe plutôt que sur l'arnaque littéraire sus-nommée.
Vous l'aurez donc remarqué en cliquant sur cette chronique, nous parlons ici de Merrimack, entité de Black Metal française qui aura surtout fait parler d'elle pour son disque « Of Entropy and Life Denial » considéré comme un juste mélange entre violence, pureté et dévotion satanique. « Grey Rigorism » est par contre le disque controversé du groupe car faisant entièrement partie de cette frange des disques qui divisent : considéré comme un chef d’œuvre par certains ou comme une sombre merde par d'autres, c'est le genre de travail qui est détesté par la vieille garde des amateurs de black traditionnel et adulé par une certaine génération qui apprécie le mouvement dit « orthodoxe ».
Toujours est-il que Merrimack propose ici dix nuances d'un gris impénétrable et si « Of Entropy... » attirait immédiatement l'oreille par des techniques inhérentes au Black Metal et des structures simplement identifiables, « Grey Rigorism » semble dire « Au feu les simples d'esprit » tellement sa complexité et sa masse monolithique apparaissent à l'auditeur comme une épreuve sur le chemin de la Foi. Impénétrable, long, englué dans une masse mélodique incroyablement profonde, il paraît véritablement impossible de digérer ne serait-ce qu'une petite partie du disque pendant les premières écoutes. Pourtant, derrière cette rigueur effrayante et ce mur impénétrable, quelques personnes auront eu le courage d'avancer et d’entamer le franchissement de ce sommet diaboliquement brumeux.
Bienheureux seront ceux qui auront osé monter ce Mont Sinaï du Black metal Français. Pour tout dire, si j'écris cette chronique c'est bel et bien pour forcer ceux qui auraient été découragés à retenter l'aventure. Petit à petit –et surtout à force de patience- la puissance du morceau titre, la monstruosité émotive et vicieuse d'un « Kirjath-Ra » ou encore la sensation d'ouverture totale pendant « The Golden Door » vous submergerons. Il m'est avis qu'il faut au moins compter une bonne vingtaine d'écoutes pour commencer à entrevoir les qualités de certains titres comme « When the Stars Align ». Mais au final même le sample d'introduction de « By The Grace » (qui est un extrait de la B.O. D’Irréversible et donc composé par Thomas Banglater [de Daft Punk]) ou les ambiances subtilement diffusées dans les titres comme « Désaveu » ou « La sainteté du Mal » vous paraîtrons être autant de clefs que de portes à ouvrir... N'omettons pas non plus cette effrayante justesse dans le ton musical, cette impressionnante précision dans les mélodies qui amène tant à l'exaltation la plus totale qu'au malaise le plus fort et qui fait de cette œuvre un voyage à part entière, une aventure dans notre mysticisme grisâtre qu'on ne peut pas oublier.
« Grey Rigorism » est un album qui mérite de ne pas être jugé à l'emporte pièce en tant que sous-« Of Entropy ». Mais ça encore faut-il se donner la peine de le découvrir car même si la production est par exemple très propre -et pourrait donc constituer une porte d'entrée dans l'univers du projet-, « Grey Rigorism » reste un disque parmi les plus opaques qu'il m’ait été donné d'entendre dans ma vie mais paradoxalement il reste pour moi dans le top du Black dit « Orthodoxe » en tenant largement la comparaison avec les Antaeus, Arkhon Infaustus, Funeral Mist, Deathspell Omega ou autres Glorior Belli. Au travers de ces dix pièces, Merrimack a réussi à proposer un album incroyablement dense qui gagnera toujours en prestige dans votre discothèque car il grandit et s'élève comme un enfant en révélant petit à petit ses vices et ses passions, sa puissance et ses émotions. Passer par la complexité la plus forte pour finir par les émotions les plus parlantes, c'est peut-être ça qui fait de « Grey Rigorism » un grand album.
Pas besoin donc de faire cinquante nuances de gris, les dix meilleures existent déjà.
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