Vuyvr - Eiskalt

Je l'avoue, c'est uniquement par pure curiosité que j'ai pris la promo de ce « Eiskalt ». Tout simplement. Il faut dire que l'association d'un groupe de Black Metal couplé au label Throatruiner avait de quoi faire saliver. Le label français référence du Hardcore mâtiné de crasse qui s'essayait à un groupe de Black Metal suisse, c'était un pari qui, s'il n'était pas forcément osé au vu du nombre de groupes blackisés sortant chez Throatruiner, était au moins salivant.

Que fallait t-il attendre de Vuyvr ? Groupe totalement inconnu avant la sortie de ce premier album, les suisses se décrivent comme un groupe de « Black Metal Froid » ce qui finalement ne contredit pas les quelques groupes suisses qui me viennent en tête comme par exemple Celtic Frost avec « Monotheist » ou l'intégrale de Darkspace... Nous n'omettrons pas de mentionner que ces illustres inconnus ne le sont pas tant que ça puisqu'on retrouve au casting des membres d'Elizabeth ou de Knut... Pour l'instant, le papier n'annonce du beau, et ce n'est pas la pochette réussie et finalement assez originale pour du Black Metal qui va changer la donne. Un paysage enneigé dessiné avec des feutres, en voilà une bonne idée. Certes le sujet est commun au possible, mais au final le traitement Bande dessinée donne un véritable plus artistique à cette cover.

Musicalement, c'est clair que -malgré un énoncé presque novateur, l'accent y étant mis sur le Black Metal-, au final Vuyvr n'est pas vraiment un groupe de Black Metal... La formation applique une couche de Hardcore tellement forte sur son Black qu'on se demanderait presque où est passé le Black. On citera par exemple, le break du premier titre (« Hoch ») qui montre un lien direct avec la production de nombreux groupes de Hardcore noirci, tels que Celeste ou Nesseria. Sans compter certains passages totalement Hardcore, par exemple, le final de « War of 100 000 Centuries ». Bref, Vuyvr est tout simplement un groupe Throatruiner...

Ceci dit, « Eiskalt » s'il ne se différencie pas tant qu'on aurait pu le penser de ses petits camarades coreux, ne trompe pas intégralement l'auditeur sur la marchandise en délivrant quand même un quota honnête de riffs plus Black Metal. C'est d'ailleurs sur les titres un peu plus longs comme « Betrayers of the north » que Vuyvr laissera parler son côté Black, en servant des riffs en trémolo des familles collés sur des blasts très traditionnels. Il faut également noter la production qui valorise cet aspect de la composition, en conservant la lourdeur du HxC mais ne négligeant pas les grésillements, et les trebles montés au taquet si chères aux groupes habitués des froides neiges d'hiver.

Vuyvr est un bon élève, ça s'est sûr. Les suisses savent à l'évidence mixer les éléments divers pour en faire un cocktail parfois très réussi (« Disfigured by Hatred »). Le problème, c'est qu'ils sont peut-être un peu trop bons élèves. « Eiskalt » passe comme un café crème sur une terrasse bondée et c'est là que réside le plus gros problème de ce disque... Tout est très bien fait, et très bien étudié pour séduire l'amateur du genre, mais derrière une étiquette aguicheuse et un rendu sonore au poil, Vuyvr sort à mon sens un disque un peu facile. Si le groupe se permet quelques fantaisies sur « Dead Trees Are Wandering At Night » et son aspect mid-tempo lourd et mélancolique, la majorité du disque semble se contenter d'appliquer des recettes métissées de Black et de Hardcore. Certes, ça marche, mais l'originalité en prend un sacré coup. « Eiskalt » me donne l'impression que même la folie est attendue et délicatement placée dans un petit cocon pour qu'elle soit bien à l'aise...

Certes, l'album est suffisamment bien fait pour que l'écoute se déroule sans encombre, mais une prise de risque supplémentaire aurait été la bienvenue. Quitte à faire du Hardcorised Black Metal, autant reléguer le Hardcore au second plan et tenter le diable avec des titres empruntant carrément des riffs à la Craft ou à la Vargsang. Bref, un opus avec des proportions 70 % Black et 30 % Hardcore m'aurait plus emballé qu'un 50/50 assumé, surtout au vu de l'orientation Black Metal que le groupe semble affirmer.

Bon, ne soyons pas trop sévère, et reconnaissons quand même les bonnes idées qui sortent de cet « Eiskalt », comme par exemple l'excellent dernier titre qui est certainement le meilleur de la galette, oscillant entre lourdeurs distordues et arpèges gonflés d'émotions. Quand on écoute ce titre, on se dit que Vuyvr possède un sacré potentiel pour nous faire décoller, et on en vient fatalement à regretter le petit quelque-chose qui manque sur le disque. Sur le prochain peut-être...

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