Tout vider, tout déballer, débarrasser la table pour mieux continuer d'avancer. Maître maxime de cet EP de Terra Tenebrosa, sorti ce mois-ci chez Apocaplexy Records. "V.I.T.R.I.O.L." est composé de deux pièces, représentant chacune une période différente dans l'avancée du groupe. Probablement (ré)enregistrées peu après
"The Purging" si l'on en juge par le son, elles sont à prendre comme des témoins, des étapes dans le cheminement de Terra Tenebrosa, qui poursuit son petit bonhomme chemin depuis 2011 et ses deux albums, aussi indispensables l'un que l'autre pour tout amateur de musiques tordues. Servi par un artwork toujours centré sur la figure énigmatique de Cuckoo et le mélange de ses deux masques (chacun représentant l'un des deux albums), chef-d'orchestre du trio, cet EP est fidèle à l'univers tissé par les suédois. Étrange, bancal, cauchemardesque.
"Draining the Well", piste de près de 18 minutes, est la ,plus intéressante de cette sortie. Longue, certes, mais en rien lassante, qui se découpe en plusieurs parties. On y retrouve ce jeu de batterie saccadé, si particulier, qui utilise comme personne le tom basse à intervalle régulier, mais aussi ces arpèges grotesques, déments, tout droit empruntés à la piste "Through the Eye of the Maninkari" (issue de
"The Tunnels"). La basse vrombit tel un râle d'âme en peine, mixée légèrement en arrière plan, pendant que le chanteur, d'une voix tantôt posée, tantôt masquée par ces fameux effets, raconte (de ce que j'en ai compris) des grossièretés et autres contes fantastiques plus empruntés à des cadavres exquis réalisés par des psychotiques drogués au Risperdal qu'aux ouvrages d'Andersen. Puis le riffing meurt lentement, décroît progressivement, supplanté par une nappe bruitiste à la croisée de l'Indus et de la Noise, bande-son de l'errance de l'auditeur à travers les nappes de brouillard épais que vomissent ses enceintes. Nappes à peine percées par un écho d'orgue fantomatique et ces multiples voix, chuchotantes comme menaçantes, tant de chants de sirène auxquels nous menaçons de céder. "Draining the Well" se termine en crescendo, sur un pattern écrasant rejoint par guitares et claviers, pour former un maelstrom sonore impossible à déchiffrer, laissant l'auditeur sur le carreau.
"Apokatastasis", quant à lui, est déjà un peu plus "classique" dans la forme, plus enclin à susciter des hochements de tête ou le fameux syndrome du "pied qui marque la cadence". Selon Cuckoo, il est le véritable acte de naissance de l'entité Terra Tenebrosa, le titre qui a posé les jalons du style unique du groupe. Et ça s'entend, car tout y est. La batterie presque dansante (sans rire, on dirait du Disco) et faussement enjouée, les riffs maladifs et la basse écrasante, le sens de la composition tentaculaire et du minimalisme qui met mal à l'aise. Le titre possède une teinte atmosphérique fort bien fichue à travers des riffs diffus et éthérés, caractéristique déjà présente sur les précédents albums, et plus particulièrement
"The Tunnels". La voix se fait à peine plus discrète, se muant en murmures d'esprits frappeurs qui attendent la première brèche pour se faufiler dans votre inconscient pour mieux vous hanter. Une répétition hypnotique qui vous saisit pour ne plus vous lâcher, à l'image de tout ce que le trio a pu composer jusqu'à présent. Comme à l'accoutumée, cette pièce me fait l'effet d'une créature aux contours grotesques, assemblage de bric et de broc qui peine à déambuler et pourtant, poursuit inexorablement son avancée vers vous. Vous qui, fasciné par la démarche titubante et l'apparence fantasque du monstre, ne pouvez le quitter des yeux. Avant qu'il ne finisse par vous attraper.
"V.I.T.R.I.O.L." est plus à considérer comme un complément à la discographie de Terra Tenebrosa qu'à une véritable oeuvre à part entière. Toujours de très haute volée, elle vient purger les fonds de tiroir du groupe pour repartir vers du neuf. Elle ne propose rien de véritablement "nouveau" mais se contente d'asseoir encore plus la majesté de Terra Tenebrosa qui, depuis
"The Tunnels", observe la concurrence avec dédain, en véritable OVNI de la scène Métal. Un EP encore une fois hautement subjectif (Terra Tenebrosa ne peut pas être traité autrement), dispensable pour les curieux, et immanquable pour les véritables fanatiques tels que moi. Je vous quitte sur cette phrase, relayée par le groupe, qui ne fait qu'accroître ma hâte concernant leur avenir :
"The next phase of Terra Tenebrosa according to The Cuckoo is faster, more violent and… ugly."
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