Odraza - Esperalem tkane
Chronique
Odraza Esperalem tkane
Élève de l'école polonaise moderne, qui a notamment formé Furia et Morowe à nous enchanter les oreilles, Odraza (comprenez "Dégoût" en polonais) est en fait un énième side-project d'éminents acteurs de la scène, à savoir deux membres de MasseMord et Medico Peste (pour ne citer qu'eux). Loin de concentrer ses efforts et ses concepts sur la haine gratuite et le blasphème comme il est de bon ton de le faire, Odraza centre son propos sur des thématiques plus... Malsaines, et ce dès la pochette de "Esperalem tkane" : à l'image de ce corps flasque avachi au milieu de mégots et de nicotine, il y est question de haine de soi, de vanité mais également d'autodestruction volontaire. Rien de bien novateur, certes, mais l'imagerie vétuste et salingue est et restera la première chose qui m'aura poussé à me pencher sur l'album - à défaut d'être attirant, elle a le mérite d'apporter une bouffée d'air vicié au milieu d'un déluge de symboles pseudo-religieux recyclés ad nauseam.
Brillant par un son exemplaire, très organique, la galette met aussi bien en valeur le jeu démentiel de Priest, batteur supersonique mais sachant élargir sa gamme de jeu aux parties plus fines, que la palette vocale allant du growl au chant presque "punk" de Stawrogin. "Esperalem tkane" ressort clairement du lot commun de par ses compositions, chacune porteuse d'un univers, d'une ambiance différente, mais suivant un fil directeur crasseux. On passe aussi bien du Punk teinté de Grindcore et de Powerviolence avec "Wielki Mizogin" à des compositions lentes et vicieuses comme le démarrage de "Chicha 8", le tout sans aucun accrochage. La galette baigne dans une ambiance poisseuse véhiculée par les guitares grésillantes et sous-accordées et le chant assez particulier, prenant au détour de certaines phases de teintes maladives. Le groupe développe ainsi un embryon de personnalité qui lui est propre. Même si, inévitablement, certaines tournures de rythme et accélérations sont directement calquées sur celles de ses aînés (MasseMord en tête, "Chicha 8" en tête).
Cette personnalité, c'est l'image que le groupe donne de sa créature. Une bestiole chancelante, évoluant péniblement dans une atmosphère suffocante, évoquée par certaines incursions mélodiques ou sonores disons... surprenantes : un harmonica presque inquiétant sur "Gorycz", du tremolo-picking à peine perceptible et des quintes de toux sur "Próg". Tout sonne comme un cauchemar embrumé, ou tous ces décalages sonores apparaissent comme autant d'hallucinations à l'esprit enfiévré de l'auditeur. La dernière piste étant la plus impressionnante : très longue, étalant de longues plages instrumentales presque reposantes (et pas chiantes pour un sou pour le peu qu'on y soit réceptif), elle consiste en un véritable détour vers des terres étiquetées "Post-introduisezuntermeici", épilogue surprenant d'un disque qui l'est tout autant, dont certains passages auraient réellement pu sortir tout droit de la tête de Kvarforth.
"Esperalem Tkane" est une sortie assez impressionnante, en terme de niveau de jeu comme en terme de qualité. Synthèse de MasseMord pour les accélérations dantesques et de Medico Peste pour ce côté "boîteux", gageons qu'Odraza saura s'émanciper de ses aînés pour développer sa propre personnalité. Il n'en reste pas moins que cette galette saura se faire apprécier des amateurs du genre.
| Sagamore 24 Juillet 2014 - 7067 lectures |
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