[ A propos de cette chronique ] Parfois, marchant distraitement dans la rue, perdu dans ses pensées, il nous arrive de trébucher et de tomber sur un objet totalement inattendu : une paire de chaussures de golf, un lave-vaisselle ou encore un chinois. Si dans les trois cas la situation paraît plutôt improbable, c'est un peu ce qui m'est arrivé avec LASCOWIEC. Venu de nulle part, ce groupe américain a su me séduire au premier coup d'oreille jeté sur sa musique découverte avec ce
Frostwinds of the Apocalypse sorti chez Dark Hidden Productions en 2012, décelé et attrapé pour la petite histoire chez notre excellent label hexagonal Crush The Desert qui sait toujours si bien sélectionner les disques qu'il propose à une clientèle plutôt ciblée. Une discographie plus tard, je suis ravi de vous présenter aujourd'hui ce groupe tapis dans les bas-fonds de San Francisco ayant pris le pari, ce qui n'est pas une mince affaire, de sonner comme les combos du BlazeBirth Hall -pour ceux qui s'endorment déjà au fond, FOREST, BRANIKALD, RAVEN DARK et compagnie- dans cette pratique si maîtrisée du Black Metal le plus glacial qui soit comme ils le faisaient déjà sur leur disques précédents (sur leurs démos, sur le split avec MARBLEBOG, sur
Unbroken Spirit sorti l'année dernière...). Bon, les cancres qui ronflent grassement depuis le début ou qui soupirent ostensiblement à la lecture de ces noms maudits peuvent s'arrêter de suivre tout de suite et prendre la porte : pas la peine de se taper un énième pavé pour entendre parler d'un album qu'ils n'écouteront pas.
Pour les autres, c'est en dessous de cette phrase inutile que ça se passe.
Diantre, que c'est bon d'entendre un groupe résolument aussi antimoderne pratiquer un Black Metal autant touché par la grâce ! Cet océan de stalagmites qui fond sur votre cœur comme la misère fond sur le pauvre homme rappelle réellement, à l'image de ce que faisaient les Russes dans les années 90, ce que l'Art Noir le plus froid et le plus crû a de salvateur, moi qui n'y croyait plus vraiment ces derniers temps. Blast Beats totalement brainless, coupés occasionnellement par quelques mid-tempo libérateurs : oui, la batterie -inhumaine au possible- va au plus simple, cognant comme si sa vie en dépendait sur les parois d'un corps déjà bien bien sensibilisés par ce riffing débordant de mélancolie. Bordel de merde, comment les amateurs de ce genre de Black Metal monomaniaque ne peuvent pas céder de tout leur être à cette mélodie pernicieuse qui apparaît vers les trois minutes de « When Nothing Remains » (là je vous fais juste le coup du mec pas trop maniaque et pas trop précis, mais en fait c'est 3'16'', qu'on se le dise) ? Dès ce riff parfait, les dernières défenses de l'auditeur averti tombent en miettes devant cet iceberg de classe et son genou se pose automatiquement à terre pour implorer son propre salut.
Mais le pire, c'est que ces sagouins de yankees ne s'arrêtent pas en si bon chemin ! Ils ne vont pas vous lâcher de l'album, rassurez-vous, ces petits vicelards n'ont de cesse de maintenir l'étreinte dans laquelle ils plongent les pauvres mortels qui sont malencontreusement tombés sur ce
Frostwinds of the Apocalypse. L'étau se resserre de morceaux en morceaux, augmentant la transe qui guette le fou dès les première notes du disque. Et la danse ne s'arrête pas là, puisque lui succède ce qui est probablement le meilleur morceau du disque, « Hail of Destruction », qui pour le coup emporte tout sur son passage après avoir congelé chaque membre vital, cages à miel comprises. LASCOWIEC ne cesse de pilonner, à grands coups d'hymnes païens ultimes, le pont-levis qui garde le forteresse comportant la santé mentale du pauvre humain qui aura commis le pêché de se plonger à fond dans ce disque. Dommage que la bataille soit de si courte durée... une grosse demi-heure pour une telle ribambelle de sentiments bruts ne suffit vraiment pas, surtout lorsque ces pièces royales sont entrecoupées d'interludes à la réussite variable. Pour être parfaitement objectif, seule l'outro, « Swept Away by the Frostwinds of the Apocalypse » sur laquelle vient mourir avec brio ce disque, est réellement digne d'intérêt.
En voilà un genre de Black Metal qui pousse tout être sain à l'autisme ! Jusqu'à se prendre la tête entre les deux mains pour hurler sa rancœur du monde moderne, à gesticuler dans tous les sens pour aider LASCOWIEC à extirper de votre corps lacéré cette souffrance extrême véhiculée par ces riffs nostalgiques et déchirants, grattant à ongles déployées les gouttes de sang qui perlent sur vos tristes bras mis à mal par tant de génie. Et sur ces chants cristallins se déposent une voix, LA voix parfaite pour ce genre de Black Metal. Ce n'est pas la légère reverb qui va la gâcher : l'homme qui éructe sa rage semble crever la gueule ouverte dans un râle fatal à chaque mot qu'il vomit... la puissance qu'il dégage avec ses cris d'agonie se voit ainsi proportionnelle à l'impact que cela crée sur l'auditeur, qui se positionne comme étant à son chevet, observant son déclin fatidique tout en se gelant les couilles dans la chambre froide qui lui sert de prison. Et on a pas envie de l'abandonner, ce brave garçon, tant il met du cœur à l'ouvrage pour sortir le meilleur de son organe... écoutez moi un peu ces harangues meurtries qu'il pousse sur « Eternal Spirit » et sur « Marching Toward Destiny », chant du cygne d'un opus accompagnant les larmes congelées qui coulent sur le visage de l'homme blessé ? Là encore, toutes les faiblesses qu'il nous propulse en pleine face deviennent des forces, pour le meilleur évidemment !
Parfois, je me me mets à rêvasser, imaginant dans un fantasme cosmique que LASCOWIEC a été créé uniquement pour me plaire et à l'écoute de ce disque excellent de bout en bout (mais beaucoup trop court bon sang de bois...) je vois le duo discuter mystiquement autour d'un bon verre de vin californien :
« Well, si on faisait un groupe pour plaire à ce con de Geisterber ?
- C'est qui déjà lui, cet espèce de chroniqueur français à la mords moi le noeud qui fait des pavés de 6 pages pour décrire tous les albums qui ont plus de trois notes ?
- C'est cela-même, bro.
- Ah ouais, bonne idée du coup, un truc ultra monolithique avec des riffs qui vont bien ça lui en boucherait un coin à cette andouille non ?
- Yeah babe, même si il parle trop, c'est une excellente initiative !
- D'accord. Faisons comme ça »
Et même s'ils craquent un peu leur slip sur une introduction qui ressemble à la BO d'un mauvais jeu de Trve Gameboy et sur « Seidhr », interlude un peu trop bouche-trou (les deux défauts majeurs de l'album avec sa durée, en fait) les voilà partis pour cette avalanche neigeuse de riffs ultra atmosphériques et contemplatifs sur vos sales gueules frigorifiées par ce torrent de classe et abruties par tout le froid dégagé par ce duo ultra prometteur. Diantre, il y a bien longtemps que je n'avais fait une découverte aussi marquante et à l'heure du bilan ; celle-ci a réellement marqué mon année 2012 et croyez-le bien, le 8/10 que je lui administre arbitrairement n'est que le reflet de mon professionnalisme.
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